NETTALI.COM - Quelle magie que celle qu’opère le football sous nos cieux ! Il a, eh bien, cette capacité à réunir en un temps record, les adversaires politiques les plus farouches et les plus radicaux. Comme qui dirait, réussir à allier l’eau et le feu. Le jour et la nuit ! Bref, des adversaires qui, il n’y a guère longtemps, se lançaient des piques, suite à des résultats de locales si âprement discutées, ont été le temps d'un sacre, tout sucre, tout miel ! Mais, de la polémique, il y en a eue. Encore des histoires d'argent.

Après les locales, l’on avait par exemple vu et entendu sur tous les plateaux-télés et les chaînes de radios, dans des discours préparés à l’avance et convenus, les partisans du président Macky Sall débiter des chiffres et faire une arithmétique, tels à l’école primaire pour tenter de prouver qu’ils auraient de toute façon gagné dans le cadre d’une présidentielle et même de législatives, en ayant raflé la majorité des communes. L’autre argument le plus tiré par les cheveux, aura été de réfuter des défaites, là où la coalition au pouvoir n’avait jamais gagné auparavant ! Bref de quoi rigoler à mort.

Dans l’autre camp, celle de l’opposition, l’heure était au décompte, fondé sur le gain des villes les plus significatives, notamment Dakar, Thiès, Diourbel, Ziguinchor, Kaolack, Touba, etc. pour ne citer que celles-là, question de mettre en avant l’argument du poids et du symbole. Qui ne rêverait pas de gagner toutes ces grandes villes ?

Bref, une affaire finalement de politiciens qui essaient de toujours tirer la couverture sur eux et de faire dire aux chiffres ce qu’ils ne disent forcément pas. Mais la vérité au fond, est que la coalition au pouvoir aurait bien aimé gagner toutes ces villes qu’elle n’a jamais réussies à mettre dans sa besace. Sauf Yoff, Guédiawaye, etc qui y étaient déjà. La mémoire joue parfois des tours.

D’ailleurs, dans bien des localités, l’atmosphère était restée tendue, avec des recours à n’en plus finir, des manipulations de résultats venant de toutes parts. De médias notamment avec de prétendues victoires qui, au fond, cachaient de cuisantes défaites.

Mais depuis la victoire des «Lions» du foot face à l’Egypte et cette invitation au palais, plus un mot. Même l’installation des nouveaux maires est éclipsée. Place à l’union des cœurs, à l’élan patriotique et à la communion. Le Sénégal est un et indivisible. Comme aiment à dire ces «Tchatcheurs» de Sénégalais lorsqu’ils cherchent à faire revenir leurs concitoyens à la raison, n’oubliant jamais au passage d’évoquer «le pays de Serigne Touba, El Hadji Malick, Mame Limamoulaye, Baye Niasse, etc.» Qu’ils les laissent surtout tranquilles ces saints, ils n’ont jamais tenté de leur ressembler !

Bref, tels des caméléons, les voilà à nouveau réunis dans le salon de Léopold Sédar Senghor ! Macky Sall est en plein conciliabule avec Idrissa Seck et Déthié Fall. Le deuxième tient la main de son ancien camarade pour ne pas dire son «boy» et parle de lui à Macky Sall, dans une gestuelle qui frise les conseils du mentor à l’ancien lieutenant, avec un souci d’approbation du Président. Nos antennes rapportent que sur un air taquin, le chef de l’Etat s’est plaint des «pierres» que lui lance l’ancien numéro deux de Rewmi devenu opposant et mandataire national de « Yewwi askan wi ». «Je ne lui ai pas appris à lancer des pierres», aurait plaisanté Idrissa Seck. Et Déthié Fall de répondre dans un large sourire : «xeer yi menul ñak». Une manière de dire que la critique (les pierres) fait partie du jeu. En Côte d’Ivoire, Idrissa Seck aurait dit : «C’est mon petit, mais il déconne». Ils sont marrant nos cousins.

Idrissa Seck n'a en tout cas plus le vent en poupe et à l’heure de la prise de cette cité imprenable qu’a toujours été Thiès, il devient bien difficile pour lui de compter aux yeux de Macky Sall, le roi de l’arithmétique qui ne mesure le poids des hommes qu’à l’aune des chiffres et du poids politique.

