NETTALI.COM- Le ministre de la Justice a, devant le Jury du dimanche, apporté des éclairages sur la loi d’amnistie qui sera soumise prochainement aux députés de la 14e législature. A Karim Wade qui réclame une révision de son procès, il lui a rappelé que cette révision pourrait lui être fatale.

Le Garde des Sceaux, ministre sénégalais de la Justice, Ismaïla Madior Fall, était, ce jour, l’invité du Jury du dimanche sur Iradio. Il est revenu de long en large sur la loi d’amnistie et sur la révision du procès réclamée par Karim Wade.

Par rapport au premier point, il a rappelé que c’est le chef de l’Etat qui avait initié le dialogue national. Et le dialogue national ne portait pas que sur des questions électorales. Mieux, ce dialogue national avait formulé des recommandations pour que certains hommes politiques qui ont perdu leur droit à être éligible ou d’être électeur puissent les retrouver. « Le Président Macky Sall a voulu donner suite à ces recommandations. Ce n’est pas tombé du ciel. C’est une suite logique. Il l’a fait maintenant parce que nous sortons des élections, la clameur est passée. Le contexte est beaucoup plus ou moins favorable à la conciliation, aux retrouvailles, à la réconciliation, à la clémence, au pardon », a expliqué Ismaïla Madior Fall, ajoutant que le président de la République, de par son statut constitutionnel, peut prendre l’initiative d’impulser le pardon soit par la voie de la grâce ou alors par l’amnistie.

« Il m’a demandé d’initier toutes les mesures pouvant permettre à ceux-là qui avaient perdu leurs droits civiques de les retrouver. L’amnistie est l’une des modalités. Vous savez que l’animiste éteint l’action publique, efface les infractions commises aussi bien les peines que les amendes. L’amnistie c’est une clémence, un pardon qui réhabilite la personne qui est poursuivie. L’autre modalité c’est de passer par le code électoral, c’est-à-dire de modifier ce code pour permettre à ces personnes de s’inscrire sur les listes électorales pour retrouver leur éligibilité », a renseigné le ministre. Avant d’indiquer : « Toutes les propositions seront soumises au président de la République et il lui appartiendra de choisir la voie la plus appropriée pour permettre à ces gens-là de recouvrer leurs droits ».

Une révision du procès peut aussi aggraver la situation

Pour ce qui est de la révision du procès de Karim Wade, il admet que la révision d’un procès est dans l’absolue possible, mais, rappelle-t-il « c’est une voie de droit exceptionnel ». Etayant ses propos, il signale qu’il faut que certaines conditions soient réunies pour qu’il ait révision de procès. Il faut des éléments nouveaux qui montrent qu’il y’a eu des erreurs dans le premier procès. Et cela, c’est à l’initiative du Garde des sceaux, de la partie intéressée ou des ayant droits. « Objectivement, je n’ai pas à ma disposition des éléments qui permettent d’envisager une révision. Concernant Karim, le délit d’enrichissement illicite a été confirmé par toutes les juridictions. Ce sont des décisions revêtues de l’autorité de la chose jugée qu’aucun organisme, fût-il international, ne pourrait enlever. Ça, c’est évident et au moment où nous parlons il n y’a pas d’éléments objectifs qui permettent d’envisager une révision du procès », a précisé le ministre.

Ensuite, poursuit-il : « une révision du procès peut aussi aggraver la situation. Parce qu’on peut aller dans le sens de la révision d’un procès et que la condamnation soit beaucoup plus sévère et qu’il y ait des éléments nouveaux qui renforcent les incriminations et qui peuvent faire en sorte que la personne soit à nouveau condamnée. Donc, la révision ne garantit rien. C’est un autre procès qui s’ouvre et c’est aléatoire ». A son avis, une révision du procès n’a jamais eu lieu dans l’histoire politique, institutionnelle, judiciaire du Sénégal.

Pour le Garde des Sceaux, les voies qui s’imposent et qui lui paraissent possibles d’envisager c’est la modification du code électoral. « Les personnes concernées peuvent contester, mais que dit le système judiciaire ? Le système judiciaire dit qu’ils sont coupables. S’ils continuent à contester, je n’y peux rien. Ce sont des juges qui ont dit qu’ils sont coupables. Pour moi, c’est la meilleure voie sans qu’on puisse nous reprocher d’absoudre le délit de détournement de deniers publics ou d’enrichissement illicite. Il y’a aussi la voie de l’amnistie qui est envisageable et qui n’est pas une première».

Interpellé sur le cas de Khalifa Sall qui dit qu’il n’est pas demandeur, Ismaïla Madior Fall de rétorquer : « je n’ai jamais vu dans l’histoire du Sénégal quelqu’un demander une amnistie. Pourtant, il y’a plusieurs lois d’amnistie. Mamadou Dia et les autres n’ont jamais été demandeurs. L’amnistie est une loi générale et impersonnelle ».