NETTALI.COM - Le Conseil constitutionnel du Sénégal a invalidé ce vendredi plusieurs dispositions de la nouvelle loi organique portant règlement intérieur de l’Assemblée nationale. En cause : des articles jugés contraires à la Constitution, notamment en matière de séparation des pouvoirs.

Adoptée le 27 juin 2025 par les députés, la nouvelle loi organique modifiant le règlement intérieur de l’Assemblée nationale a subi un revers partiel. Saisi par le président de la République, le Conseil constitutionnel s’est prononcé ce vendredi sur la conformité de cette loi avec la Constitution sénégalaise. Et sa décision est sans ambiguïté : plusieurs articles sont contraires aux principes fondamentaux de l’ordre constitutionnel.

 Une procédure d’adoption jugée régulière…

Dans son avis, la juridiction constitutionnelle commence par valider la forme. La procédure d’adoption parlementaire est jugée régulière, tout comme l’abrogation des lois organiques n° 78-21 du 28 avril 1978 et n° 2002-20 du 15 mai 2002, précédemment en vigueur. Le texte adopté par l’Assemblée nationale le mois dernier est donc, sur le plan procédural, conforme.

Mais ce satisfecit s’arrête là.

Le Conseil a en effet censuré plusieurs articles clés de la nouvelle loi. À commencer par l’alinéa 2 de l’article 56, qui prévoyait que toute personne convoquée devant une commission d’enquête parlementaire a l’obligation de comparaître, sous peine de sanctions pénales, avec possibilité pour le président de l’Assemblée de requérir la Force publique.

Un mécanisme jugé contraire au principe de séparation des pouvoirs, en particulier dans le cas des magistrats, qui ne peuvent être contraints de comparaître devant une instance parlementaire.

Autre article épinglé : l’alinéa 6 de l’article 60, jugé non conforme car il ne reproduit pas fidèlement l’article 61 alinéa 5 de la Constitution, qui encadre l’immunité parlementaire.

Le Conseil a également retoqué l’alinéa 6 de l’article 111, relatif à la procédure de motion de censure. La disposition empêchait tout retrait d’une motion une fois la discussion engagée, imposant une poursuite jusqu’au vote. Une contrainte jugée excessive au regard des prérogatives des députés.

Enfin, l’article 134 est jugé inconstitutionnel pour n’avoir pas précisé que les membres de la Haute Cour de Justice doivent être renouvelés après chaque législature, une exigence pourtant fixée par la loi fondamentale.

D’autres dispositions validées… sous réserve

Dans sa décision, le Conseil constitutionnel a aussi précisé que plusieurs articles sont conformes à la Constitution, mais sous réserve d’interprétations précises mentionnées dans les considérants 27, 29, 50 et 55.

Parmi ces dispositions validées sous condition, figurent :

  • l’alinéa 5 de l’article 15,

  • l’article 16,

  • l’alinéa 5 de l’article 56,

  • et l’alinéa 4 de l’article 57.

La décision du Conseil constitutionnel a un poids politique considérable. Elle vient rappeler les limites du pouvoir parlementaire, notamment dans sa volonté de renforcer les prérogatives de contrôle. Elle réaffirme le rôle de gardien de la Constitution joué par le Conseil, dans un contexte où les relations entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire sont scrutées avec attention depuis l’arrivée d’un nouveau régime.

En somme, cette décision ne remet pas en cause la refonte du règlement intérieur, mais contraint l’Assemblée nationale à revoir sa copie sur plusieurs points sensibles, au nom du respect de la Constitution.