NETTALI;COM - Les récents évènements ponctués de violence, de saccages, avec des morts d’hommes, ont foutu un sacré bordel dans le Macky. De la trouille aussi. Et les partisans du président Sall ont décidément beaucoup de mal à remonter la pente question de se racheter de n’avoir pu prouver leur loyauté tant chantée et vantée. Ils tentent tant bien que mal de se relever, mais avec grande peine. Mais une fois que le président a déclaré avoir compris la jeunesse et aussitôt l’état d’urgence levé, ils ont comme dans une sorte d’élan concerté, commencé à sortir progressivement des bois.

Certains rats pensaient que le navire était sur le point couler et s’étaient terrés, rasant les murs ; certaines indiscrétions, font noter que d’aucuns étaient allés se cacher à Saly, d’autres dans des hôtels, en prenant toutefois le soin de mettre à l’abri leurs véhicules et certains biens. Sacrés trouillards, comment ont-ils pu laisser celui qu’il appellent la constante et louent tel un dieu, seul au milieu du gué ? Mais heureusement que les jeunes sortis dans les rues, savaient qu’ils n’avaient pas le droit d’aller plus loin, et se sont retenus, après que leurs messages sont arrivés à destination.

Mais chose étonnante, après ces pluies de milliards annoncés d’ici 2023 (450), même s’il y en a 150 pour cette année et 65 000 emplois promis, la seule trouvaille des alliés du président, a été d’organiser des meetings pour bomber le torse et rassurer leur leader qu’il est toujours aussi populaire et toujours logé dans les poitrines des Sénégalais. Les adversaires d’en face les regardent, riant sous cape. Ils sont bien ridicules de bonder le torse et de bander les muscles dans des ambiances folkloriques qui se succèdent en ce temps de covid qui proscrit les rassemblements. Ils n’en ont cure, ne voulant pas perdre le fromage de sitôt alors que d’aucuns pensent que Macky échaudé, ne pense même plus à l’après 2024.

                                                          Les meetings du folklore  

La presse de ce lundi (et celle des semaines passées d’ailleurs) est en tout cas largement revenue sur le sujet, mettant en évidence les meetings bien à la mode dans les prairies marron-beige. A Ngalèle, ce samedi, 10 avril, c’est un meeting de massification qui a été organisé par Bamba Fall, lieutenant de Mansour Faye et non moins coordonnateur départemental de Benno Bokk Yakaar et maire de Saint-Louis. M. Faye a ainsi déclaré qu’il «faut être courageux pour relever le défi d’une telle mobilisation dans ce contexte particulier. » « Il y’avait des frustrés, mais Bamba Fall est allé les chercher pour les ramener à ses côtés. Cela montre que c’est un vrai responsable politique et nous l’encourageons dans cette dynamique qui est celle de Benno Bokk Yakaar. La coalition dirigée par le Président Macky Sall travaille pour la population. Si on se sacrifie pour la population, pour lui venir en aide, elle comprendra que nous sommes ici pour elle. Et ce que j’ai vu aujourd’hui à Ngalléle montre à suffisance que la population apprécie notre travail», a déclaré le beau-frère du président et ministre des Infrastructures. Un beau discours à priori, sauf que Mansour Faye ne se rend pas compte qu’il sert ceux-là et ne leur apporte point d’aide. Difficile en effet pour les politiciens de se rendre compte qu’ils sont au service des populations et non le contraire.

A Ziguinchor ce samedi 10 avril à la Place Bambaya, même scénario, c’est un méga meeting aux allures de démonstration de force, avec des militants et sympathisants venus de toutes les localités de la Casamance qui a été organisée. De quoi surfer sur les terres qu’on attribue souvent à Ousmane Sonko. Doudou Ka le DG de l’Aibd a dû certainement entendre les complaintes de ce cher Madiambal qui s’insurgeait contre les cadres politiques casamançais, aphones pendant et après la période de la crise. Il y avait aussi, soulignons-le, le meeting de Oumar Guèye, au terrain des HLM qui a fait suite à ceux de Farba Ngom, Me Malick Sall, Abdoulaye Daouda Diallo, Cheikh Oumar Hanne dans le Fouta ; de Mame Boy Diao à Kolda. A Podor, c’était rebelote ce week-end car le maire, Abdoulaye Elimane Dia dit « Kaladio », a mobilisé ses partisans et a profité de cette occasion pour octroyer des financements et annoncer l’érection d’un centre de formation professionnelle dans le département.

