NETTALI.COM - Les 126 millimètres de pluie du vendredi 5 Août ont prouvé au Sénégal tout entier que ce n’est pas demain la veille de la fin des inondations. En plus de dégâts matériels enregistrés un peu partout à Dakar, les pluies ont fait trois morts.

Selon des informations, une des victimes aurait été pris en otage dans une camionnette sous les eaux de pluie qui ont complètement inondé le tunnel juste à côté du domicile de l'architecte Pierre Goudiaby Atepa.

Une situation bien pire que celle du mercredi 20 juillet, où l'on avait affaire à 84 millimètres de pluie et une route qui s’est affaissée, générant des embouteillages monstres sur le tronçon Yoff-Patte-d'Oie et des inondations à différents endroits de la capitale et sa banlieue. Le spectacle offert ce mercredi-là 20 juillet par Dakar et sa banlieue, est loin d’être glorieux. Il était tout simplement honteux. À Thiaroye-sur-Mer, Sam-Notaire, Ndiarème Limamoulaye, Pikine-Ouest, Pikine-Est, Tivaouane Diacksao, Guinaw-Rails-Sud, Guinaw-Rails- Nord, Wakhinane-Nimzatt, Maristes, Scat Urbam, Liberté 6, VDN, Unité 4 Parcelles Assainies, Keur Massar, Cambérène 2, Avenue Blaise Diagne, etc.  presque aucun quartier n’était épargné. Sur les 22 communes qui composent les départements de Pikine, Guédiawaye et Keur Massar, presque les deux tiers ont été touchés par les pluies diluviennes.

Ce vendredi 5, ce sont des centaines d’automobilistes qui ont été pris au piège des eaux, avec des pannes sèches de carburant et des moteurs endommagés. Ce qui témoigne de l’ampleur des inondations et des embouteillages jamais égalée. Partis à 16 H 30 de leurs bureaux, certains automobilistes ont dû vivre la galère de leur vie. La plupart d’entre eux n’est arrivée à destination qu’autour de  2 heures du matin.

Des automobilistes livrés à eux mêmes, dans une circulation en proie à un désordre indescriptible, marqué par l'anarchie imposée par les Ndiaga Ndiaye, Taxis et "cars rapides", coutumiers des faits qui ne se sont point gênés pour se frayer le chemin à leur guise, avec un mépris total des autres automobilistes et du code de la route. Personne pour réguler la circulation et dégager les véhicules en panne. En mal de patience et dans un désarroi total, ils ont tenté tous les subterfuges possibles, sans toutefois trouver de solutions. Le pire, c'est surtout au niveau de Castors, à hauteur du concessionnaire EMG et aussi du côté de Mariama Niasse où beaucoup ont tenté de s’échapper en vain des eaux, en contournant par les Maristes déjà bien bondés et envahis.  C'était du surplace à tous les étages. Même scénario sur d'autres axes. Des embouteillages monstres ont également été aussi notés sur la VDN, la Corniche Ouest. Le Ter a lui été tout simplement pris d’assaut par les travailleurs espérant rejoindre vite leur domicile.

Entre autres désagréments, il y avait aussi des coupures d’électricité enregistrées dans beaucoup de quartiers avec un  retour seulement au petit matin. Une situation sans doute causée par la montée des eaux.

La conséquence, c’est le Plan national d'organisation des secours ou plus exactement Orsec qui a été déclenché « afin de faire face à cette situation », avec la « mobilisation de tous les services de l'Etat pour porter secours et assistance aux populations sinistrées". Et l’on ne peut manquer de se demander en quoi il consiste réellement et à quoi son déclenchement a vraiment servi !

La pluie, un cadeau du ciel, devenu un enfer. C’est au Sénégal que cela se passe. Ils ne savent pas comment l’apprivoiser et s’en servir, ces Sénégalais ! Pendant ce temps le ministre des infrastructures, des transports terrestres et du désenclavement Mansour Faye, en visite dans des zones inondées, a préféré disserté sur le caractère exceptionnel de ces inondations, nous expliquant que  « les ouvrages sont dimensionnés pour recevoir une quantité d’eau bien définie. Si c’est exceptionnel, naturellement, l’eau mettra un peu plus de temps pour partir." "C’est pourquoi, a t-il poursuivi qu'il faut regarder ce qu’il est possible de faire, du point de vue des ouvrages, pour améliorer le temps d’évacuation de l’eau. D’où la question des exécutoires à revoir, dans le cadre du Programme décennal de lutte contre les inondations, dans sa phase 2023-2033."

Tout se passe comme si les 126 millimètres sont tombés d'un seul coup, alors qu'il a plu pendant une longue durée.

« Partout ailleurs où des ouvrages ont été réalisés, nous avons constaté une nette amélioration. Il va falloir continuer maintenant ces efforts-là, en termes d’ouvrages. Mais ça ne va jamais se régler définitivement. Il faudrait que tout le monde le sache. C’est des ouvrages ; c’est technique. Dans le ciel, c’est le bon Dieu qui tient les vannes et il les ouvre quand il veut en termes de quantité. Cela ne dépend pas de nous, en réalité. Mais ce qu’il y a lieu de faire est d’apporter des solutions d’urgence et durables. L’État est dans cette dynamique-là », tenté de rassurer le ministre, tout en dédouanant l’Etat.