Ils doivent d’ailleurs bien souffrir ces ministres et patrons de sociétés nationales qui ont perdu dans leurs fiefs. Eux qui attendent toujours de savoir de quoi il va advenir de leurs postes. L’attente est si longue, malgré cette accalmie de la Coupe d’Afrique. Ils espèrent sans doute que leur salut vienne de cette apothéose et d’une distraction de Macky Sall créée par cet évènement qui le rend si heureux et qui lui permet de retrouver dans les salons du palais, cette opposition si virulente et pléthorique qui l’empêche de dormir.

A voir Macky Sall, Khalifa Sall tout sucre et miel avec à ses côtés, Aïssata Tall Sall, il y a de quoi se poser des questions sur les talents des politiciens qui sont les seuls à pouvoir cacher leurs rancœurs froidement enfouis dans leur poitrine gauche, au moment où ils se sourient et se tiennent affectueusement la main. Khalifa Sall avait les mains sur l’ épaule de sa "sœur" Aïssata Tall Sall ! Il y a de quoi les admirer. Peut-être que se jetaient les bases d’une recomposition socialiste, puisque depuis le décès d’Ousmane Tanor Dieng, le Parti socialiste n’est plus que l’ombre de lui-même. Surtout qu’avec ces locales, Khalifa Sall, via « Yewwi askan wi » et Barthélémy Dias, a montré qu’il est resté populaire. Le maître de Dakar. Une sorte d’injustice réparée par les populations de Dakar. Il a en effet reconquis 15 communes sur 19, malgré 4 qui lui ont échappé et atterri dans la besace de deux parmi ses anciens membres de « Taxawu Dakar », Jean Baptiste Diouf et Alioune Ndoye. Le reste, Gorée et Cambérène, est allé respectivement chez Augustin Senghor et Doune Pathé Ndoye.

Barthélémy Dias, l’ami de Gaston Mbengue, était aussi à l’accueil des champions d’Afrique. Ce dernier n’était pas bien loin. On a vu ce cher Gaston paré d’un chapeau aussi étrange que ses propose d’alors sur les « très minoritaires Dias au Sénégal ». Il est heureux comme un enfant face à son «petit frère et ami» de président ! Il devait bien avoir des remords celui-là après que les Dakarois lui ont fait comprendre que ses délires étaient tout simplement débiles.

Barth était lui aussi tout aussi souriant et gentil. Une posture qui tranche avec son attitude d’habitude guerrière et offensive pour arracher ce qu’on a tendance à souvent lui refuser. "Je ressens beaucoup d’émotions et une très grande fierté. Félicitation à l’équipe. C’est la preuve que la persévérance paie. Nous sommes très fiers de ce peuple. J’appartiens à une génération traumatisé par le Caire car  dans les écoles, les élèves cotisaient 10 FCfa pour soutenir les Lions. Nous attendions cette victoire avec impatience. Nous félicitons l’Etat qui a accompagné l’équipe et nous espérons qu’il profitera de cette situation pour doter aux collectivités territoriales, le maximum d’équipements sportifs pour que le Sénégal continue à aller vers d’autres conquêtes », a déclaré le nouveau maire de Dakar qui semble vouloir mettre de l’eau dans son vin. Attitude politicienne ou pas, la jurisprudence Khalifa Sall l’a certainement incité à un peu plus de sagesse vis-à-vis d’un pouvoir central si pesant et si autoritaire dans la distribution des ressources des collectivités.

Non loin se tenait Bamba Fall, le Maire de la Médina qui a sorti une phrase bien sénégalaise : "Le pays est un et indivisible. Pouvoir et opposition, nous sommes un peuple". Et depuis lors, il a désormais décidé de travailler pour Macky Sall et de tenter de convaincre tous ceux qu'il pourra convaincre, de le faire. Pas une grosse surprise puisqu'on le voyait venir depuis belle lurette.

Pape Diop, président de Bokk Gis Gis, est lui d’avis qu’il faut réfléchir sur des modalités d’entente sur des sujets d’intérêt national. «Ce qui compte, c’est le Sénégal. Aujourd’hui, c’est le football qui rassemble tout le monde. Mais demain, nous devons réfléchir sur quelque chose qui va rassembler», a-t-il lancé.