Bref on en sort étonnés de tout ce brouhaha et l’on ne peut manquer de se demander si la politique sous nos cieux, ne se résume pas à une sorte de jeu de dupes où les personnes autour du président de la République ne se préoccupent finalement que de prébendes. Ces récents évènements ont en effet démontré à la face du monde, leur déficit d’engagement, évitant même d’aller aux charbons, au moment où le feu commençait à s’attiser.

                                           Deux soutiens : Farba, l'inconditionnel et Gaston, l'affairiste  

Un fait que relève d’ailleurs Farba Ngom en ces termes : « ce qu’ils font aujourd’hui, ce n’est pas soutenir Macky Sall car le moment où ils (les partisans) devaient soutenir le président, est passé. S’ils avaient organisé ces meetings au moment où Ousmane Sonko faisait ce qu’il faisait, ce qui s’est passé, ne se serait jamais passé. Ils ne peuvent pas tromper le président Macky Sall… » « Je vous remercie de m’avoir posé cette question sur les membres du parti qui se sont terrés dans un contexte où un individu (ndlr – Ousmane Sonko) appelait à casser et à brûler. C’est un appel qui s’était soldé malheureusement par une réussite. J’avais prévu tout cela quand je m’engageais en politique (…) Il y en a qui ont fui, d’autres qui ont eu peur, il y en a parmi eux qui ne croient pas en Dieu et en eux-mêmes. Les gens pouvaient aller sur les plateaux et donner des contre-arguments», a ajouté M. Ngom.

Que penser de Farba Ngom lui-même qui n’a pas été vu sur le front ? S’est alors demandé Babacar Fall. Celui-ci de justifier entre autres raisons de son absence de la scène médiatique pendant ce moment-là, par le coronavirus qu’il avait contracté. « J’ai eu le coronavirus pendant ce moment-là. Mais si ce n’était pas cela, ce qui touche Macky Sall, me touche. Je comprends que ce n’était pas pour Pastef uniquement que les gens étaient sortis, mais c’est un phénomène où les Sénégalais s’étaient levés en masse avec des revendications différentes », avait déclaré celui-ci face à Babacar Fall à l’émission « Faram Facce » sur la TFM.

Même son de cloche chez Gaston Mbengue invité à la même émission, un autre soir, mais qui n’a pas pu s’empêcher de s’en prendre à ceux-là qui s’étaient terrés. Pour le promoteur de lutte qui se dit « grand frère de Macky Sall », « organiser des meetings ne règle rien. Cela ne fait pas avancer le pays.. » De l’eau dans le moulin des détracteurs de ces meetings tous azimuts organisés à coups de millions.

Gaston Mbengue et Farba Ngom, deux personnages qui ont la particularité d’assumer leurs positions et qui n’hésitent jamais à les affirmer mais dans un langage souvent bien crû. Deux bons clients de la presse, mais de sacrés personnages qui ont aussi la particularité de savoir défendre leurs intérêts. Si Farba Ngom est connu pour être un fidèle de Macky Sall qu’il dénomme d’ailleurs son « calife en politique », Gaston Mbengue, lui estime que Macky Sall lui au moins, « est bien mieux Diouf et Wade » qui n’ont rien fait pour lui. Pour le promoteur, l’objectif n’est pas de donner de l’argent, mais « de mettre l’individu en position d’en gagner ». Sauf que Gaston Mbengue a estimé devant un Babacar Fall très taquin et vicieux dans la manière d’amener ses question, que ce qu’il a fait pour le président, personne d’autre ne l’a encore fait. « Si Macky Sall fait un geste à mon endroit, c’est parce qu’il doit en faire car organiser des meetings, ne règle rien, ne fait pas avancer le pays ; et ce que je fais pour lui, personne ne le fait. Je calme sa jeunesse. Je calme ses sportifs. » « Personne n’est plus populaire que moi. Personne n’a plus de monde que moi et encore moins d’audience », a fait savoir M. Mbengue.

