NETTALI.COM – Le bras de fer entre le guide des Moustarchidines et Issa Sall, semble poser en loi d’airain l’incompatibilité fonctionnelle entre logique théocratique et militantisme partisan. Les trajectoires de ces partis, faux-nez d’organisations religieuses, démontrent que, sous nos cieux, l’adhésion à un dogme ne s’accommode guère des contradictions inhérentes à la démocratie interne, même si, par ailleurs, cette exigence de débat n’est pas un critère respecté par les classiques, de l’Union progressiste sénégalaise à l’Alliance pour la République.

Si l’on a connu des Etats théocratiques par le passé, dans ce Sénégal, qui a assimilé les codes progressistes du Siècle des Lumières, la conception sacrale de l’autorité politique peine à triompher des contradictions inhérentes à la démocratie interne.

Pendant longtemps, à partir des législatives de 1951, quand les guides des plus grandes familles religieuses du Sénégal apportèrent leur soutien au binôme Dia-Senghor, la plupart des marabouts n’ont pas tenté le pénible saut en politique. Ils se sont contentés d’accompagner les hommes d’Etat sans trop s’approcher du soleil.

Ainsi, la crise qui secoue, depuis quelques jours, le Parti de l’unité et du rassemblement (PUR), emprunte ses causes lointaines à l’Histoire et laisse remarquer qu’il existe une sorte d’incompatibilité fonctionnelle empêchant le déploiement de la donne religieuse sur la sphère du militantisme partisan.

Certes, de la fin des années 50 aux années 60, le Parti de la solidarité sénégalaise (Pss) de Serigne Cheikh Ahmed Tidiane Sy Al Makhtoum s’est imposé comme une très grande force politique ayant donné du fil à retordre au régime de Léopold Sédar Senghor avant de rentrer dans les rangs dans la foulée de la constitution du « Parti unique », mais après le déclin de cette formation, tous les autres partis fondés par des religieux n’ont pas su se détacher du style de gestion autoritaire propre au management des dahiras.  « Croire ou ne pas croire », tel est le postulat posé en dogme dans le premier verset du Coran et développé dans les trois autres qui suivent.

Le Parti de la vérité pour le développement (Pvd) de Serigne Modou Kara a connu une grande crise au lendemain de la présidentielle de 2007 avec la démission de son coordonnateur Ibrahima Sall, actuel directeur général de la SICAP, qui fondera le MODEL. Ce parti connaitra plusieurs départs et se trouve aujourd’hui plongé dans une léthargie.

En fait, la localisation de l’électorat du PUR aux législatives de 2017 et à la présidentielle démontre que son influence épouse les limites du Mouvement des Moustarchidines. Il n’est fort qu’en milieu tidiane. C’est pourquoi Issa Sall, qui souligne que le congrès de ce samedi a adopté les décisions d’une association religieuse,  aura du mal à convaincre de la pertinence de cette idée.

La formation politique créée par feu Serigne Mamoune Niasse, lors démissionnaire de l’Alliance des forces de progrès, fonctionnait selon la même logique. Pour preuve : ce parti est dirigé aujourd’hui par le fils du marabout.

Héritier de son père à la tête du Fsd / Bj, Cheikh Bamba Dièye tentera de laïciser le fonctionnement de cette organisation, mais il a échoué à maintenir la tendance haussière des résultats de ce parti entre 1998 et 2OO7.

En définitive, le modèle des religieux qui passent par de faux-nez pour concrétiser des ambitions politiques, dans un environnement de laïcité, n’est pas efficace. Ce type de parti est toujours perçu comme une organisation religieuse.