NETTALI.COM - La loi n° 17/2025 modifiant la loi n° 2012-31 du 31 décembre 2012 portant Code général des impôts, a été votée hier à l’Assemblée nationale. Les opérations de transfert d’argent, les véhicules importés, les jeux de hasard, les alcools et liquides alcoolisés ainsi que le tabac sont concernés.
Dans le but de financer son Plan de Redressement économique et social (PRES), adossé à l’optimisation de la mobilisation des ressources endogènes, le gouvernement sénégalais explore de nouvelles niches fiscales à grandes capacités contributives.
D’où la nouvelle loi sur le Code général des impôts. Les activités concernées par cette réforme fiscale sont les opérations de transfert d’argent, les véhicules importés, les jeux de hasard, les alcools et liquides alcoolisés ainsi que le tabac.
Certains députés ont exprimé leur inquiétude quant à la taxation des opérations de transfert d’argent. Ils ont en effet estimé que cette mesure risque de favoriser un contournement du transfert au profit du cash, avec son lot de conséquences négatives, notamment la baisse du volume des transactions. Cette situation va entraîner ipso facto la baisse du chiffre d’affaires des opérateurs et la part des redevances à verser à l’État, ont-ils ajouté.
La députée Thérèse Faye regrette les taxations sur des produits jugés nécessaires à la vie quotidienne et au bien-être des populations. “L’électricité est devenue chère ; les factures d’eau aussi. En ce qui concerne Canal Plus, la somme de 500 F est ajoutée sur l’abonnement de 5 000 F. Certes, tout le monde doit participer à l’effort de guerre, mais il y a des secteurs plus adaptés.”
Parlant de la taxe sur les transactions, Thierno Alassane Sall a considéré que “les plus pauvres sont touchés”. En effet, des mandataires soulignent que ce sont les milliers de jeunes Sénégalais qui s’activent dans ce secteur qui risquent de payer le plus lourd tribut d’une telle mesure. Ainsi, ils ont préconisé la suppression de la taxe sur les paiements marchands.
Dans le même ordre d’idées, certains commissaires ont interpellé le ministre sur les raisons justificatives de cette décision consistant à taxer le volume des transactions, alors que les opérateurs avaient proposé qu’on taxe leurs chiffres d’affaires à hauteur de 2,5 %. En outre, il a été demandé au ministre si les opérations entre les banques et les opérateurs sont exonérées de cette taxe sur les transferts d’argent. D’autres députés se sont préoccupés de la non-taxation de certains produits importés circulant sur le marché parallèle.
La taxation sur les jeux de hasard, mesure salutaire
Bon nombre de députés ont encouragé le gouvernement par rapport aux stratégies qui sont en train d’être élaborées et mises en oeuvre afin de redresser l’économie du pays. Mama Lamine Diaité déclare : “Nous avons appelé au patriotisme. Aujourd’hui, nous avons trouvé un pays au 10ᵉ sous-sol. Nous avons besoin d’argent pour investir. Donc, il faut que l’État essaye de capitaliser ses ressources souveraines.” Lui et ses camarades relèvent la nécessité d’un effort collectif pour atteindre les résultats escomptés.
Presque tous les députés se sont réjouis de la taxe sur les jeux de hasard, le tabac et les boissons alcoolisées. En fait, ils ont considéré qu’au-delà des recettes générées, une telle mesure est un véritable acte de salubrité sociale au regard des effets pervers de ces pratiques sur une bonne frange de la jeunesse du pays. “Nous remarquons depuis deux ans, surtout au niveau des lycées, que les enfants consacrent tout leur temps à ces jeux de hasard”, a regretté le député Mame Diarra Beye, saluant la taxation.
Télécommunication
“L’État veut chercher des ressources budgétaires supplémentaires dans le secteur des télécommunications qui est un secteur de forte rentabilité. Je suis de ceux qui pensent qu’on peut même viser 200 milliards voire 500 milliards F. Mais je voudrais attirer l’attention sur une chose : il faut éviter de surtaxer le consommateur final”, a d’emblée déclaré le député et maire de Mbao, Abdou Karim Sall.
Mais en poursuivant, il souligne que surtaxer le consommateur final risque d’entraîner des équilibres qu’il faut respecter. Il renseigne que le secteur des télécommunications a besoin de trois équilibres. À l’en croire, si ces équilibres sont rompus, le secteur va en pâtir. “Premier équilibre : il faut que les opérateurs gagnent de l’argent pour pouvoir réinvestir. Deuxième équilibre : il faut que l’État gagne de l’argent sur les revenus engrangés par les opérateurs. Troisième équilibre : il faut que les consommateurs paient le juste prix”, a expliqué le député.
“Il faut que les tarifs soient orientés aux coûts. Si on ne respecte pas ces équilibres, c’est le secteur qui va prendre un coup, monsieur le ministre”, a-t-il ajouté.
Il est convaincu que toute taxe qui touche la poche du client final peut être extrêmement difficile. Ainsi, il a aussi parlé de la loi sur la Rutel. “Je continue sur la loi en taxant le mobile money. C’est une excellente chose. Mais je pense qu’il faut aller dans le sens de voir s’il y a une possibilité de taxer les opérateurs en laissant intact le consommateur final”, a dit le député. Parce que, souligne Abdou Karim Sall, c’est l’inclusion financière qui risque de prendre un coup. Pour lui, “éviter la surtaxe sur le consommateur est doublement bénéfique dans le contexte actuel”.
Poursuivant, il a parlé de la taxe de régulation. “Vous m’avez dit que la taxe de régulation a été supprimée. Monsieur le ministre, la taxe de régulation n’a pas été supprimée…” Il demande au ministre de passer par des mécanismes tels qu’une loi de finances s’il veut la supprimer. En ce qui concerne la difficulté de recouvrer la TVA sur les terminaux, M. Sall estime avoir une piste. Pour lui, si l’on passe par les commerçants directement, “on va vivre la même situation qu’auparavant”. Il faut instituer un droit d’accès récolté par les opérateurs, selon lui.
Transfert d’argent
Revenant sur la fiscalité proposée pour le système de transfert d’argent, le ministre des Finances et du Budget, Cheikh Diba, a d’abord parlé de “la faiblesse de la contribution fiscale du grand opérateur en la matière. Depuis qu’il opère, ce dernier ne paie pas l’impôt sur les sociétés et n’a contribué qu’à hauteur de 20 000 000 FCFA au titre de l’impôt minimum forfaitaire”, a-t-il déclaré.
L’impôt doit, selon le ministre, répondre aux principes d’équité et de justice. Il précise que certaines activités restent exonérées alors que le taux supérieur est fixé à 0,5 % au moment où, ailleurs, on est à des taux de 2 % voire 1,5 %.
Par rapport aux risques de retour vers le cash avec l’application de la nouvelle imposition, le ministre dira que celle-ci tend plutôt à diminuer le montant qui était payé.
Sur la proposition tendant à taxer le chiffre d’affaires des prestataires, “le ministre fera noter que l’adoption de celle-ci permettrait d’avoir environ 5 250 000 000 FCFA. Ce qui est très loin des objectifs fixés par la nouvelle formule”. Toutefois, il reste ouvert pour des échanges avec les opérateurs sur toute nouvelle proposition.
Concernant les transferts des comptes bancaires aux comptes mobile money, ils restent exonérés. Les transferts de moins de 20 000 FCFA ne sont pas concernés par cette nouvelle taxation. Sur la taxe de régulation de 1,5 %, il a indiqué que celle-ci avait déjà été supprimée par une nouvelle loi.
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