Bougane Guèye, habillé du maillot de l’équipe nationale, était aussi de la partie. Lui à qui Cheikh Yérim Seck avait attribué le rôle de médiateur de l’ombre entre Khalifa Sall et Macky Sall qui se parleraient en secret. Le patron de la Sen Tv, si souvent acerbe dans ses propos, était également tout sourire, sans doute comblé par cette victoire. Récemment, il assénait des propos peu amènes à l’endroit de ses détracteurs qui font de lui l’ennemi juré d’Ousmane Sonko dont l’absence à cette fête, a été bien remarquée et commentée par la presse.

Mamadou Lamine Diallo, inexistant dans ces élections, était aussi de la partie. Il ne semble pas beaucoup aimer le terrain et brille plus par ses communiqués et ses critiques acerbes, faciles et parfois trop intellos pour coller à la réalité sénégalaise.

Son compagnon, Abdoul Mbaye, premier Premier ministre du régime de Macky Sall, avait lui aussi retrouvé son président, le temps de cette union sacrée. "Je ressens beaucoup de plaisirs. C’est le sport qui peut créer cette circonstance, celui d’une nation à l’unisson par la satisfaction du peuple. Je me suis impliqué dans l’équipe en 1986 on n’a pas eu la chance de décrocher la coupe. C’est maintenant que nous l’obtenons », avait déclaré celui-ci. Mais il sera vite retourné à son opposition virtuelle grâce à un tweet balancé. L’ancien chef du gouvernement sénégalais croit savoir que cette  "hausse des prix intérieurs se poursuivra comme volet de l’ajustement structurel devenu nécessaire, suite aux gaspillages et à l’endettement extérieur excessif". « La mal gouvernance appauvrira de plus en plus des Sénégalais déjà très fatigués », a-t-il fustigé. Un commentaire qui fait suite à une augmentation du prix du sucre en poudre passé de 600 francs à 635 francs, voire 700 francs Cfa le kg.

Bref à l’heure de la victoire des «Lions» que les Sénégalais apprécient à sa juste valeur, les politiques savent bien taire leurs divergences. Macky Sall recommandait, d’ailleurs, cette attitude et un retour prochain dans l’arène, après la fête.

Une fête dédiée aux «Lions» finalement bien salutaire pour le Président Sall. Elle est une sorte d’entracte dans une pièce de théâtre puisqu’elle lui permet de rompre d’avec cette torpeur et ce coup de massue reçu lors de ces locales ; et surtout de mieux avaler la pilule qu’il a si vainement tenté de faire accepter par une certaine opinion. Elle est venue rompre ce débat qui voulait que la question du 3ème mandat soit désormais réglée. Il doit bien remercier les «Lions», ce cher Macky. Cette prime exceptionnelle était peut-être la manière de le faire.

Et la polémique pollua la fête ! 

Mais l’euphorie n’a pas beaucoup duré. Très vite, on est revenu à nos tares. Les moments d’extase ont très vite cédé la place aux malentendus et aux polémiques en soulevant des questions de foncier avec ces terres offertes aux «Lions», mais aussi des problèmes de partage du butin exceptionnel attribué à la délégation du Sénégal, en direction de la coupe d’Afrique.

Le 3éme vice-président de la Fédération sénégalaise de Football, Mame Adama Ndour est monté au créneau pour dénoncer sur les ondes de la Radio Futurs Médias, un partage des primes à la "bouki" l'hyène. « Le premier critère que l’on avait dégagé, c’était que tous les vice-présidents soient sur la liste officielle. C’est après seulement que l’on devait songer à d’autres membres comme ceux siégeant dans la Commission des compétitions internationales. Et cela devait aller jusqu’à un nombre de 10 personnes. Avant de valider tout cela, on avait pris l’attache d’Abdoulaye Fall (Payeur du Trésor public et président de la Ligue de Diourbel, ndlr), le financier qui représentait l’État, et il avait dit qu’il était possible de prendre en charge cette délégation. Et ce qu’on avait retenu, c’est que le ministre (des Sports, Matar Ba) pouvait dans son arrêté élargir la délégation jusqu’à 60 personnes. Maintenant que tout cela a été fait, et alors que la CAN battait son plein, on nous dit que le ministre (des Sports) n’avait pas validé cette délégation de 60 personnes », a expliqué le 3ème vice-président qui n’a été servi.

