NETTALI.COM - Faut-il en rire ou en pleurer ? A suivre les vidéos de Kaliphone Sall, cet insulteur public devant l’éternel débiter, tel une rafale de mitrailleuse, des insultes à la pelle contre le président Sall, on est tout simplement pris de dégoût. Un tel niveau de propos orduriers, d’insolence et de violence, du jamais vu ! Si en plus, ils sont agrémentés d’attaques sous la ceinture contre le chef de l’Etat, on ne sait plus où on va. Kaliphone n’en a pas eu que pour Macky Sall, il a piétiné les institutions, les ministres, le ministre de la justice, le procureur et les forces de police et la gendarmerie, etc qu’il a abreuvés d’insultes sans en épargner la moindre.

Mais ce qui est surtout curieux, c’est que ce dernier ait fini par « interviewer » le président Macky Sall et son épouse dans la résidence de l’ambassade du Sénégal en France. Il y a vraiment de quoi être indigné. Comment cet insulteur public, est-il devenu si subitement fréquentable ? Quelle ressort s'est cassé pour qu'il soit reçu avec honneur sur ce sol sénégalais à l'étranger, lui qui qui a piétiné les institutions de la république ? Comment Macky Sall, a-t-il pu se rabibocher avec lui ? Le patron de Kali TV a en tout été reçu à dîner comme un honorable invité de marque ! Et dire que les journalistes sénégalais n'ont même plus droit à une interview. Même le face à face de fin d'année 2021 a été zappé.

Sur les réseaux sociaux, l’affaire a fait grand bruit et suscité une avalanche de réactions d’indignations ainsi qu'un grand malaise. Non, Macky Sall n'avait pas le droit de faire ça. De recevoir ce vil individu. C'est lui qui se faisait certes insulter, mais en posant un tel acte, il casse beaucoup de ressorts dans la république. N'est-ce pas lui qui faisait, il n y a guère longtemps un réquisitoire contre ces insulteurs du net : "on ne peut pas laisser les gens détruire les réputations de personnes, de familles gratuitement..", déclarait-il. Comment le prendre au sérieux dès lors ? Comment désormais prendre au sérieux ses positions contre les dérives verbales des insulteurs des réseaux sociaux ?

Beaucoup d’ailleurs ne manquent pas de s’interroger sur la posture du couple présidentiel. Comme ce commentaire de Moustapha Diop de Walf TV qui se demande comment le couple présidentiel a-t-il pu faire une vidéo avec Kaliphone Sall. Pour le journaliste, il n y a rien de plus important que les parents dans la vie ; ceux-là qui nous ont tous mis au monde. C’est la raison pour laquelle, il ne comprend que le chef de l'Etat ait pu aller, au regard de son passé d'ailleurs récent de cible préférée de Kaliphone, jusqu'à avoir un tel niveau de proximité avec le couple présidentiel. Il a fait des photos et vidéos avec l'insulteur et échangé des civilités, fiugurez-vous ! Réaction similaire de Babacar Fall qui n’a pas manqué de marquer son étonnement sur la RFM.

Dans un live, on a par exemple vu Kaliphone Sall dire à Marième Faye Sall tout le bien qu’il pense d’elle, l’amour que lui portent les Sénégalais pour son humilité, sa simplicité ! Macky Sall, il le nommera par le terme "l'homme au coeur de diamant" et « Sall buru Guédé » comme pour le rehausser. Bref la séance flagornerie dans un exercice qui ressemble fort à du reniement de la part de ce « liver » de Kaliphone. Et l'on peut voir le président tout sucre, tout miel avec son invité à qui il dit  : "arrête de te moquer" avant de le féliciter pour son travail remarquable sur les réseaux sociaux. Remarquable ? Kaliphone est tout simplement honoré et heureux comme un enfant pour avoir partagé un copieux repas avec le président. Il le fera d'ailleurs savoir.

Reste-il encore du scrupule, de la dignité ainsi que de la vergogne à cet individu pour oser se dédire de la sorte ? Il a en tout réalisé une « interview » ô combien complaisante avec des questions aussi désarticulées qu’idiotes, à tel point que Marième Faye elle-même lui a demandé, à certains moments comment il a pu en poser de telles et vouloir attendre des réponses ! Des questions dans le genre : « pourquoi vous êtes gentille ? Pourquoi vous êtes charitable ? », etc. De quoi se demander à quoi est dû ce retournement de veste si soudain pour que le mec se mue tout d’un coup en agneau. Eh bien le Sénégal est un pays rempli de mystères.

Ce qu’a fait Kaliphone est gravissime. Il a porté non seulement atteinte à l’institution du président de la république, mais encore aux institutions. Maintenant, il reste incompréhensible que Macky Sall qui est la clef de voute des institutions, puisse accepter cet état de fait. Il a hérité de la présidence de la république, il devait tout juste la préserver d'un tel niveau de discrédit et de désacralisation. Lorsque le président reçoit un invité, celui-ci doit être d'une exemplarité notoire et pas un anti modèle.

