NETTALI.COM - Invité hier, mercredi, à l’émission « L’invité de MNF », qui passe sur la 7Tv, Moustapha Cissé Lô a quitté la peau du lion impétueux pour entrer dans celle de l’agneau, donnant l’impression qu’il est, à l’abri des regards, intervenu un réchauffement dans ses relations avec Macky Sall. Il a révélé qu’une mission de bons offices a été conduite par Mbaye Ndiaye, Aymérou Gningue, Abdoulaye Daouda Diallo et l’ancien ministre de la Jeunesse Pape Ndong, qui lui ont rendu visite pour l’amener à de meilleurs sentiments et ôter tout nuage entre le chef de l’Etat et lui.

Jusque-là rien de grave, puisqu’il s’agit d’une cuisine interne de l’Alliance pour la république.

Le hic est que le président du Parlement de la CEDEAO, face à Maïmouna Ndour Faye, déclare, de but en blanc, qu’après les graves accusations qu’il a portées à son encontre, Yakham Mbaye lui a demandé pardon, via un échange téléphonique. « Yakham est mon jeune frère. Il s’est lourdement trompé au sujet des semences, ce n’est pas son domaine, on l’induit en erreur. Je lui ai accordé mon pardon », philosophe El Pisteloro.

Ainsi, la polémique relative au détournement supposé de grosses quantités de semences risque de retomber au gré des combinaisons politiciennes à l’Apr. Cela ne devrait pas être le cas, eu égard à la gravité des faits allégués.

  1. Pour rappel, de la tribune de l’Assemblée nationale, en marge du vote du projet de budget 2020 du ministère de l’Agriculture, le député Cissé Lô avait pointé le système de distribution des semences. Il a demandé également une évaluation des deux dernières campagnes agricoles 2018- 2019 et 2019-2020 et la publication de tous les acteurs impliqués dans la commercialisation, la distribution et les bénéficiaires des produits agricoles subventionnés par l’Etat du Sénégal.  « J’exige l’audit du système de commercialisation et de distribution des produits agricoles, des intrants et du matériel agricole depuis la commercialisation, l’attribution jusqu’à la distribution. Le MAER doit publier la liste de tous les acteurs, les opérateurs semenciers et tous les bénéficiaires des bons de gros producteurs (G.P.) et du matériel agricole subventionné par l’Etat (G.P.) », écrira-t-il, dans une lettre aux Sénégalais, quelques jours plus tard.Dans un entretien avec le site Dakaractu, diffusé le lundi 9 décembre 2019, Yakham Mbaye affirme (documents à l’appui ?) que ce dernier a « bénéficié de l’Etat, cette année, de six marchés d’un volume de 4 531 tonnes de semences et d’engrais. Et c’est au moyen de chantages et de menaces qu’il est parvenu à ses fins ». « Je me ferai un plaisir de vous montrer ces documents avant la fin de nos échanges. D’ici là, permettez que je vous détaille ces 4 531 tonnes.  D’une part, pour son propre compte, Moustapha Cissé Lô a obtenu 4 101 tonnes ainsi composées : 3 000 tonnes d’engrais ; 600 tonnes de semences de niébé ; 500 tonnes de semences d’arachide ; 01 tonne de semences de pastèque.  D’autre part, après ces 4 101 tonnes, il est revenu à la rescousse pour exiger et obtenir deux autres marchés de 430 tonnes qu’il disait devoir réserver à ses protégés. Dans le détail, ce sont 165 tonnes de semences niébé et 265 tonnes d’engrais », soutenait le directeur général du quotidien national Le Soleil.

Ces propos avaient choqué l’opinion, qui s’attendait, dès lors, à l’ouverture d’une enquête pour élucider l’affaire.

Le 15 décembre dernier, en marge d’une rencontre qui s’est tenue à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, Birahim Seck a, de nouveau, interpellé le chef de l’Etat sur les révélations de Yakham Mbaye.  « Voyez-vous le débat auquel on assiste aujourd’hui autour de qui a pris les semences, qui n’a pas pris. Le Forum Civil interpelle de nouveau le président de la République. Il a toutes les données agricoles. Il a la liste des gros producteurs ayant bénéficié de semences pour le mil, le maïs et l’arachide. Ce sont des gens qui ne sont pas des agriculteurs et qui captent une manne financière importante appartenant au peuple sénégalais.  Les flux financiers illicites partent de là. Nous engageons le président de la République à prendre des mesures fortes pour mettre fin à cette pratique », a averti Birahim Seck, qui rencontrait la Fédération des amicales des étudiants de Bignona, pour une sensibilisation sur les flux financiers illicites, en partenariat avec Tax Justice Network Africa.

En définitive, s’il est vrai que Moustapha Cissé Lô et Yakham Mbaye ont fumé le calumet de la paix, la balle est désormais dans le camp de la justice sénégalaise. Sinon, faire passer tout cela par pertes et profits, ce serait établir un précédent malheureux, à l’heure où l’on parle de « gouvernance sobre et vertueuse ».