NETTALI.COM - Après avoir mis fin à plusieurs programmes d’aide, Trump vend aux Africains sa nouvelle vision basée sur le partenariat et non sur l’assistanat.
C’ est une rencontre qui ne laisse pas indifférent au Sénégal et en Afrique. Cinq chefs d’État dont Bassirou Diomaye Faye étaient, mercredi 9 juillet, à la Maison blanche, à l’invitation du Président Donald Trump.
Comme annoncé par les services diplomatiques américains depuis le début, la question commerciale était au coeur des échanges. Selon le président Trump, les pays africains offrent “d’incroyables opportunités commerciales qui conduiront à une prospérité mutuelle”. Son approche, rapportait l’ambassade des États-Unis au Sénégal, “est axée sur le partenariat par le biais du commerce et de l’engagement du secteur privé”.
L’administration Trump confirme ainsi ce que tout le monde lui connaissait déjà. Ce qui les intéresse en premier, c’est le business en mettant en avant les intérêts des États- Unis. Moins d’aide; plus de commerce et d’investissement; le tout pour une prospérité mutuelle, a tenté de développer Donald Trump lors des échanges. L’Amérique n’avance plus masquée sur ce plan.
Plus d’investissement et de commerce, moins d’assistanat
En prélude à cette rencontre, le secrétaire d'État Marco Rubio avait déclaré que “les États-Unis abandonnent le modèle d'aide étrangère basé sur la charité”. Ils favorisent désormais les nations qui démontrent “à la fois la capacité et la volonté de s'aider elles-mêmes”. Dans le même esprit, Troy Fitrel, haut responsable du Bureau des affaires africaines soutenait que, désormais, “les envoyés américains en Afrique seront évalués en fonction des accords commerciaux conclus”. Hier mercredi, cette question commerciale et économique était donc au coeur des échanges à Washington. Et sous ce registre, il est beaucoup question de l’exploitation des ressources naturelles, en particulier des minéraux critiques qui, au-delà de la question commerciale, revêt un enjeu géostratégique majeur.
Triés sur le volet, les pays conviés sont tous réputés très riches en ressources naturelles (pétrole, or, bauxite, terres rares…). Ils sont surtout francophones - à l’exception du Libéria et dans une moindre mesure de la Guinée Bissau dont le Président qui parle français est aussi proche de la France- et se situent dans des zones où la Russie ne cesse de gagner en influence. Washington veut-il parer à un basculement de ces pays dans le giron de la Russie ou de la Chine ?
Face au recul de la France et à la percée russo-chinoise, Washington se positionne aussi pour limiter les pertes
A lire cette contribution du spécialiste Aly Fary Ndiaye, on serait tenté de le croire. Le Président américain ne cracherait pas sur une opportunité de “récupérer les pays francophones ayant des ressources pétrolières, minières et gazières qui sont traditionnellement dans le pré-carré français et qui sont aujourd'hui en froid avec la France et/ ou qui n'ont pas encore basculé dans les bras de la Russie ou de la Chine”.
C’est ainsi qu’il faudrait alors comprendre l’intérêt pour les pays comme le Sénégal, la Mauritanie, le Gabon, la Guinée Bissau - qui n’est pas francophone mais dont le président est proche de Macron- à côté des alliés traditionnels comme le Liberia, le Kenya, le Ghana etc… L’objectif est double : d’une part mettre la main sur les ressources desdits pays, d’autre part barrer la route à la Chine et à la Russie. Cela est d’autant plus vital qu’il revêt également un enjeu sécuritaire important.
Rappelant le rôle important de la National Security Council (Conseil à la sécurité intérieure) dans la définition de la Politique étrangère, le professeur Aly Fary Ndiaye relève l’attention particulière que cette entité accorde à l’Afrique dans la lutte contre la menace terroriste. “Ces membres de la NSC pensent que le seul intérêt de l’Amérique en Afrique réside dans sa capacité de contenir les groupes terroristes, afin que le continent serve uniquement de rempart pour bloquer en métaphase des groupes djihadistes avant qu’ils ne touchent des intérêts américains”, ajoute le spécialiste.
La sécurité, la migration : des enjeux majeurs peu évoqués en public
S’il y a eu beaucoup d’annonces autour des ressources et du commerce, il y en a eu très peu sur les questions sécuritaire et migratoire. Des sujets brulants qui tiennent également à coeur Washington. Pour la question migratoire, il faut noter qu’elle intéresse aussi bien le Président des États-Unis que ses homologues africains, vu le nombre important de migrants africains aux États-Unis.
A ce propos, Aly Fary avait rappelé la vision du Président américain qui s’accommoderait mal avec les flux africains. “Trump croit à la suprématie blanche et veut empêcher ce que Pat Buchanan a théorisé dans son livre “the death of the west.” C’est à dire la mort des valeurs occidentales face à l’émigration massive des non Blancs en Amérique qui, dans les projections de Buchanan, ferait de la WASP (White Anglo Saxons Protestant) une composante minoritaire aux USA à l’horizon 2050, si la vague de migrants des étrangers venant de la frontière Sud n'est pas réduite.”
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