NETTALI.COM –Il serait réducteur de confiner la succession de Ousmane Tanor Dieng dans le corset réducteur d’une rationalité juridique qui ignore la légitimité historique. Aminata Mbengue Ndiaye peut-elle ravir la vedette à Khalifa Sall et à ses autres potentiels concurrents ? Le Ps, qui descend de Charybde en Scylla depuis 1998, ne devrait-il pas faire sa mue, en concrétisant le projet de retrouvailles de la grande famille socialiste, sous le mode de l’Ump française.  

Dans sa publication du jour, Sud Quotidien ouvre une large fenêtre sur la succession de Ousmane Tanor Dieng. Le journal, se fondant sur les textes du parti, croit savoir que « c’est la présidente du Mouvement national des femmes socialistes, Aminata Mbengue Ndiaye qui doit succéder au défunt Secrétaire général du Parti socialiste ».

Seulement dans cette affaire, tout n’est pas rationalité juridique. Car, le contexte est marqué par une partition de fait du parti, à la faveur de la crise qui s’était installée entre Ousmane Tanor Dieng et Khalifa Sall. Ainsi, on voit mal comment les khalifistes vont-ils accepter de se ranger derrière l’actuelle ministre en charge de la Pêche, alors qu’ils ont toujours, systématiquement, contesté les décisions de la hiérarchie depuis 2016.

Elu pour la première fois député en 1983, ancien patron du Mouvement national des jeunesses socialistes, Khalifa Sall, en termes de légitimité historique, capitalise sur une expérience que n’ont pas ses concurrents. Aminata Mbengue Ndiaye était encore inconnue du bataillon. C’est dans les années 90 qu’elle s’est fait connaitre, avec le retrait, brusque ou progressif, d’icônes telles feues Mantoulaye Guène ou encore Adja Arame Diène. Même Mata Sy Diallo, la Lionne du Ndoucoumane, bénéficiait de plus de légitimité historique que la Lougatoise, avant de rejoindre l’Alliance des forces de progrès, puis le Grand Parti de Malick Gackou.

Même au sein des « loyalistes », la transition à la tête du Parti socialiste pourrait ne pas se faire en douceur puisque, en lieu et place de l’ex-ministre de la Femme, sous Abdou Diouf, c’est le profil de Serigne Mbaye Thiam qui se dégageait médiatiquement pour succéder à Ousmane Tanor Dieng. Pendant la maladie du défunt secrétaire général, c’est le ministre de l’Hydraulique qui présidait les réunions. Toutes choses égales par ailleurs, l’ancien ministre de l’Education n’a pas non plus grandi dans ce parti.

Nous devons  la vérité de souligner que ce baobab  subit toujours les séquelles de la crise caractéristique de l’ascension de « OTD » dans les années 90, quand on parla de « Congrès sans débat ».

C’est pourquoi il est légitime de se demander comment le Ps pourrait survivre sans Tanor, qui avait fini par en faire un appareil à son entière dévotion.

Cependant, à remonter la pente du temps, on se rend compte que la  doyenne des formations politiques d’Afrique francophone, avec le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), a surmonté de nombreuses contradictions internes depuis sa création en 1948, en passant par l’épisode de 1962, la « désenghorisation », dans la foulée de l’accession de Abdou Diouf au plus haut destin politique et la perte du pouvoir en 2000.

 

Mise en perspective des retrouvailles au sein de la famille socialiste

 

Son ancêtre, en ligne directe, le Bds, est elle-même née du bras de fer entre Me Lamine Guèye et un groupe de dissidents conduits par Léopold Sédar Senghor en 1948. Les deux gladiateurs des années 50 se retrouveront pour former l’Union progressiste sénégalaise (Ups). Le fonctionnement du parti sera calqué sur le présidentialisme ultra-concentrationnaire initié par Léopold Sédar Senghor, consécutivement à la crise de décembre 1962. Avant de quitter le pouvoir, le poète-président mit en selle Abdou Diouf, qui, à son tour,  intronisera Ousmane Tanor Dieng, dans les mêmes conditions. Pendant tout ce temps, le Ps connut plusieurs vagues de défections. A la veille des législatives de 1998,  Djibo Ka et de grands pontes du régime socialiste montent le Renouveau démocratique. Le parti n’obtint qu’un score autour de 50 % au terme de ces élections-là, descend à 42% en 2000 et à 13 % en 2007. En 2012, il a eu 11% et ne s’est pas présenté à une présidentielle depuis lors.

En définitive, seules les retrouvailles de la grande famille socialiste, sous le mode l’Ump française, pourraient sauver le Ps historique de ce déclin programmé, comme ce fut le destin du Rnd de Cheikh Anta Diop, du Pra de la bande à Abdoulaye Ly et du Pai de Madjmouth Diop. Aussi bien Djibo Ka que Ousmane Tanor Dieng, avant de quitter ce bas-monde, ont milité pour ces retrouvailles.