NETTALI.COM - Plus on avance à grand pas vers les locales de janvier 2022, plus on sent les frictions au sein des coalitions. Et jusque même à l’intérieur des partis. Ce qui prouve, comme cela a été toujours été constaté, qu’il sera toujours difficile pour les politiciens de s’entendre lorsqu’il s’agit de positionnement et/ou de partages de postes.

C’est la tendance des coalitions qui semble désormais être la règle pour tous les scrutins au Sénégal et dans beaucoup de contrées du monde. C’est ce qui se donne à lire sous nos cieux depuis l’accession de Me Wade au pouvoir en 2000. Mais il se donne surtout à voir combien les batailles à l’intérieur des partis et coalitions sont âpres. Et c’est le cas depuis les premières heures des formations de coalitions relatives aux locales, notamment avec celle qui avait été annoncée en grande pompe. Elle n’aura finalement pas vu le jour à cause des frictions liées à des questions de couleurs et autres considérations telles que des questions de préséance, d’égo… Il n’en été finalement resté que le parti Pastef, «Taxawu Dakar», le Pur et les entités politiques de Déthié Fall, Boubacar Camara, Babacar Diop et quelques autres micro partis… Bougane Gueye Dany avait claqué la porte après avoir vainement dénoncé certains actes posés. Le Pds finira par créer l’autre coalition, dénommée «Wallu Sénégal» et composée entre autres des partis membres de la coalition «Jotna», ceux du Congrès de la renaissance démocratique (Crd) des Mamadou Lamine Diallo, Abdoul Mbaye, mais aussi d’autres formations comme la Convergence libérale et démocratique «Bokk Gis Gis» de Pape Diop et And-Jëf/Pads de Mamadou Diop Decroix. Thierno Alassane a, lui, préféré faire cavalier seul.

A peine la coalition mise en place qu’une mésentente voit déjà le jour au sein de «Yewwi Askan wi» Et c’est Pastef Dakar qui annonce la suspension de ses activités au sein de la coalition avant de vite rétropédaler pour rentrer dans les rangs, jeudi 21 octobre. Il ne s’agit plus finalement pour le parti d’Ousmane Sonko d’investir ses propres candidats dans les 19 communes de Dakar, mais plutôt des candidats à la candidature de «Yewwi askan wi». Ce qui laisse penser que le problème est loin d’être résolu, mais plutôt reporté, un dénouement ayant eu lieu au niveau des leaders. Une affaire en tout cas à suivre.

Une affaire qui est surtout à suivre, c’est cette âpre lutte que mènent Amadou Ba et Abdoulaye Diouf Sarr. Tous les deux présentés, avec l’aide d’une certaine presse comme les candidats les plus sérieux pour Dakar, côté "Benno Book Yaakaar". C’est le ministre de la Santé qui est ainsi vu comme celui soutenu par les Lébous. Parti représenter le Président Macky Sall à la cérémonie officielle du Gamou des layènes, le ministre de la Santé et de l’Action sociale, par ailleurs maire de Yoff, a décliné ses ambitions de briguer la mairie de Dakar. Il a, dans la foulée, sollicité des prières et le soutien des Layènes. Si ce dernier jouit en effet d’une certaine crédibilité pour avoir remporté la victoire haut la main, à la mairie de Yoff, Amadou Ba n’a encore rien gagné, la mairie de Parcelles, son fief étant entre les mains de Moussa Sy qui est dans une logique de compagnonnage avec Macky Sall. Pourtant, l’ancien ministre des Finances est désigné par ses soutiens comme le patron de Dakar avec notamment en bandoulière la victoire de la majorité à Dakar lors des législatives de 2017.

