NETTALI.COM - Beaucoup d’acteurs de la filière sucre se rejettent la faute de la hausse constatée, ces derniers temps. Toutefois,  à en croire la livraison de ce samedi de Enquête, les instructions données par le président de la République en conseil des ministres sont en voie d’être appliquées.

C’ est le retour à la réalité. Celle d’un quotidien sénégalais qui n’échappe pas aux difficultés de la vie. Malgré le nouveau statut de champion d’Afrique que réclament désormais les internautes, les primes à la hauteur de l’exploit historique réalisé par les Lions du football, le “goorgorlu’’ (sénégalais lambda) devra se résoudre à payer plus cher ses denrées de consommations courante. Contexte mondial oblige. Les prix de toutes les denrées de première nécessité ont augmenté en une année. Le dernier en date et qui suscite depuis peu le ras-le-bol des consommateurs est celui du sucre. Cette denrée a connu une spéculation avec une augmentation allant de 25 à 100 francs CFA. Des industriels aux détaillants, en passant par les grossistes et le ministère du Commerce, tout le monde se rejette la faute.

En l’état actuel des choses, les détaillants sont tenus de vendre le kg de sucre cristallisé à 625 francs CFA, le prix fixé par le gouvernement. Mais dans le marché, ce dernier peut grimper jusqu’à 700 francs. Des irrégularités et une infraction contre laquelle le directeur du Commerce intérieur, Oumar Diallo, a récemment mis en garde les commerçants. Mais ce qu’a constaté le président de l’Association des consommateurs du Sénégal (Ascosen), c’est qu’une hausse d’au moins 50 francs a été officiellement appliquée par le ministère du Commerce sur le kg de sucre.

En effet, détaille Momar Ndao, “une première augmentation du sucre avait été adoptée au mois d'août 2021. Elle avait fait passer le prix du kilogramme de sucre de 575 à 600 francs CFA. Après enquête, l’on s’est rendu compte que cette augmentation n’avait pas bénéficié à la compagnie sucrière sénégalaise (CSS). Elle avait renoncé à cette hausse du fait des inondations alors que les consommateurs continuaient à payer plus cher le prix. La hausse d’Août était de 25 F alors que celle qui est en vigueur est de 50 F, puisqu’un arrêté pris par le ministère du Commerce avait porté le prix du Kg de sucre à 625 F.’’

Une hausse anormale

L'Union nationale des commerçants et industriels du Sénégal (Unacois) s’inscrit dans la même veine et assure que cette hausse a plus profité aux détaillants qu’aux grossistes. Et la faute, selon Momar Ndao, incombe au ministère de Commerce qui n’a pas mis en place un dispositif efficace de contrôle des prix au détail.

Le 4 septembre 2021, le ministère du Commerce a rendu public un arrêté portant administration des prix de l’huile de palme raffinée, du sucre cristallisé et du riz brisé non parfumé. On pouvait y lire que le prix du sucre cristallisé est fixé à 600 Francs CFA le Kg, le riz brisé non parfumé à 300 F/Kg, l’huile de palme raffinée à 1 200 F/L, entre autres. Aujourd’hui, l’arrêté du 21-94 du 3 février 2022 du ministère du Commerce a fixé le prix du kilogramme de sucre en poudre à 625 F Cfa.

Pour le président de l’Ascosen, ces arrêtés ont été pris sans respecter la procédure de gestion des prix. Car, rappelle-t-il, “il doit y avoir des comités techniques qui vont travailler avec les différents experts, les consommateurs, l’Administration, les industriels, les commerçants…

sur la structure du prix et qui vont faire une proposition au Conseil national de la consommation. Ce n’est qu’après avoir adopté ces propositions que ce Conseil propose une modification des prix en hausse ou en baisse. C’est sur la base de cette proposition que le ministre du Commerce prend un arrêté pour valider la décision prise en Conseil national de la consommation.’’

“C’est contraire à ce que nous avions convenu en août dernier’’

Momar Ndao poursuit pour dire que la hausse constatée “est contraire à ce que nous avions convenu en août dernier. C’est pourquoi nous rejetons ce prix de 625 F. Le président de la République nous a suivis sur cela. Après nos complaintes, il a exigé que l’on baisse les prix. Nous voulons revenir à 600 F ou moins.’’

En conseil des ministres mercredi dernier, le président de la République a invité le ministre des Finances et du Budget et celui du Commerce, à réunir, dans les meilleurs délais, le Comité national des prix. Et le gouvernement, “d’intensifier les initiatives, actions de stabilisation et mesures urgentes de baisse des prix des denrées de consommation courante.’’

Le président de l’Ascosen a confirmé un début d’application de ces instructions. Hier, s’est tenue une réunion du Comité national des prix et une réunion de validation est prévue lundi. “Elle sera présidée par le ministre des Finances et le ministre du Commerce. On n’est en train d’appliquer les instructions du président de la République qui souhaite une baisse des prix. Une fois que ces rencontres du comité technique et du comité des prix auront abouti, les nouveaux prix seront communiqués’’, assure Momar Ndao.

Ces derniers mois, plusieurs denrées de première nécessité ont vu leur prix augmenter. Des hausses souvent justifiées par la conjoncture économique internationale. La hausse des facteurs de production sont mis en avant par la compagnie sucrière sénégalaise pour expliquer l’augmentation du prix du sucre. Après une série de grèves des boulangers, le gouvernement a consenti à une augmentation de 25 F sur la baguette standard de pain qui est passée de 150 à 175 F CFA, pour “ éviter de mettre en péril les entreprises de la minoterie avec 70 000 emplois directement et indirectement’’. Les prix du blé ayant explosé, ajoute le ministère du tourisme, le redressement des prix était inévitable, malgré les suspensions de taxes par le gouvernement pour maintenir les prix.

Baisse des prix du sucre, de l’huile et du riz ?

Il y a aussi les prix de l’aliment de bétail dont le Kg est passé de 250 à 300 F CFA. Le loyer dont une loi avait baissé les prix est reparti à la hausse.

Sur ce point précis, le président de l’Ascosen rassure qu’une “une approche a déjà été initiée avec un projet de loi et de décrets en cours d’élaboration pour voir si les textes doivent être améliorés ou non pour une bonne régulation des prix du loyer.’’

Revenant à la réunion de lundi prochain, Momar Ndao retient que les techniciens travaillent pour une baisse des prix du sucre et éventuellement ceux de l’huile et du riz. Une fois acquise, “ce sera au ministère du Commerce de ramener les détaillants à respecter les dispositions prises. L’arrêté doit également être harmonisé à tous les niveaux. Il doit fixer le prix au détail. Mais aussi le prix du gros et du demi-gros. Le détaillant ne peut pas acheter trop cher et appliquer les prix demandés par le gouvernement. Il ne va plus vendre ce produit de peur d’être verbalisé. Et cela va créer une pénurie dans le marché’’.

Cette situation est déjà observable sur le marché. Le sucre en poudre commence à connaître une pénurie. Et la chaîne de désagréments touche énormément de citoyens. En plus des consommateurs, les vendeurs de petit déjeuner, jus de fruits, thé, bouillie etc. sont tous en alerte.