NETTALI.COM - Auteur d'un carton plein historique en matchs de poule, le Sénégal était attendu au sommet. Beaucoup d'observateurs le voyaient aller au bout de cette 34ème édition de la grand-messe du football africain. Mais l'espoir a vite viré à la douche froide.

En tout cas le 6ème huitième de finale de cette CAN 2023 a sonné comme une histoire de David contre Goliath. Unique nation à faire carton plein, le Sénégal hérita de la Côte d'Ivoire qui comptait seulement 3 points au premier tour. Autant dire que la meilleure formation en phase de groupes, croisait la pire formation (4ème des meilleurs troisièmes). Mais en football, un match n'est jamais gagné d'avance et le Sénégal l'a appris à ses dépens. La Côte d'Ivoire qui revient de loin après sa fausse mort, l'a encore prouvé avec cette qualification qui va certainement permettre aux joueurs ivoiriens de se faire pardonner.

Au delà des faits de jeu notés dans ce match, le pénalty non sifflé d'Ismaïla Sarr, Nicolas Pépé qui était hors jeu sur son pénalty, l'occasion manquée de Sadio Mané en deuxième période et son raté sur la belle passe de Krépin en prolongation, le tir au but manqué de Moussa Niakhaté...force est de reconnaître qu'Aliou Cissé a pêché tactiquement.

En vérité, depuis le début de la coupe d'Afrique des nations, le Sénégal allait toujours chercher ses adversaires, récupérait les deuxièmes ballons, occupait les couloirs et pressait très haut son adversaire. Mais face au pays hôte, le sélectionneur des Lions a joué contre sa nature. Son fameux 3-4-3 a eu toutes les peines du monde à produire des effets. La conséquence est que le milieu de terrain perdra ses repères dès la 15ème minute de jeu. Un système qui n'a pas du tout été convaincant. Résultat des courses, le Sénégal qu'on voyait en phase de poules devant des adversaires beaucoup plus actifs que la Côte d'Ivoire, n'a été finalement que l'ombre de lui-même. Méconnaissable, peu créatif et timoré.

Un milieu déséquilibré

Si ce n'était que cela, on aurait pu dire. Malgré l'ouverture du score matinale, l'équipe sénégalaise était déséquilibrée du début jusqu'à la fin. Abdou Diallo qui était censé jouer le rôle hybride de Pape Guèye (tant sentinelle, tantôt 3è défenseur central) ne l'assumera pas. L'ancien Parisien était tout le temps collé à la défense, désertant complètement le milieu de terrain. Du coup, Lamine Camara et Pape Matar Sarr étaient 2 contre 3 milieux ivoiriens (physiquement plus costauds et plus expérimentés qu'eux).

Un déséquilibre (un milieu sans sentinelle) qui a permis aux Ivoiriens de bouffer complètement le milieu de terrain. Un excellent joueur comme Lamine Camara a plus couru qu'il n'a tenu le ballon, tellement les Ivoiriens étaient toujours en surnombre au milieu. Ce qui fait le plus mal, est que Cissé n'a pas songé à corriger ce déséquilibre flagrant durant tout le match, alors que la clé était d'une simplicité inouïe : sortir Abdou Diallo et mettre un 3ème milieu de terrain pour avoir un équilibre dans l'entrejeu (Nampalys, Gana, Kouyaté ou Pathé Cissé), un milieu classique.

Et même avec l'entrée de Gana Guèye, le déséquilibre persistait car il manquait toujours cette sentinelle, le milieu à trois (Gana a remplacé Lamine Camara, c'est du poste pour poste, le système n'a pas changé).

A la vérité, c'est ce déséquilibre notoire non corrigé qui a coûté cher aux Lions. Ce qui rend Cissé à 100% le responsable de cette élimination, quel que soit par ailleurs le bout par lequel on prend le match.

Un système, eh bien, on le transforme en fonction de l'évolution d'un match. Cissé aura en tout cas réussi une prouesse, celle d'avoir redonné de la confiance à l'adversaire avec son impertinent bloc bas. Abdou Diallo qui devait sortir depuis belle lurette, ne sortira finalement qu'à la 115ème minute. La faute aux perpétuelles hésitations de Cissé, connu pour ses changements souvent tardifs.

Qu'on ne s'y trompe point, c'est au moment où Cissé persistait à jouer sans une sentinelle que son homologue Emerse Faé a sorti le grand jeu. Ce dernier a ainsi osé mettre sur le banc un cadre comme Franck Kessié, vice-capitaine des Éléphants et titulariser les "oubliés" de l'ex-sélectionneur Jean Louis Gasset : Max Alain Gradel, Jean Michel Séri, Serge Aurier et Diakité.

Au milieu de terrain, le trio ivoirien : Séri, Sangaré et Fofana a littéralement occupé la ligne médiane, Gradel et Nicolas Pépé, avec leur pressing très haut, bloquaient du coup les premières relances sénégalaises. Une tactique qui a fonctionné jusqu'au bout.

Résultat des course. Pas de doublé pour le Sénégal et encore moins de seconde étoile d'affilée. La faute à une équipe ivoirienne miraculée, revenue de très loin qui a montré aux Lions de la Téranga, que les huitièmes de finale sont un autre tournoi dans le tournoi. Dans cette élimination si dure à avaler, c'est surtout le niveau tactique d'Aliou Cissé qui est en cause, face à l'intérimaire Emerse Faé qui a pris le dessus.

Le sélectionneur aux dreadlocks s'est à la vérité complètement égaré dans son fameux 3-4-3, teinté d'un énorme déséquilibre. Et il semble même, à y regarder de plus près que Cissé a atteint ses limites, au moment où son contrat n'est pas très loin de s'achever.