NETTALI.COM - Depuis la décision rendue le vendredi 25 juillet par le Conseil constitutionnel, censurant quatre dispositions du nouveau règlement intérieur de l’Assemblée nationale, la réaction politique ne s’est pas fait attendre. Du côté de la majorité présidentielle, certains responsables du Pastef, désormais au pouvoir, sont allés jusqu’à réclamer – sans ambages – la dissolution du Conseil. Une réaction pavlovienne qui illustre une constante inquiétante : lorsque la loi dérange, on s’en prend à ceux qui sont chargés de l’interpréter.

Et pourtant, il suffirait d’un peu de mémoire – ou d’honnêteté politique – pour se rappeler que ce même Conseil constitutionnel a été, ces derniers mois, l’un des principaux remparts contre la dérive institutionnelle. Le 15 février 2024, alors qu’un report de l’élection présidentielle se profilait à l’ombre de calculs politiques, le Conseil ose censurer une loi constitutionnelle ainsi qu’un décret présidentiel – un fait rarissime. Mieux encore, le 5 mars, il s’oppose aux conclusions du dialogue national et fixe lui-même, dans un communiqué inédit, la date du scrutin.

Sans ces décisions, il n’y aurait probablement eu ni vote, ni alternance, ni peut-être de République à sauver.

Un Conseil salué avant d’être décrié

En avril 2024, le Conseil valide la candidature de Bassirou Diomaye Faye, malgré les pressions d’un régime finissant. Ce geste, salué alors comme un acte de courage, a ouvert la voie à une alternance démocratique et pacifique. Les mêmes qui applaudissaient alors une institution « digne, indépendante, patriotique » dénoncent aujourd’hui un supposé complot institutionnel, au motif que 4 articles sur 136 ont été jugés non conformes à la Constitution.

Critiquer une décision de justice est non seulement légitime, mais sain dans une démocratie. Appeler à la disparition pure et simple d’une institution régalienne, simplement parce qu’elle résiste à l’agenda politique du moment, est en revanche dangereux. C’est le signe d’une immaturité démocratique persistante, qui traverse les régimes et les époques.

Il est inquiétant de refuser la règle du jeu lorsqu’elle ne sert pas ses intérêts immédiats. Le Conseil constitutionnel ne gouverne pas. Il garantit l’équilibre des pouvoirs. Et si ses décisions peuvent être contestées sur le fond, sa cohérence et son courage institutionnel dans la période récente sont incontestables.

Respecter les institutions, surtout quand on gouverne

Rappelons-le : on ne construit pas un État de droit en délégitimant ses piliers. Le Conseil constitutionnel est peut-être imparfait, mais sans lui, entre février et mars 2024, le Sénégal aurait plongé dans l’instabilité.

Il est facile de réclamer des institutions fortes lorsqu’on est dans l’opposition. Le véritable test de la maturité démocratique, c’est de les respecter une fois au pouvoir.

Et sur ce point précis, les régimes passent… mais les réflexes restent