Une «légitimité» à même de lui permettre de diriger Dakar que ne partage pas Mame Mbaye Niang, ancien ministre de la Jeunesse. A la veille des Législatives de 2017, confiait ce dernier, c’était la ministre Maïmouna Ndoye Seck et lui-même qui avaient révélé à Amadou Ba qu’il était tête de liste de Dakar. Une manière de souligner que l’ancien ministre de l’Economie et des Finances n’avait aucune maitrise sur l’agenda de la majorité dans la capitale. Qui plus est, revendique Mame Mbaye Niang, à l’époque, il était le premier responsable de l’Alliance pour la république (Apr) à oser, avec l’artiste Youssou Ndour, sillonner les rues de Dakar pour battre campagne, alors que Barthelemy Dias avait, selon ses dires, menacé de perturber toute manifestation de Benno Bokk Yakaar. Comme pour faire remarquer que les faucons ne vont pas se retirer sur l’Aventin de sitôt, invité à «Sen Jotaay» sur la Sen Tv, l’ex-ministre de la Jeunesse décrit à l’époque comme un proche de la dynastie «Faye Sall», avait d’ailleurs tiré fort sur le chef de la diplomatie qu’était Amadou Ba. En clair, Niang avait relativisé la portée du mérite attribué à Amadou Ba dans les victoires de la majorité dans la capitale, depuis le référendum de 2016. «Le président Macky Sall n’est pas un homme à subir des pressions. En 2012, il a gagné à Dakar sans eux (Amadou Ba et Mimi Touré, ndlr)», déclara Mame Mbaye. Mieux, rappelait l’invité de la Sen Tv, le ministre des Affaires étrangères de l’époque avait été battu dans son propre bureau de vote aux législatives de 2017. «Aux législatives de 2017, certes il était tête de liste, mais de nombreuses personnalités qui n’étaient pas investies, avaient mouillé le maillot, dont les anciens ministres Pape Abdoulaye Seck et Maïmouna Ndoye Seck. La première dame Marième Faye Sall, Adama Faye, Seydou Gueye, Abdoulaye Diouf Sarr, moi-même qui vous parle. Vous vous rappelez bien, on était restés une semaine à faire du porte-à-porte, parce que Barthélemy Dias menaçait de saboter les meetings de Benno BokkYakaar. J’ai été le premier à relever son défi, lors d’une caravane tenue à Grand-Yoff», avait expliqué Mame Mbaye Niang, tentant ainsi de brûler le «mythe Amadou Ba».

Toutefois, ce qu’il n’a pas surtout été dit, c’est que toutes les victoires de Benno Bokk Yakaar à Dakar avaient été contestées par l’opposition, alors que de sérieux prétendants avaient été écartés de la course. Autant d’accusations en réalité guère fortuites.

A propos du duel Diouf-Sarr Amadou Ba, Cheikh Yérim Seck, le journaliste aux analyses bien souvent déroutantes, a fait savoir à l’émission «Faram Facce» du mercredi 20 octobre qu’aucun des probables candidats, Diouf Sarr comme Amadou Ba, ne peut gagner Dakar sans l’autre. Patron de Dakar ou pas, Amadou Ba reste un personnage malgré tout d’envergure dans les prairies marron-beigne.

Mais il convient de noter qu’il revient au chef de l’Apr la lourde tâche d’arbitrer toutes ces rivalités dont celle qui est considérée comme la plus âpre, est bien celle précitée. Mais il y a aussi ces candidatures isolées qui s’annoncent comme des dissidences. D’ailleurs, même s’il ne jouit pas de la même envergure que Sarr et Ba, Mame Mbaye Niang compte toutefois se lancer dans la course à la mairie de Dakar, sous la bannière de «Sénégal 2035». Il n’entend certes pas, par-là, tourner le dos à Benno Bokk Yakaar, mais compte aller à l’assaut de ceux qui ne se retrouvent pas actuellement dans la coalition au pouvoir, les frustrés et laissés-pour-compte. Il a ainsi déclaré sa candidature et explique qu’il ne s’agit ni d’une défiance, ni d’une bravade envers le président de la coalition Benno Bokk Yakaar.

Beau-frère du chef de l’État, Adama Faye a lui décidé de lancer une nouvelle coalition politique à Grand-Yoff pour briguer la mairie de ladite localité. A en croire le jeune frère de Marième Faye Sall, sa caution est d’ores et déjà déposée à la Caisse de dépôt et de consignation, soient 30 millions pour les communales et les départementales.

Autant dire que gagner à Dakar ne sera pas une promenade de santé car beaucoup trop convives sont en train de s’inviter à la table, surtout côté Benno. Et une fois les candidats désignés, il restera à affronter les candidats des autres coalitions. Loin d’être une mince affaire.

