NETTALI.COM – Le gouvernement doit-il à ce point être réduit à devoir choisir dans ses rangs, des ministres ou de mettre sur pied, une plateforme composée de Dg et de parlementaires pour espérer gérer la communication du président Sall ? La fonction communication devrait en effet être assumée par une personnes dont c’est le rôle. Soit en tant que coordonnateur, conseiller en communication ou directeur de la communication. Enfin peu importe son titre, l’essentiel étant que cette fonction s’exerce dans une logique de fonctionnement en équipe dont c’est le vocation exclusive.

Bien évidemment des ministres, des parlementaires, des responsables politiques, des maires liés au parti ou à la coalition, des alliés, etc pourraient venir en appoint dans une logique de prolongement de la chaîne de communication, adossée à une stratégie, des messages, un discours maîtrisé et coordonné. Le tout à travers les canaux appropriés pour atteindre les cibles visées.

Ce que l’attelage a trouvé récemment comme parade, est un exercice de communication dénommé « Le Gouvernement face à la presse » et qui a consisté à réunir autour du porte-parole Seydou Guèye, un certain nombre de ministres pour répondre aux questions d’actualité posées par les journalistes. Une séance d’explications instaurée tous les quatorze jours.

Une trouvaille toutefois révélatrice d’un besoin de justifications dans un contexte d’accumulations de polémiques – sur des sujets tels que l’émigration clandestine en lien avec la crise de l’emploi en faveur des jeunes, mais aussi de formation du nouveau gouvernement avec ces nombreuses critiques -, alors que le gouvernement devait être dans des schémas contraires.

Comment a-t-on pu imaginer regrouper huit ministres pour parler de plusieurs dossiers et sujets ? Un exercice à priori peu efficace, pas très pédagogique, en plus d’être fastidieux, non seulement pour certains ministres peu habitués et pas préparés, mais encore et surtout pour la presse qui doit adresser des comptes-rendus, commentaires et analyses. Un procédé qui laisse dubitatif quant à son efficacité. Ne serait-ce que parce qu’il augure d’un effet saturation redouté pour ceux qui vont recevoir ces flux d’informations. Pourquoi ne choisiraient-ils pas par exemple deux thèmes majeurs du moment et l’aborder au lieu de se livrer à ce qui va être assimilé à de la parlotte ou une occasion de dire : « vous en vouliez, en voilà » ? On peut bien évidemment prendre la parole et s’enfoncer. La matière communication a en effet cette particularité, celle d’avoir besoin de prétexte pour se justifier.

Mais à la vérité, l’Etat, pour se simplifier la vie, devrait tout simplement être dans une logique de transparence, en étant maître de l’initiative de la communication en amont, permettant ainsi au citoyen d’accéder à l’information qui lui est due ? N’est-ce pas qu’il agit au nom et pour le compte du citoyen qui lui a donné mandat de s’occuper de ses affaires ? Dans la réalité, et dans la plupart des cas, la posture défensive du gouvernement cache à ne pas en douter, un manque de transparence et un non acquittement de ses obligations.

Il y a en effet quelque chose qui échappe. Est-ce que parce que les équipes à qui cette mission était initialement dédiée, seraient à ce point incompétentes ? Le changement de cap est à ne pas en douter, un aveu d’échec. Macky Sall ne peut pas être dans un éternel changement de formules. Cela fait quand même huit (8) ans qu’il est au pouvoir et sa communication n’a jamais produit la preuve de son efficacité. C’est parce qu’elle est à un tel niveau d’inefficacité que le chef de l’Etat a demandé ce que ses équipes montent davantage au créneau en concoctant une plateforme pour se sauver des assauts qui arrivent de toutes parts.

Comment celui qui cherche à dynamiser et à donner plus d’efficacité à sa communication et à celle de son gouvernement, peut-il choisir de s’enfermer dans un silence aussi pesant sur la question des nombreuses victimes de l’émigration clandestine ? Comment sur cette même question, des ministres peuvent-ils multiplier les bourdes dans un exercice de contestation de chiffres relatifs au nombre de victimes dans les océans ? Comme si un nombre de morts moindre, pouvait atténuer la gravité du drame ! Point de visites aux familles et point de « diaxaal » (argent remis aux familles lors des présentations de condoléances). Une coutume bien sénégalaise pourtant souvent utilisée pour appâter du politicien ! Certains de ceux qui sont dans la grande coalition de Macky Sall ou l’actuel gouvernement, n’ont-ils pas été happés par ce moyen ? Le président de la république n’a toujours pas réagi sur la question des victimes qui requerrait plutôt un deuil national. Et le secrétaire général du gouvernement, Abdoulatif Coulibaly pour tenter de le dédouaner, nous a fait comprendre que cela s’est fait par le biais d’Aly Ngouille Ndiaye, alors ministre de l’Intérieur et via les communiqués du conseil des ministres. Insuffisant, dirons-nous !

