NETTALI.COM - Le projet de  révision du code pénal et du code de procédure pénale adopté en conseil des ministres, mercredi et introduisant dans la palette des sanctions le port du bracelet électronique, n’emballe pas trop le président de la Ligue sénégalaise des droits humains (Lsdh), Me Assane Dioma Ndiaye.

Selon Me Assane Dioma Ndiaye, c’est vrai que la surveillance électronique pourrait venir en appoint, en cas de perversion du système. «Malheureusement aujourd’hui, l’option de l’Etat du Sénégal, c’est de mettre en avant cette surveillance électronique, sans pour autant agir sur les autres leviers. Pour nous, le processus n’est pas achevé, cette réforme n’obéit pas à une rationalité, d’autant plus que sur le plan de l’opérationnalité, on ne peut pas être très catégorique. D’abord, c’est l’électronique, la télématique et nous savons que quel que soit le niveau de développement de la technologie, on n’est pas à l’abri de failles. Ensuite, on utilise la géolocalisation ou les repérages Gps. C’est vrai que nous avons un système très performant, mais ça suppose des modalités techniques», explique l’avocat.

Il donne l’exemple de la France, là où pour être mis en surveillance électronique, il faut avoir une ligne téléphonique fixe, un domicile fixe et il faut que la personne consente à porter ce bracelet, qui peut être source de stigmatisation. «Nous pensons que nous devons intégrer un certain nombre de facteurs propres à nos réalités, économiques mais aussi socioculturelles. J’ai entendu le ministre de la Justice parler d’une géolocalisation à partir d’un bracelet, avec un code et une puce. C’est certainement comme avec les puces de téléphone. Mais là, même dans les pays développés, on n’utilise pas ce système. Le ministre parle d’une société qui est capable de créer un système de géolocalisation partout à travers le Sénégal, à partir de puces et de codes. Moi, je doute de la faisabilité. Même si tel était le cas, je ne crois pas que cela puisse être une solution envisageable pour l’ensemble des justiciables au Sénégal», soutient le droit-de-l’hommiste.

Et même si la fiabilité était établie,  note-t-il, «ça ne peut pas être une solution absolue, parce que ça repose d’abord sur le consentement de la personne. Il n’est pas évident que beaucoup de Sénégalais soient candidats à cette surveillance électronique. Ensuite, quelle que soit la fiabilité, la technologie peut nous réserver des surprises et surtout qu’il n’est pas évident que dans toutes les contrées du Sénégal, le mécanisme soit opérationnel, surtout si c’est confié à une société privée».

Aussi, fait remarquer Me Assane Dioma Ndiaye, le bracelet électronique ne doit pas nuire à l’administration de la Justice. « Surtout, il faudra une liberté d’appréciation du juge d’application des peines par rapport à certaines infractions. Parce qu’il faudra apprécier le degré de dangerosité de la personne, la sensibilité de la question en cause, parce qu’on peut être dans une affaire de trafic de drogue, de crime de sang ou de viol. Il faudra beaucoup de discernement, pour ne pas désarticuler la société, pour ne pas porter préjudice aux victimes, qui subiraient un traumatisme ou un stress post-traumatique, surtout dans l’hypothèse de se retrouver avec son bourreau dans la rue. Même si ce moyen peut être un facteur de réinsertion sociale. Donc, il y a des avantages et des inconvénients», conclut l’avocat..