NETTALI.COM - Élection inclusive, démission du président le 2 avril pour se conformer aux dispositions constitutionnelles, suppression du parrainage, révision de la loi sur la nationalité exclusive, mise en place d’une Cour constitutionnel, disponibilité du fichier électoral... Tels pourraient être les termes de référence d’un dialogue devenu inéluctable, pour ne pas précipiter le pays dans le précipice.

Depuis l’annonce du report de la date du scrutin, les pressions se multiplient sur le président de la République Macky Sall. Comme s’ils s’étaient passé le mot, les États-Unis et l’Union européenne ont publié, mercredi 7 février, des communiqués pour réclamer le respect du calendrier électoral et dénoncer ce qu’ils considèrent comme une "violation" des dispositions constitutionnelles. Le président Sall s’isole ainsi de plus en plus sur la scène internationale. Il est acculé de toutes parts. Malgré ses tentatives de rassurer et de donner des gages sur sa bonne foi.

Ira-t-il jusqu’au bout de sa logique, c’est-à-dire garder le pouvoir jusqu’au 15 décembre 2024, comme le prévoit la révision constitutionnelle votée par l’Assemblée nationale, sous réserve de sa validation par le Conseil constitutionnel ? Le dialogue auquel il appelle les acteurs pourrait- il permettre de trouver une voie médiane pour une "transition" apaisée ?

Dans sa dernière adresse à la Nation, le chef de l’État disait : "J’engagerai un dialogue national ouvert, afin de réunir les conditions d’une élection libre, transparente et inclusive, dans un Sénégal apaisé et réconcilié."

Mercredi, en Conseil des ministres, le président Sall a réaffirmé son vœu d’organiser des élections inclusives. Selon le communiqué de la réunion hebdomadaire du gouvernement, le chef de l’État "a réitéré sa détermination à poursuivre le dialogue avec tous les acteurs politiques et les forces vives de la Nation, en vue de renforcer, d’une part, notre démocratie à travers un processus électoral transparent, libre et inclusif et, d’autre part, la crédibilité de nos institutions".

Qui pour participer au dialogue ?

Comme pour donner des gages à la classe politique qui ne semble plus lui faire confiance, Macky Sall engage son gouvernement "à mettre en œuvre les voies et moyens pour un processus pragmatique d’apaisement et de réconciliation pour préserver la paix et consolider la stabilité de la Nation". Il a aussi demandé à son gouvernement et au ministre de la Justice en particulier "de prendre les dispositions nécessaires pour matérialiser sa volonté de pacifier l’espace public dans la perspective du dialogue national et de l’organisation de la prochaine élection présidentielle”.

Cette déclaration intervient quelques jours après son audience avec les candidats recalés, à qui il promettait de prendre des dispositions pour faire libérer toutes les personnes arrêtées lors des événements politiques.

Déjà, les interrogations vont bon train. Les doutes persistent sur la volonté du président d’apaiser le climat politique et d’organiser des élections véritablement transparentes et inclusives. Les plus optimistes espèrent que le dialogue pourrait permettre de réaliser tous les miracles. Comme il avait permis de ramener Karim Wade et Khalifa Sall dans le jeu politique (avant qu’un élément extérieur ne vienne perturber les plans), il pourrait aussi permettre de ramener Sonko ou, au pire des cas, maintenir Diomaye dans la course à la Présidentielle.

En effet, il sera difficile pour le président, visiblement soucieux de l’image qu’il va laisser à la postérité, d’écarter tous les candidats de l’ex- Pastef et de ramener Karim Wade. Ce sera l’une des questions majeures sur lesquelles les acteurs seront attendus, dans le cadre de ce nouveau dialogue qui se dessine, adoubé par le pouvoir et par son nouvel allié le Parti démocratique sénégalais.

La grande inconnue, c’est la participation de l’ex-parti Pastef à ce nouveau dialogue. L’histoire récente a en tout cas confirmé que la politique de la chaise vide paie rarement en politique. Aussi, il est presque certain que le nouveau dialogue risque d’avoir bien plus de participants que le précédent.

Il pourrait, en effet, enregistrer, outre Taxawu, PDS et Rewmi qui ont toujours dialogué, d’autres participants issus du groupe Yewwi Askan Wi.

La durée de la transition pourrait également être inscrite sur la table

Outre le caractère inclusif de la Présidentielle, les acteurs vont certainement inscrire sur la table des négociations les questions relatives à la nationalité inclusive, au Conseil constitutionnel, au parrainage, mais aussi de ce qu’il est convenu d’appeler la durée de transition. Macky Sall acceptera-t- il de renoncer au pouvoir le 2 avril, comme l’y invitent une bonne partie tde la classe politique et de la société civile ?

La question est en tout cas au cœur du débat public. Cela permet- trait au président de sauver les apparences et de tenter de convaincre que son ambition n’a jamais été de se maintenir au pouvoir. Il lui suffirait de démissionner le 2 avril comme certains le préconisent.

Au cas échéant, l’élection devra se tenir au mois de juillet et non au mois de décembre, conformément à l’article 31 alinéa 2 de la Constitution. Laquelle dispose : "Si la présidence est vacante, par démission, empêchement définitif ou décès, le scrutin aura lieu dans les soixante jours au moins et quatre-vingt-dix jours au plus, après la constatation de la vacance par le Conseil constitutionnel."

En ces articles 39 et suivants, la Constitution fixe les règles applicables, en cas de vacance du pouvoir, notamment par démission du prési- dent de la République. Aux termes de l’article 39, "en cas de démission, d’empêchement ou de décès, le président de la République est suppléé par le président de l’Assemblée nationale. Au cas où celui-ci serait lui-même dans l’un des cas ci-des- sus, la suppléance est assurée par l’un des vice-présidents de l’Assemblée nationale dans l’ordre de préséance".

Il résulte de l’article 41 alinéa 1er, que "la démission, l’empêchement ou le décès du président de la République sont constatés par le Conseil constitutionnel saisi par le président de la République en cas de démission, par l’autorité appelée à le suppléer en cas d’empêchement ou de décès".