Macky Sall a cette propension à balancer des réponses aussi abruptes que sèches. Ne disait-il pas récemment, lors de sa conférence de presse d’après discours de fin d’année que beaucoup répétaient à l’envi que son parti n’est pas structuré, alors qu’il gagnait des élections ? Il se trompe en réalité lourdement. Non seulement il sait que ce déficit de structuration est réel, mais il se rend d’une certaine manière compte que sa mainmise sur l’appareil d’Etat et les institutions, y est pour beaucoup dans sa réussite. L’affaiblissement de l’opposition dont il a été l’artisan, à travers notamment le référendum, le parrainage et un processus électoral chaotique, joue fortement également.

En vérité, sa manière même d’exercer le pouvoir, sa méthode de gouvernance (tout part de lui et revient à lui), prédisposent à ce qu’il n’y ait pas beaucoup de monde pour avoir envie d’aller au charbon pour défendre sa politique.  L’inexistence d’un cadre cohérent, structuré et organisé, n’incite pas non plus à cela. Le traitement qu’il a par exemple infligé aux militants de la 1ère heure, aux membres de l’APR, l’invasion encombrante dans la gestion du pouvoir par les alliés de Benno Book Yaakaar (BBY) et récemment par ses anciens camarades du Pds, jouent beaucoup dans la démotivation de ses troupes. Beaucoup sont en effet passés à la trappe avec Macky Sall. La démobilisation et le chacun pour soi et cette sorte d’armée mexicaine à laquelle est réduit son parti, sonnent comme un retour de bâton pour le président. Ceux qui défendent, y vont bien timidement et avec peu d’entrain, désarmés même qu’ils sont en termes de discours.

Le nouveau gouvernement, dans sa composition actuelle, semble en réalité ne pas faire beaucoup d’émules, au regard de la gestion passée de certains d’entre eux et du manque d’envergure de ceux qui y ont été intégrés. La séparation de Macky Sall avec ses anciens ministres considérés comme compétents pour la plupart, reste incompréhensible aux yeux d’une certaine opinion qui y a vu une volonté de Sall d’exercer le pouvoir sans encombre après l’intégration d’Oumar Sarr, des ministres de Rewmi et d’Aïssata Tall Sall.

La communication en tant que matière, est également attachée à l’envergure et à la crédibilité de celui qui va communiquer. Il peut soit créer un effet répulsif ; soit de l’empathie. C’est selon.

C’est aussi et surtout ce laxisme dans l’action qui mine le travail du gouvernement. En si peu de temps, le président de la République a été obligé de demander des rapports notamment sur les investissements consentis et le niveau d’exécution des chantiers liés aux inondations. Il en a été de même sur la question de l’emploi des jeunes, suite à la vague des pirogues qui a fait des centaines de victimes. Le meilleur discours réside en réalité dans l’action et la communication, la cosmétique autour. Le communiqué du conseil des ministres, est d’ailleurs bien souvent un rappel des obligations des ministres quant à la gestion de leurs dossiers.

Mais à peine à t’on fini de s’émouvoir de la composition de ce nouveau gouvernement, que Macky Sall nous sert des augmentations de budgets en faveur de ses alliés. Le projet de loi de finances de l’année 2021 a connu une hausse de 8,9%. Et l’augmentation des budgets d’institutions comme l’Assemblée nationale et le Conseil économique, social et environnementale (Cese), où trône si fièrement Idrissa Seck, montre une volonté  à ne pas en douter, de prendre soin de l’ancien maire de Thies. Boubacar Camara qui a nous a renseignés en termes ironiques, que Macky Sall a attrapé un gros poisson en la personne d’Idrissa Seck, nous amène à penser que le chef de l’Etat a été obligé de rallonger le coût de l’assaisonnement de la sauce de l’espadon de Thies.

Mame Diarra Fam, Moustapha Guirassy, Serigne Cheikh Bara Doli Mbacké et Déthié Fall, à l’occasion du vote de la Loi de finances initiale (LFI) 2021, ont beau râlé. Rien n’y fait et Macky Sall n’en a cure. Qu’il ne s’étonne pas que ses troupes soient perpétuellement sur la défensive et que sa communication soit si mal perçue. Difficile en effet de défendre des sujets tels que l’achat de véhicules qui justifierait la hausse du budget de l’Assemblée, ou un TER pour lequel l’Etat a dépensé 731 milliards depuis 3 ans et qui est toujours à terre. Au même moment, la crise de l’emploi des jeunes qui prennent les pirogues vers un improbable eldorado, hante toujours les esprits. Nos gouvernants ont  vraiment le souci du peuple. Et ça se voit.