Mais Dakar ne sera pas le seul terrain miné pour le chef de Benno Bokk Yakaar. Il va devoir aussi arbitrer à Rufisque, Keur Massar, Kaolack, Mbacké, Thiès… A Saint-Louis où le beau-frère du président, Mansour Faye est le maire, Mary Teuw Niane sera bel et bien candidat. L’ancien ministre défie ainsi Macky Sall tout en précisant qu’il ne revient à aucune autorité de Dakar de choisir le maire de Saint-Louis. Dans d’autres villes comme Thiès, Kaolack, Louga, ce ne sont pas les affrontements qui manqueront pour Benno Book Yaakaar comme pour l’opposition. L’on apprend par exemple du Journal «La Tribune» du vendredi 22 octobre que « Bokk Gis Gis » de Pape Diop est à un pas de quitter «Wallu Sénégal», pointant du doigt la «gourmandise du parti de Me Wade» qui aurait «un candidat caché». Il en est ainsi là, il en sera question ailleurs.

Soham forclose, Dias prend de l’avance, la confusion s'installe

Barthelemy Dias a-t-il recueilli l’accord de Khalifa Sall avant de déclarer sa candidature au fauteuil de maire de la ville de Dakar ? En tout cas, le patron de « Taxawu Dakar » a tenu à rappeler qu’au sein de sa coalition, aucune option n’est encore retenue. Pendant ce temps, c’est la guerre entre Soham Wardini et Barth. Précieux soutien d’Ousmane Sonko, l’actuel maire de Mermoz-Sacré-Cœur a des ambitions. Et il semble avoir déjà pris une bonne longueur d’avance sur ses concurrents. Mais celle qu’il ne faut sans doute pas oublier, Soham Wardini, candidate à sa propre succession, la mairesse sortante de Dakar, est membre de cette «sous-coalition». Elle était d’ailleurs présente à la cérémonie de lancement de la coalition «Yewwi askan wi». «Elle est membre de l’Alliance des forces de progrès (Afp de Moustapha Niass, ndlr), mais elle n’est plus active dans ce parti», révèle une source proche de « Taxawu Senegaal ». Autrement dit, Soham El Wardini ne peut pas espérer une investiture de la coalition « Benno Bokk Yakaar » à laquelle appartient l’Afp de Moustapha Niasse. Pourtant, celle qui avait remplacé Khalifa Ababacar Sall, au moment de ses déboires judiciaires, espère bien garder son fauteuil à la mairie de Dakar. Seulement, elle n’est pas la seule candidate à la candidature de « Yewwi askan wi ». Pire pour elle, sa candidature a été déclarée forclose par « Yewwi Askan wi » qui n’en a retenu finalement que cinq dont Barthélemy Dias, Abass Fall de Pastef, Aïcha Niang de « Bess du Nakk », Sokhna Maïmouna Dieng du Fprs, Idrissa Diop de Mcss Fulla ak Fayda et Daouda Gueye du Pur.

Une forclusion que Soham El Wardini n’entend nullement laisser passer. Auissi, a t-elle, par le biais de son mandataire, saisi les leaders de "Yewwi askan wi" pour demander l’annulation du Procès-verbal d’investitures. Cheikh Gueye, son mandataire dit d’abord se baser sur la circulaire de "Yewwi askan wi", datée du 12 octobre 2021 et fixant les modalités d’investitures des candidats et des listes aux élections locales du 23 janvier 2022.

Ainsi, considérant que “le dépôt de candidature doit être fait par un parti ou un mouvement membre de Yewwi askan wi“, constatant que “la commission compétente n’a ni délibéré en présence de les membres, ni vérifié la régularité de toutes candidatures”, le mandataire de Soham El Wardini estime que “toute décision précise lors de cette réunion est entachée de fortes irrégularités“. Suffisant alors pour demander l’annulation du Procès-verbal de la réunion du 23 octobre 2021 de la Commission départementale d’investitures de Yewwi askan wi et “la convocation à nouveau dans les règles édictées par la circulaire n⁰01 du 12 octobre 2021“. Une affaire qui a semble-t-il créé un grand malaise et le journal "Vox Populi" du lundi 25 octobre de nous apprendre que le patron de "Taxawu Dakar" fait du forcing pour ressuciter la candidature forclose de Wardini.

Ce qui ne devrait pas faire les affaire de Barth si jamais Khalifa Sall y parvient. Membre de "Taxawu Senegaal" au même titre que Soham El Wardini, Barthélemy Dias veut, lui aussi, devenir maire de Dakar. Et l’actuel maire de Mermoz Sacré-coeur fait tout pour être choisi comme candidat de « Yewwi askan wi ». La preuve : Dias n’est pas candidat à sa succession à la mairie de Mermoz Sacré-coeur. «Seule la ville de Dakar l’intéresse», confie un de ses proches. Barthélemy Dias a, d’ailleurs, pesé de tout son poids pour que Khalifa Sall et Ousmane Sonko de Pastef soient dans la même coalition.

