NETTALI.COM - Les candidats, ont-ils été surpris par la rapidité avec laquelle la date de l'élection s'est dénouée ? En tout cas, en plus, du ramadan, du carême et de l’effet surprise, ils sont confrontés au défi des moyens et du temps, pour aller à la rencontre des électeurs, partout sur le territoire, dans les 44 départements. Une situation qui se révèle finalement comme un véritable casse-tête.

La date de l’élection est ainsi fixée. La société civile se félicite. Certains politiques continuent la polémique autour du délai prévu pour la campagne électorale. Chez les candidats, certains semblent avoir été pris de court par les derniers développements. C’est comme si, tout en exigeant l’organisation de l’élection avant le 2 avril, les gens n’avaient rien fait pour être prêts en conséquence.

Jusque-là, ça ne bouge presque nulle part. À quelques heures de la campagne, tous ceux que nous avons contactés pour avoir leur agenda, même pour avoir la date et le lieu du meeting de lancement, ont été incapables de le communiquer. Certains étaient encore là hier à se quereller entre le 24 (date du président) et le 31 mars (date du Conseil constitutionnel). Comme s’ils voulaient encore jouer les prolongations de la crise.

Pour Habib Sy, la nouvelle date viole le délai prévu pour la campagne électorale, parce qu’elle ne serait pas en conformité avec la loi électorale. "Le Code électoral dit que la campagne doit se dérouler sur un délai de 21 jours. Or, si on retient le 24, nous aurons 17 jours. C’est pourquoi le Conseil constitutionnel a fixé l’élection le 31 mars. Je vais me concerter avec les autres candidats pour saisir à nouveau le Conseil constitutionnel. Il faut que cesse ce dilatoire", réagissait-il sur la TFM. Malheureusement pour lui, dans la journée, le Conseil constitutionnel publiera un communiqué pour s’aligner sur la date du président. Chez le candidat Thierno Alassane Sall, le ton était presque le même.

Pendant ce temps, Déthié Fall, lui, se dit fin prêt. "Cela ne me dérange pas que l’on organise l’élection le 24 mars, toujours dans l’esprit de sacrifice pour la démocratie, dans l’esprit de sacrifice pour la République, dans l’esprit de sacrifice pour l’image du Sénégal. Cela ne me pose donc pas problème qu’on le fasse le 24 ou le 31 mars", a-t-il déclaré, hier, lors d’un point de presse.

"Dès ce dimanche, a-t-il renchéri, la coalition sera sur le terrain, en campagne, partout au Sénégal. Nous demandons à tout le monde d’accompagner cette caravane de la vérité, cette caravane de la constance, cette caravane des principes qui veut leur offrir un Sénégal totalement différent".

Pour le moment, on n’a pas encore son agenda pour la campagne.

Ainsi, à moins de 20 jours du scrutin, il n’y a aucune lisibilité dans l’agenda des candidats. À l’effet surprise des uns de certains grands, il faudrait ajouter les contraintes de temps pour les moins expérimentés, celles financières pour les petits candidats qui avaient déjà dépensé de l’argent en perspective de la Présidentielle du 25 février 2024.

Du côté des coalitions BBY et Diomaye Président, le problème est moins l’argent. C’est surtout la surprise. "Normalement, le samedi, tout devrait être fin prêt. Nous essayons même de voir comment faire la présentation du pro- gramme ce jour. Il faut rappeler que nous étions déjà prêts avant que l’élection ne soit annulée", confie un responsable du parti dissous d’Ousmane Sonko.

Pour Amadou Ba, candidat de la majorité présidentielle, tout semble fin prêt. L’agenda pourrait être disponible dès demain.

Pour la plupart des candidats, il risque d’être difficile d’aller dans le Sénégal des profondeurs pour parler aux électeurs en seulement 15 jours. Il s’agira de faire 14 régions, pour 44 départements. Il faudra une très bonne organisation pour toucher le maximum de Sénégalais. Même avec tous les moyens du monde.

La présence dans les bureaux de vote : cet autre enjeu

Par ailleurs, une élection crédible, c’est aussi une bonne participation des candidats qui concourent à l’expression des suffrages, qui sont chargés de contrôler la régularité du vote dans chaque bureau de vote. À ce jour, combien sont-ils les candidats qui ont déjà une bonne lecture de la carte électorale et qui pourraient avoir des représentants dans chaque bureau de vote ? En dehors de Benno Bokk Yaakaar, de Pastef, de Rewmi et du Pur, difficile de citer beaucoup de partis. Même pour les partis susnommés, il faudrait toute une machine pour pouvoir se déployer correcte- ment. Ce qui est loin d’être gagné d’avance.

Pour Déthié Fall, la priorité semble être la nomination d’un ministre de l’Intérieur non partisan. "On veut un ministre de l’Intérieur neutre, indépendant et consensuel pour organiser cette élection. Nous appelons tous les Sénégalais à la vigilance dans les bureaux de vote, sur le terrain, pour que les Sénégalais puissent s’exprimer librement. Qu’on ne nous nomme pas un ministre de l’Intérieur partisan. Il faut éviter de plonger le Sénégal dans une autre crise plus grave", a-t-il mis en garde.

Dans de telles conditions, il est hypothétique de rêver d’une élection avec un débat d’idées de haut niveau. Sans même parler du carême et du ramadan qui viennent rendre la tâche encore plus compliquée. Lors d’une table ronde organisée rapidement, Gilles Yabi invitait les différents acteurs à mettre en avant le débat d’idées, dans le cadre de cette phase de campagne, pour permettre aux électeurs de faire un choix éclairé. Aux médias, il appelait à privilégier ces types d’échanges sur les priorités véritables aux invectives. "Nous essayons d’apporter notre contribution. En espérant que les messages des chercheurs vont être relayés par les médias. Qu’ils puissent inspirer des candidats, pour le bien de nos populations", se réjouit Gilles Yabi.

Nettali avec EnQuête