En fait d'amélioration, il sera bien difficile de convaincre les Sénégalais qui ont noté une galère globale, même si certains endroits ne connaissent plus d'inondations.

Beaucoup se demandent d'ailleurs où sont passés les 766 milliards jadis annoncés dans le cadre d’un plan décennal. Bon nombre d’autorités, à l'époque, pour convaincre les Sénégalais de l’effectivité des investissements, n’ont eu de cesse de servir des arguments selon lesquels, les canalisations sont enfouies sous terre et ne se voient dès lors pas. Eh bien, le résultat est. Et il est bien éloquent !

Interpellé sur la question de l’assainissement à « Jury du Dimanche », ce 24 juillet sur I-radio, le docteur en géographie Cheikh Guèye - et par ailleurs responsable de la veille et prospective de l’Initiative prospective agricole et Rurale (Ipar) qui travaille depuis une trentaine d’années sur le lien entre territoires, identités et développement - , pense qu’il y a des progrès qui ont été faits puisqu’ « il existe beaucoup de quartiers où les inondations ont été résorbées », en prenant l’exemple des quartiers Ouest-Foire, Fort B, Dalifort, Médina Gounass, Guinaw rail.

Mais, celui-ci s’était toutefois empressé de préciser : « qu’on va avoir encore des dizaines d’années pour résorber  ce problème de manière définitive ». Avant d’ajouter le fait qu’on ne doive pas « oublier que ? quand on parle d’inondations, ce n’est pas seulement sur Dakar car plus de mille milliards notamment le Plan décennal qui a été lancé en 2012, concernait tout le Sénégal ».

Pour M. Guèye, il y a un problème de communication. Pour preuve, a-t-il expliqué, Jusqu’à l’année dernière quand il y a eu ce Conseil présidentiel, l’État a dit qu’il a investi 511 milliards F CFA. On est loin des 766 milliards d’investissements réels sur le terrain. Cela veut dire que nous avons besoin sans doute de l’équivalent du même plan décennal, deux fois, trois fois avant une amélioration nette de la situation ».

Selon lui, les erreurs commises se retrouvent dans le fait « de ne pas planifier avec des plans d’assainissement clairs, nets et suivis des mises en œuvre. », faisant savoir qu’on a « une multiplication des lotissements dans toutes ces zones jusqu’à Diamniadio sans prendre les mesures préventives. C’est-à-dire sans des satellites pour déterminer au centimètre, les détails des bassins versants pour voir où est-ce qu’on peut faire les lotissements ou pas »

Des inondations qui ne cessent d’ailleurs de dégrader les routes déjà bien entamées. Il suffit pour s'en convaincre, de faire le tour d’un quartier d’affaires comme celui de Keur Gorgui pour se rendre compte à quel point l’environnement est similaire à celui de toutes les autres citées du Sénégal, où les routes ne le sont que de nom. En quoi Keur Gorgui mérite-t-il finalement le statut de quartier d’affaires. Il a juste grandi trop vite en faveur d'une pression immobilière sans précédent. Difficile à croire. En circulant dans Dakar, il devient en effet de plus en plus difficile de voir des routes sans nids de poule, routes déjà bien érodées par les eaux de pluies et détruites par des sociétés prestataires qui ne cessent de les casser les routes pour faire passer des canalisations et des tuyaux, en participant davantage à leur destruction.

A Dakar, ce vendredi 5 Août, le spectacle dans Dakar est tout simplement désolant et pitoyable pour un pays qui a ces dernières années passé son temps à vendre l’émergence sous Macky Sall,  avec de nombreux chantiers à l’appui. Des images de la corniche ouest, où des voitures sont englouties dans les eaux du pont de Soumbédioune sont partagées. Idem pour l’autopont à hauteur du cimetière de Saint-Lazare sur la VDN, devenu impraticable. Castors était complément submergé. Des quartiers de Ouakam, de la Cité Bagdad, les Mamelles, Yoff, l’hôpital Maguilène Senghor, la route du Camp pénal, etc.  Des images d’enfants qui s’adonnent à la nage, ont aussi circulé ; des adultes, pris au piège sans toutefois avoir le choix, les imitent. Des murs de clôtures se sont effondrés. Le chaos du vendredi quoi !.

Le ministre de l’Intérieur Antoine Félix Diome a expliqué que « les ouvrages de drainage des eaux sont dimensionnés par rapport aux prévisions pluviométriques propres à chaque région naturelle. Les spécialistes qui ont conçu le tunnel (tunnel à côté de l’Olympic Club et du domicile de Atepa) avaient travaillé sur la perspective qu’au Sénégal, l’on ne pouvait pas dépasser une pluviométrie journalière de 105 mm. Nous avons enregistré une pluie de 126 mm aujourd’hui. C’est normal, alors que l’évacuation des eaux prend un peu plus de temps que prévu, bien que cela finira par évacuer. ».

Tout cela pour dire que les Sénégalais sont mal barrés et que la pluie devient non seulement un obstacle pour circuler, en plus de désormais représenter un danger pour les automobilistes. Il est hélas bien difficile de prévoir la quantité d’eau qui peut tomber dans les prochaines pluies. On en est même à souhaiter que le bon Dieu limite ses quantités d’eau. Pauvres sénégalais !!!