Quid de l’utilité des maires ?

Au-delà de toutes ces batailles de positionnement et des questions de partage de territoires, se pose la question de l’utilité même des maires. On est raisonnablement en droit de se demander la raison d’exister de ces élus, tant leur impact au niveau de la gouvernance de proximité n’est pas visible. Les seules réalisations notables ont été les chantiers de pavage notés avec la gestion de Khalifa Ababacar Sall. Par la suite, les autres chantiers de Khalifa Sall avaient été bloqués et des déboires judiciaires ont suivi. Même l’acte 3 de la décentralisation n’a pas produit de résultats probants. Devenues communes, certaines communautés rurales n’ont pas les moyens de leurs ambitions. Et mêmes les communes qui existent depuis belle lurette, souffrent du même problème. Quelle était alors l’utilité de ses réformes ? Aucune. Sinon que les communes, en plus du manque de moyens, souffrent du phénomène du cumul des mandats qui empêche les maires de s’occuper pleinement de leurs localités. Combien de fois a-t-on entendu parler de député-maire, ministre-maire, etc. ? Imaginez une seconde, un ministre de Finances (ou de l’Intérieur) qui a fort à faire, qui n’a souvent pas le temps de se rendre dans sa localité et qui gagne l’élection dans le Fouta (ou le Djolof), alors qu’il réside à Dakar ? Cela signifie en réalité qu’il ne va gérer sa commune que par procuration. Et les délégations de signatures sont souvent la source de graves dérives.

Si les maires avaient servi à quelque chose, les populations l’auraient su. Les différents états-majors politiques ne parlent plus que d’élections locales. Normal diraient d’aucuns car ils en sont les principaux bénéficiaires. Les mairies des grandes villes telles que Kaolack, Rufisque, Saint-Louis, Pikine, Louga, etc. existent depuis belle lurette, mais qu’est-ce qui y a vraiment changé ? En dehors du bradage du foncier, les maires, dans leur écrasante majorité, ne se font point remarquer à travers des chantiers d’envergure ou projets structurants. Difficile dès lors de comprendre pourquoi les populations s’agitent autant pour des élections dont elles ne verront pas les subsides.

Toujours est-il que les choses s’accélèrent au quotidien en direction des élections territoriales du 23 janvier 2022, une date confirmée par le chef de l’Etat qui a signé cette semaine le décret convoquant le corps électoral. Les autorités étatiques sont en train d’activer tous les leviers nécessaires pour assurer toutes les garanties de transparence du jeu électoral. Au moment où les acteurs politiques, du pouvoir comme de l’opposition, se démènent pour investir leurs candidats aux élections locales dans les communes et départements, le Président Macky Sall vient de signer deux importants décrets. Il s’agit du décret fixant le nombre de conseillers à élire pour chaque Conseil départemental et celui fixant le nombre de conseillers à élire pour chaque Conseil municipal et les répartitions des sièges entre les deux modes de scrutins (proportionnel et majoritaire). S’agissant des élections départementales, c’est la région de Thiès qui vient en tête avec 280 conseillers à élire pour les départements de Mbour (100), Thiès (100) et Tivaouane (80). Elle est suivie de la région de Diourbel qui devra élire 220 conseillers pour les départements de Mbacké (100), Diourbel (60) et Bambey (60). Louga, Kaolack et Saint-Louis occupent la troisième place avec 200 conseillers à élire respectivement pour chaque région. Les régions de Dakar, Fatick et Tambacounda se positionnent à la quatrième place où elles devront chacune avoir 180 conseillers. Les régions de Matam, Ziguinchor et Kolda auront chacune 160 conseillers. Les régions de Sédhiou et Kédogou se placent à la queue du peloton avec chacune 120 conseils dans leurs départements respectifs.

Pour les élections municipales, c’est la région de Dakar qui a le plus grand nombre de conseillers municipaux à élire. Ils sont au nombre de 3 188 conseillers. Thiès se positionne deuxième derrière Dakar avec 2 710 conseillers. Ainsi, suivent, en termes de conseillers municipaux à élire, les régions de Louga (2 580), Tambacounda (2 194), Kaolack (1 984), Fatick (1 962), Diourbel (1 958), Sédhiou (1 946), Kolda (1 886), Saint-Louis.