NETTALI.COM – En faisant arrêter Docteur Babacar Diop, Guy Marius Sagna et quelques jeunes étudiants pour «participation à une manifestation interdite», le pouvoir ne s’attendait certainement pas à autant de réactions. Et en les maintenant en prison, le régime de Macky Sall prend le risque d’enfoncer le pays dans un front social déjà en ébullition.

Ils sont huit jeunes arrêtés et éparpillés dans différentes prisons de la capitale pour, entre autres délits, «participation à une manifestation interdite». Guy Marius Sagna et docteur Babacar Diop sont certes les plus connus. Mais dans le lot, il y a aussi de jeunes, comme Malick Biaye, Diao Diallo, Papis Djim, Ousmane Sarr, Leuz Def Tekk et Pape Abdoulaye Touré, dont une majorité d'étudiants de l’Université de Dakar. Et en visant l’ouverture d’une information judiciaire, le procureur de la République a sans doute voulu garder tout ce monde loin de toute velléité de contestations dans un contexte marqué par la hausse du prix de l’électricité après celui du carburant. Mission réussie. Enfin presque. Puisque depuis l’arrestation de Guy Marius Sagna et de son groupe, il n’y a pas encore une seule manifestation majeure contre la hausse du prix de l’électricité.

Toutefois, en maintenant en prison Docteur Babacar Diop et les autres, le pouvoir prend le risque d’accentuer la tension sociale. Un avant-goût a d’ailleurs été donné ce lundi avec les affrontements à l’Université Cheikh Anta Diop entre forces de l’ordre et étudiants. Ces derniers réclament le payement de leurs bourses, mais aussi la libération immédiate de Babacar Diop et de leurs camarades arrêtés devant les grilles du palais de la République. Et rien n’exclut que les hostilités ne reprennent malgré l’important dispositif policier visible aux alentours du campus universitaire ce mardi. Mieux, les étudiants ne seront pas les seuls au front. Le Saes et Sudes ont déjà décrété des mouvements de grève pour réclamer la libération de Babacar Diop, enseignant au département de philosophie. Les organisations syndicales, elles aussi, commencent à se faire entendre. L’Union nationale des syndicats autonomes du Sénégal (Unsas), la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal/Forces du changement (Cnts/Fc), le Sels/Originel et d’autres syndicats d’enseignants appellent à la mobilisation pour barrer la route à la hausse du prix de l’électricité, mais aussi exprimer leur solidarité aux travailleurs de la Sénégalaise des eaux (Sde). Parce que, pour ces organisations syndicales, le décret de réquisition signé par le Président Macky Sall est un «précédent dangereux» pour le respect des droits des travailleurs. «Si ça passe avec les travailleurs de la Sde, ce sera la même chose avec les syndicats d’enseignants qui ont déjà déposé des préavis de grève», alerte Dame Mbodji, coordonnateur du G-20.

C’est dans ce contexte qu’une marche est prévue ce vendredi 13 décembre. Une manifestation qui sera un test majeur pour le mouvement syndical, les organisations de la société civile et les partis d’opposition. Une jonction qui pourrait être lourde de dangers pour le pouvoir de Macky Sall déjà occupé à éteindre le feu qui couve dans ses propres rangs avec les révélations fracassantes de Moustapha Cissé Lô confirmées par Yaxam Mbaye.