Un message d’autant plus scandaleux du promoteur qui semble dire qu’il suffit de distraire les jeunes pour qu’ils ne se mettent pas à casser ou à manifester. Gaston Mbengue ne doit pas en tout cas avoir une grande estime pour cette jeunesse qui pense-t-il, doit être abreuvée de distractions afin qu’elle se tienne à carreaux. Difficile en effet de croire que la lutte ait sorti un nombre important de jeunes de la précarité ! En dehors de Balla Gaye 2, Tyson, Eumeu Sène, Modou Lô, Gris-Bordeaux, Lac de Guiers, etc. La liste risque de ne pas être très longue. A moins peut-être que le Lougatois ne voit ce sport que comme un opium du peuple. Ce qui serait bien dommage. Que Gaston tourne la langue sept fois avant de débiter de telles paroles. L’on ne peut pas tout dire surtout dans un contexte où cette jeunesse a à peine fini d’exprimer son ras le bol. Le promoteur n’avait-il pas un moment décidé d’abandonner la lutte ? Il est revenu comme par enchantement dans l’arène, mû on ne sait par quelle dessein. Mais, il doit comprendre aussi que même s’il pense que la lutte a un effet tranquillisant, elle a aussi ses travers. Récemment, l’on a à travers des écrans de télévision, vu des sièges arrachés à l’arène nationale, au cours d’un récent combat. Que penser de cela ? Loin de condamner toute la lutte, ce n’est guère un secret qu’elle charrie aussi de la violence avec ses sorties de stades tant redoutées par les populations riveraines.

Deux sorties qui ne peuvent produire aucune objectivité. L’une est celle d’un inconditionnel du président ; la seconde, celle d’un homme d’affaires qui cherche à se refaire une santé et qui fait des appels incessants du pied et qui souffrent que les ministres et autres DG ne répondent pas au téléphone.

De quoi se demander si les politiciens apprennent des populations qu’ils sont censés servir. Au cours d’une grande mobilisation de ce samedi 10 avril, le leader de la coalition « Taxawu Senegaal », Khalifa Sall qui a entre autres exigé l’audit du fichier électoral et le respect du calendrier électoral, a son opinion sur les récentes émeutes. Il considère tout eu plus que le régime n’en a pas fait une bonne lecture. « Les événements du mois de mars nous interpellent dans notre capacité à lire la révolte des populations. Parce qu’il ne s’agit pas d’inquiétude des populations, il s’agit d’une vraie révolte. Les populations n’ont eu besoin de personne pour se soulever », a-t-il déclaré. Avant d’ajouter : « Les gens ont dit qu’elles avaient faim ; elles ont saccagé. Mais pourquoi se sont-elles comportées ainsi ? » « Nous sommes dans un pays où manifester est devenu une exception. On ne peut pas marcher librement ; on ne peut pas parler librement. Tout est réprimé’ », a-t-il dénoncé. Khalifa Sall pense d’ailleurs que la prison n’est pas une solution, en démocratie. « On ne peut pas tout le temps mettre les gens en prison. Finalement, ça déprécie la prison. Parce que ken ragalatu fi kasso, naxte nieup dem nagn kasso (nul n’a plus peur de la prison, parce que tout le monde y est allé) », a-t-il fait remarquer, estimant qu’ « il y a des textes liberticides qu’il faut abroger ».

                                                        Des économistes sceptiques sur la question de l'emploi

En fait de réponses, celles fournies par le président notamment les emplois et les sous annoncés, ne semblent pas faire sensation. 65 000 jeunes sur l’ensemble du territoire national pour des activités d’éducation, de reforestation, de reboisement, d’hygiène publique, de sécurité, d’entretien routier et de pavage des villes. De quoi à priori se frotter les mains pour certains qui sont bien contents d’avoir du boulot tout simplement. Mais de quels emplois parle-t-on ? Pour quels niveaux de rémunération ? Sur quelle durée ? Pour quels types de qualifications ? Un effet d’annonce vu comme du saupoudrage et de quoi calmer les esprits en suscitant un tout petit peu d’espoir.