« Mais cela ne devait guère poser problème parce qu’en réalité, la délégation de 50 personnes, c’est celle autorisée par la CAF mais tout pays participant pouvait élargir la sienne jusqu’à 60, 70 membres en fonction de ses besoins durant son séjour au Cameroun. Les gens sont restés chez eux ou à leurs bureaux et ont, sans informer le Comité exécutif encore moins le Comité d’urgence, confectionné leur liste de 50 personnes pour la délégation officielle. C’est là le véritable problème. Et puis comme le principe était que tous les vice-présidents soient sur la délégation officielle avant toute autre personne, on ne peut pas mettre 1 et 2 puis sauter 3 (ndlr( Mame Adama Ndour) et mettre 4 (ndlr- Amadou Kane) puis sauter 5 (ndlr- kosso Diané) pour mettre 6 (ndlr- Cheikh Seck), ça c’est un véritable parti pris. Et ça il fallait que l’opinion le sache», a poursuivi Mam Adama Ndour.

Qui n’a pas manqué d’accabler le ministre Abdoulaye Sow, membre de la fédération et Augustin Senghor, le président : "Ce n’est pas un problème d’argent, mais une question de respect. Il y a des gens qui ont accaparé le football sénégalais, à commencer par Ablaye Sow. Je pense que le président de la FSF, Augustin Senghor est dans une position contemplative et subit les événements. Sinon comment comprendre que son garde du corps personnel ou encore des administratifs salariés de la FSF soient dans la délégation officielle et non des fédéraux qui dirigent le football. Cela est inadmissible"

Invité de l'émission "Grand jury" de la RFM, dimanche 13 février, Augustin Senghor, président de la Fédération sénégalaise de Football a tenu à réagir et à recadrer Mame Adama Ndour en ces termes : "ce que je demande aujourd’hui aux membres de ce comité exécutif qui sont en train de parler, qu’ils comprennent que ce n’est pas parce qu’on a un poste de président ou vice-président, qu’on est plus important que qui que ce soit. On doit respecter le garde du corps, le cuisinier et surtout les milliers de Sénégalais qui s’investissent chaque jour dans le football et qui n’ont jamais touché un seul sou d’indemnités",

"La délégation officielle est établie dans un cadre opérationnel, pour remplir une mission pour le pays. Dans ce cadre-là, cette liste de délégation est déposée au niveau du ministère des Sports qui valide pour les budgets et autres (…). Aujourd’hui la personne qui se plaint, ou dont on m’a dit  qu’elle se plaint, en coupe du monde il était dans la délégation officielle. il a reçu des montants, des primes. D’autres qui n’étaient pas dans la délégation n’ont pas reçu" , a-t-il mentionné. Avant de préciser que la Fsf n’avait pas lancé un appel pour des primes, mais plutôt pour la victoire.

"A la dernière Can il (Mame Adama Ndour) est parti, il a touché 20 millions parce qu’il était sur la liste. D’autres comme le vice-président n’y étaient pas, et il ne s’étaient pas plaints. Il ne s’est pas soucié de leur sort. Cette fois-ci il n’y était pas parce que la composition ne dépendait pas de lui. Ce n’est pas du Mankoo Wouti primes Yi ou Manko Wouti Khalis. C’est du Manko Wouti Ndam li« , a dit Me Senghor qui ne manque d'asresser un message à Ndour : "C’est le message que j’envoie à Mame Adama Ndour. Qu’il sache raison garder, qu’il remette les pieds sur terre. Qu’il sache que ce qu’on gagne par sa sueur est plus important que ce qu’on nous donne. Ces 50 millions que Macky Sall a donnés ne sont pas plus importants que tout ce que j’ai réalisé dans ma vie….Et si Mame Adama veut, il vient me voir, je lui remets les 50 millions tout de suite, et je pense que ça va l’apaiser" , a-t-il conclu.

A en croire le président de la Fsf, Mame Adama Ndour ne faisait pas partie de la délégation qui avait effectué le déplacement au Cameroun, dans le cadre de la Coupe d’Afrique des nations.

Sur la sortie relative à la question du foncier qu'a évoqué Guy Marius Sagna, Me Senghor a estimé n'avoir pas suivi, mais n'accorde pas beaucoup d'importance aux propos de l'activiste. Dans un message, ce dernier demandait entre autres messages au président Sall de se "débrouiller pour ne pas donner à nos chers lions du football, des terrains à des endroits que vous et votre caste voulez partager en essayant d’utiliser les lions du football comme de futurs boucliers de la fureur populaire contre la spoliation foncière."

Pourquoi diantre dès qu'il s'agit d'argent, il y a toujours des problèmes sous nos cieux ? Question à 50 millions de F Cfa.