NETTALI.COM - Alors que le scénario d'une récession économique est redouté, Mamour Cissé et Mounirou Ndiaye alertent conjointement sur les contrecoups néfastes de la progression du coronavirus et exhortent l'Etat au patriotisme économique. Globalement, ils ont milité pour un retour à l'agriculture et un meilleur appui au privé national aux fins d'aider à endiguer le chômage des jeunes. 

Dans une interview accordée à Financial Times et parue le 23 juin dernier, le chef de l’Etat a intégré la perspective d’une récession économique, devant l’ampleur des dégâts causés par le coronavirus. « L'impact économique est énorme. Au cours des 5 dernières années, le Sénégal a connu une croissance annuelle de pas moins de 6,5%. Maintenant, même si tout se passe bien, la croissance sera de 1%. Si cette pandémie de poursuit, nous serons en récession, cela ne fait aucun doute », a dit le président de la République Macky Sall.

Dans la foulée, I-Radio avec Alassane Samba Diop a organisé lors de sa matinale du 24 jui, un débat sur le thème sous le titre « L’économie sénégalais face à la récession : quelles solutions ? ». Alassane Samba Diop avait pour invités l’économiste Mounirou Ndiaye et l’ex-directeur de cabinet du  président Abdoulaye Wade et non moins opérateur économique Mamour Cissé.

Mounirou Ndiaye a d'emblée relevé « les relations d’interdépendance entre l’économie et la santé ». « Quelqu’un qui n’est pas en bonne santé, ne peut pas avoir un rendement adéquat au travail», déclare l'enseignant.

Rappelant qu’en 2019, le taux de croissance tournait autour e 6,3 à 6,5 %, l’économiste a précisé que « l’on parle de  récession quand le taux de croissance est en dessous de la barre de 0% ». « Globalement, pour l’Afrique, le Fonds monétaire international projette un taux de croissance autour de 1,1% », mentionne M. Ndiaye; ajoutant : «  Il faut renforcer cette capacité d’adaptation des jeunes sénégalais en période de crise, soutenir les Pme pour qu’elles créent de la richesse. Il faut des ressources stables pour créer de la richesse. C’est important que le secteur privé national bénéficie davantage des Grands travaux de l’Etat. Un taux de croissance de 1 % pour nous est insuffisant. Or, il nous faut des taux aux environs de 6% (de manière soutenue)  pour sortir de la pauvreté ».

Ainsi, croit-il savoir : « S’il n’y a pas reprise normale de l’activité durant le quatrième trimestre, on peut s’attendre à une récession.  A l’heure actuelle, on ne peut pas encore parler de récession ».

Appréhendant les contrecoups néfastes d’un tel scénario, Mamour Cissé a mis l’accent sur les 90% de la population qui sont dans l’informel et qui pourraient subir cette récession, faute d'un schéma formel de reconversion. Il en veut pour exemple :  « En cette période de l’année, avec la proximité de la Tabaski, l’argent qui s’échangeait autour de Sandaga,  s’établissait à 5 milliards, aujourd’hui c’est moins de 2 milliards ».

Mamour exhorte le gouvernement à changer de cap en mettant l’accent sur l’agriculture qui doit porter la croissance et aider à régler le problème de l'autosuffisance alimentaire. « Il nous faut des industries de substitution par rapport à l’importation. Notre vallée (du fleuve Sénégal) peut nourrir toute l’Afrique de l’Ouest, pour autant qu’il y ait la volonté politique. Il faut encadrer les paysans pour pouvoir capitaliser sur les subventions de l’Etat au secteur. Ceux qui bénéficient  des engrais sont bien localisés et identifiables. Il faut que l’Etat interdise l’importation de riz pour inciter à la consommation du riz de la vallée. D’ici 3 ans, il nous faut atteindre une production de 1500 000 tonnes de riz. Ce qui a soutenu la création du Fonds de promotion économique (Fpe), c’est cette ambition de fixer de façon durale les populations à l’intérieur du pays », renchérit Mamour Cissé.

De son côté, Mounirou Ndiaye illustre par la trajectoire économique de l'Inde vers l'émergence. Ce pays, nous rappelle-t-il,  s'est doté d'un secteur privé très résilient face aux effets socio-économiques du Coronavirus.