NETTALI.COM- Invité du Jury du dimanche, le Professeur Ndiogou Sarr s'est prononcé sur la restauration annoncée du poste de Premier ministre. Une occasion saisie pour demander au chef de l’Etat de nourrir une une culture démocratique.

La restauration du poste de Premier ministre, annoncée par le chef de l’Etat, continue de susciter des réactions. Invité du Jury du dimanche, le Professeur Ndiogou Sarr donne son point de vue. Selon lui, il est difficile d’apprécier une décision du président de la République. Cela amènerait à discuter des prérogatives que la Constitution lui donne. Il pense que dans notre armature institutionnelle, le président de la République occupe une place très importante. Et, d’après la Constitution, il a les pouvoirs de procéder à des modifications ou de revoir l’armature institutionnelle. « En supprimant ce poste, on semblait redéfinir notre régime politique qui passe pour un système présidentiel. Malgré cette suppression, on a continué à garder l’institution gouvernementale dans notre armature institutionnelle. Ce qui pose un problème. S’il n'y a plus de Premier ministre qui doit incarner l’institution gouvernementale, on ne doit plus garder cette institution dans le cadre d’un régime présidentiel », a expliqué le professeur.

A la question de savoir si le chef de l'État a besoin de Premier ministre, M. Sarr rétorque : « Ça dépend ». Il poursuit : « S’il estime que le Premier ministre n’est qu’un collaborateur et nous sommes dans des États où il y’a la subordination de l’institution gouvernementale. Oui le Président peut se passer d’un Premier ministre et aller directement s'occuper de l'action administrative. Lorsqu’on supprimait ce poste je voyais des conséquences au plan politique,  constitutionnel et surtout administratif ».

« Avec le retour du Premier ministre, il ne peut pas y avoir de dualité au sommet de l’Etat »

« Avec le retour du Premier ministre, il ne peut pas y avoir de dualité au sommet de l’Etat contrairement à ce que l’on pense », ajoute-t-il. Sur la procédure à utiliser pour faire revenir la Primature, le professeur indique que dans une démocratie il y a une sorte d'élégance qu’il faut préserver. « Ce n’est pas parce que la constitution vous donne tous les pouvoirs que vous pouvez les utiliser. Il y a l’intelligence de disposer des prérogatives que la Constitution vous donne », a-t-il soutenu. Il pense que, quand on fait une réforme aussi importante qui va avoir un impact institutionnel et même constitutionnel, il va falloir la partager. Parce que, estime-t-il :  « quand les populations ne se retrouvent pas dans ces institutions, les institutions n’auront plus de valeur. Quand le président faisait campagne en 2019, il n’a pas fait état de cette réforme visant à supprimer le poste de Premier ministre. Aujourd’hui également qu’il décide de restaurer ce poste, c’est le même scénario ».

De l’avis du professeur, la Constitution n’est pas le Coran ou la Bible mais sa modification ne doit pas toucher les fondamentaux. « Il faut avoir une culture démocratique et c’est un texte sacré. Et pour garder la sacralité, il ne faut pas donner de temps en temps l’impression qu’on a banalisé la Constitution avec des modifications à outrance », dit-il.