Des économistes interrogés par « le Témoin » du mercredi 7 avril se sont montrés bien sceptiques. Et Mansour Samb, de prédire : « avec ces réorientations budgétaires, il faut s’attendre à voir d’autres secteurs subitement en crise et des blocages dans plusieurs départements ministériels », ajoutant que « ce n’est pas avec le budget qu’on crée de l’emploi, mais plutôt avec un secteur privé fort ». Meïssa Babou lui, préconise la fusion de la Der, de l’Anpej, de l’Adpme « en une seule structure », préconisant qu’ « il faille aussi auditer l’utilisation des milliards utilisés dans ces structures ».

Invité du « Jury du dimanche », Oumar Seck, expert financier, chef de la Plateforme EU ACP de développement du secteur privé, pense que tant qu’un dispositif de promotion des PME/PMI n’est pas mis en place, ce sera difficile de créer des emplois. Ce, parce que la promotion des PME est au cœur des agendas de création d’emplois. « Il ne s’agit pas de mettre l’argent. Il s’agit d’avoir un dispositif orienté vers des résultats concrets. Ce n’est pas l’argent qui règle la question de l’emploi. On a un problème d’instruments, d’outils de mis en œuvre. Le dispositif de financements et d’encadrement n’est pas efficace. Le Sénégal a des institutions mais il y a des problèmes au niveau des instruments et les stratégies et de la redevabilité. Il y a possibilité de rationaliser les structures », a expliqué celui-ci.

Mais Macky et ses partisans avancent aveugles et sourds, donnant l’impression de vouloir ouvrir un nouveau front. L’Etat ne veut surtout pas passer cette affaire de violences avec morts d’hommes, par pertes et profits. Il veut que la lumière soit faite sur les 13 morts et 590 blessés, ainsi que l’a annoncé le ministre des Forces Armées Sidiki Kaba qui faisait face à la presse ce jeudi 8 avril 2021. Celui-ci a en effet annoncé la mise en place d’une commission d’enquête indépendante et libre. A en croire M. Kaba, l’opposition et la société civile ont fait endosser à l’Etat du Sénégal, toute la responsabilité relative à ces évènements qui ont occasionné des pertes en vies humaines et beaucoup de dégâts matériels. Ce qui, à son avis, serait injuste.

Une commission d’enquête que le Mouvement pour la défense de la démocratie (M2D) qui a pris acte de la décision, juge toutefois suspecte. Elle veut ainsi rester vigilante sur « les modalités de mise en place, la composition et les TDR de cette commission dite indépendante, puisqu’il est constant que, sous nos cieux, de telles commissions ne sont souvent créées que pour ensevelir la vérité et charger des cibles désignées ». Dans son mémorandum, souligne le M2D, le gouvernement a conclu son réquisitoire par la désignation d’un coupable qui n’est autre qu’Ousmane Sonko. « Quelle pertinence de mettre en place une commission d’enquête, dès lors que l’initiateur, partie à l’affaire, a déjà « jugé » et « condamné ? » Une décision qui risque encore de soulever de nouvelles polémiques et éventuellement d’autres problèmes.

De quoi largement s’inquiéter au moment où le report des élections a fini de créer des dissensions. C’est le couplage avec les législatives que l’on redoute désormais. « Si le gouvernement a la volonté de tenir les élections en décembre 2021, elles se tiendront. C’est ce que toute l’opposition demande. Et ce n’est pas trop demander ; c’est un droit », considère le socialiste qui se demande comment on pourrait reporter les élections en 2022, alors que le budget 2021 est déjà voté. À ses yeux, il est infaisable de coupler les élections locales et les Législatives.

Comme quoi avec les politiciens, c’est une polémique sans fin avec du folklore qui reprend toujours le dessus sur tout. Bienvenue en Folklorie ! Au Sénégal pardi !