NETTALI.COM - Le parquet financier a rendu public un réquisitoire introductif accablant dans l’affaire dite Madiambal Diagne. L’ancien patron de presse, actuellement en France, son épouse Mame Bineta Diaby, deux de ses enfants et son marabout Serigne Mor Mbaye, sont soupçonnés d’avoir participé à un vaste montage contractuel et financier. Les accusations portent sur escroquerie sur des deniers publics, blanchiment de capitaux en bande organisée et complicité. Les enquêteurs pointent plus de 12 milliards FCFA de flux suspects et demandent la saisie conservatoire des biens au Sénégal et à l’étranger.

À l’origine de cette procédure, un rapport transmis le 1er août 2025 par la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF) au parquet du pool judiciaire financier. Le document met en lumière de graves anomalies dans l’exécution du Programme de modernisation et de construction d’infrastructures judiciaires (PMCIJ), un marché public-privé estimé à 250 milliards FCFA.

Avant même la signature du contrat principal, une convention de sous-traitance anticipée de 20,33 milliards FCFA avait été conclue, dès février 2020, entre Ellipse Projects et la SCI Pharaon, société familiale détenue par Madiambal Diagne, son épouse et leurs six enfants. Problème : cette société, créée en 2016 avec un capital d’1 million FCFA, ne justifie d’aucune compétence technique en BTP.

Entre avril 2021 et juin 2022, la SCI Pharaon a encaissé plus de 12 milliards FCFA versés par Ellipse Projects, dont plus de 4 milliards en doublon. Ces mouvements bancaires sont jugés suspects, car sans contrepartie économique réelle. À cela s’ajoutent des retraits massifs en espèces et l’émission de chèques au profit de particuliers.

Parmi les bénéficiaires figure Mame Bineta Diaby, qui a perçu à elle seule 1,176 milliard FCFA via sept chèques. Selon la CENTIF, aucun document contractuel ou statutaire ne justifie ces encaissements.

Un rôle central attribué à Madiambal Diagne

Les enquêteurs estiment que Madiambal Diagne a joué un rôle pivot dans l’introduction et la valorisation d’Ellipse Projects auprès des autorités. La signature anticipée du contrat de sous-traitance et la surfacturation constatée sont interprétées comme les indices d’un montage planifié pour détourner une partie des fonds publics mobilisés.

Dans son réquisitoire, le procureur financier vise :

  • Madiambal Diagne, Mohamed Diagne et les responsables d’Ellipse Projects (Alex Alizé, Olivier Picard, Arnaud Cudel) pour association de malfaiteurs, escroquerie sur des deniers publics et blanchiment de capitaux en bande organisée;

  • Mame Bineta Diaby pour complicité de blanchiment de capitaux ;

  • Son marabout, Serigne Mor Mbaye, pour association de malfaiteurs.

Conformément à l’article 140 du Code de procédure pénale, le parquet rappelle que tout inculpé pour escroquerie sur des fonds supérieurs à 100 millions FCFA doit être placé sous mandat de dépôt si le montant n’a pas été remboursé ou cautionné.

Le procureur a requis des mesures fortes : interdiction de sortie du territoire, gel des comptes bancaires, identification des biens immobiliers au nom des inculpés ou de leurs proches, saisie des véhicules immatriculés, et recensement des fonds de commerce liés aux mis en cause.