NETTALI.COM - Les 24 prochaines heures vont être décisives dans la poursuite du processus électoral devant mener le pays à l’élection d’un nouveau président de la République.

Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye libres, c’est une autre campagne électorale qui commence. Les Dakarois en ont eu un aperçu, le jeudi 14 mars dans la soirée lorsque, dans les quartiers, la clameur qui a accompagné la libération des deux dirigeants de l’ex-Pastef. Une liesse populaire rarement vue depuis des mois a suivi l’élargissement du binôme. C’est l’épilogue de deux ans de raidissement et d’affrontements sans fard entre la majorité Benno et l’opposition radicale incarnée par le maire de Ziguinchor. C’est aussi l’aboutissement d’une volonté, celle de Macky Sall qui, après des mois de pourparlers avec Ousmane Sonko, suivis par un Dialogue national, a desserré l’étau judiciaire sur ses opposants après des mois de répression.

APRÈS 11 MOIS DE PRISON

Le président sortant était aidé dans cette tâche par les défiances aux institutions que le parti de l’opposition avait fini d'adopter comme stratégie, avec au bout des morts et des dégâts incommensurables, matériels et immatériels, mais une riposte appropriée, selon le parti d’opposition, à la gouvernance et aux méthodes du quatrième président de la République.

Finalement, l’image de la démocratie sénégalaise est (encore) sauve, car un candidat à la présidentielle (donc chef de l’État putatif) en prison, ça faisait désordre ; et Bassirou Diomaye Faye, désigné au pied levé pour remplacer Ousmane Sonko inéligible (ce qui n’est plus le cas depuis quelques jours) dans la course à la magistrature suprême, peut, désormais battre campagne à l’instar de ses 18 challengers.

Depuis quelques jours, une subite accélération des événements a donc ramené le tableau à un schéma classique d’un pouvoir sortant qui fait face à une opposition surfant sur une popularité confirmée par tous les observateurs. L’agenda aurait pu être simple, si la libération et l’éligibilité retrouvée d’Ousmane Sonko, ne venaient pas remettre sur le tapis ce qui se disait tout bas depuis des mois, mais que l’imminence du scrutin et ses enjeux ont bruyamment ravivé : l’original étant préférable à la copie, si l’on ose dire, une aile du parti d’opposition, sans doute minoritaire, a soutenu l’idée que la participation de son leader au scrutin valait son report.

Jeudi peu après la libération des deux inspecteurs des impôts et des domaines, l’homme d’affaires Pierre Goudiaby Atepa, un des médiateurs entre le palais et la prison du Cap Manuel, a souhaité sur iRadio la reprise du processus électoral, en laissant entendre qu’Ousmane Sonko devait être candidat.

Les premiers mots de Sonko...

Est-ce toujours possible ? Par quel tour de passe-passe pourrait-on remettre en cause le processus électoral, à neuf jours du scrutin, alors que tous les candidats sont en pleine campagne électorale ? Alors que la paix des braves (?) autour d’Amadou Bâ a été faite dans la majorité sortante et que les appels aux soutiens à tel ou tel candidat se multiplient ? Alors que l’Administration et la Cena se disent prêtes ?

Le Vendredi 15 mars, la Cour suprême doit examiner le recours déposé devant elle par le PDS qui réclame rien de moins que la dissolution du Conseil constitutionnel, car estimant que les décrets qui organisent le scrutin présidentiel du 24 mars prochain sont illégaux pour non-respect du Code électoral (la campagne électorale doit durer 21 jours, ce qui ne sera pas le cas si le vote a lieu à la date prévue).

C’est pour ces raisons que les premières déclarations du chef de l’opposition seront déterminantes pour la suite.

Hier (jeudi 14 mars), en campagne à Dahra-Djolof, le candidat Thierno Alassane Sall a quasiment enjoint à la Cour suprême de ne pas remettre en cause la dynamique en cours. “Je m’oppose à toute forme de report, car j’estime que le processus électoral doit continuer, pour éviter de verser le pays dans le chaos”, a indiqué le candidat de la République des valeurs.

Nous écrivions dans ces colonnes, il y a quelques semaines, que “Macky Sall et Ousmane Sonko étaient des alliés objectifs”. Si la Cour suprême donne raison au PDS, en sachant que les décisions du Conseil constitutionnel “ne sont susceptibles d’aucun recours”, on sera dans une nouvelle impasse. Et il n’est pas sûr que la rue y reste insensible. On saurait surtout que “le protocole du Cap Manuel” existe bel et bien...

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