Il y a vraiment de quoi s’inquiéter de ce Sénégal qui est sur une pente vraiment dangereuse. Perte croissante, perte de repères et de valeurs. Promotion de la médiocrité, de l'insulte et de la force brute.

Mais comble du paradoxe, pendant ce temps, Cheikh Mbacké Bara Doly qui a raté l’occasion de se taire le jour du rassemblement de YAW/WALLU en proférant des attaques au-dessous de la ceinture contre le président Sall, est tout simplement emprisonné. Des propos gravissimes certes pour l’institution qu’est le président de la république, mais qui ne sont rien, comparés au niveau de violence des paroles de Kaliphone Sall.

Une situation qui a été d’ailleurs merveilleusement décrite par ODIA dans ses caricatures de ce lundi 13 juin dans le journal « La tribune », montrant le « liver » en compagnie de Macky Sall et qui demande à ce dernier, alors qu’ils sont en train de passer devant les barreaux de prison de Bara Doly, qui est ce prisonnier. Et Macky Sall, de lui répondre : « Un adepte des grossièretés sur ma personne… mais comparé à toi Kali, c’est un enfant de chœur ».

Difficile en effet de savoir ce qui a pu motiver Macky Sall à se sentir obligé de passer des moments avec ce si violent insulteur, d’une grande impolitesse et aux propos aussi malsains que nauséabonds. Si Macky Sall espérait montrer le reniement de Khaliphone Sall aux yeux du monde ainsi que son retournement de veste, il est tout simplement passé à côté.

Une descente aux enfers qui remonte à l’époque Wade

Mais à la vérité, il convient de noter que les dérives verbales ne datent pas de maintenant. Elles se sont durablement installées dans le champ politique. Elles datent de l’époque de Me Wade où certains journaux étaient instrumentalisées pour attaquer, insulter des adversaires politiques et d’honorables citoyens. On était loin à l’époque de l’effervescence des réseaux sociaux que l’on connaît de nos jours. Elle sont devenues si récurrentes et ne sont pas prêtes de s’arrêter tant qu’elles resteront impunies ou punies de manière sélective.

C’est en réalité comme si le pouvoir les bénissait et les cautionnait. Qui ne se souvient pas des propos de Penda Ba dirigés contre les wolofs ; ou ceux de Dembourou Sow qui sont de la même veine. Les dérives ethnicistes n’ont jamais été aussi nombreuses dans l’histoire politique du Sénégal que sous le régime de Macky Sall, dans un pays qui connaît des notions comme le cousinage à plaisanterie. Une stratégie bien maligne pour instaurer le dialogue et pacifier les relations entre Sénégalais d’ethnies différentes. Comment vouloir aujourd’hui détruire tout ce socle et ciment sociaux et culturels ? Le Sénégal est en réalité tombé bien bas avec l’émergence des réseaux sociaux et ces activistes qui n’ont que l’insulte à la bouche.

Comment peut-on laisser les propos extrêmes d’Ahmed Suzanne Camara appelant clairement à tuer Ousmane Sonko, prospérer ? Difficile de savoir pourquoi le procureur de la république ne s’est pas auto-saisi comme il l’a fait dans le cas de Cheikh Mbacké Bara Doly."Tant qu'Ousmane Sonko vivra, il n'y aura pas de paix au Sénégal, il doit être exécuté, parce que c'est un adepte de la violence. Il doit être tué", dit-il. Une incitation au meurtre !

De même lorsqu’il dévoile une information aussi sensible selon laquelle Ousmane Sonko et ses camardes ourdiraient le plan suivant "demain (lendemain de la manif du 8 juin ), à l'issue de leur rassemblement, ou bien au moment où ils le sentiront, Ousmane Sonko et ses camarades comptent aller déloger le président Macky Sall au palais ou chez lui a Mermoz", a-t-il ajouté. "Moi Amath Suzanne Camara, je ne me cache pas, je suis prêt à mourir pour le président Macky Sall et pour la République du Sénégal", a ajouté celui-ci. Difficile de savoir pourquoi un homme devrait-il être prêt à mourir pour un autre homme quand bien même, il serait le président de la république !

Les accusations de Suzanne Camara sont d’une telle gravité et sensibilité qu’il aurait fallu l’interroger pour tenter d’en savoir plus notamment sur ce supposé plan ourdi. A moins peut-être que ces propos ne relèvent que du fantasme de celui-ci où d’un besoin de revenir aux responsabilités, après avoir été longtemps mis à l’écart de la gestion du pouvoir. République de larbins et de courtisans ! Ils ne se battent pas pour des principes républicains, mais pour plaire au Prince.

Dans "l'Observateur" de ce mercredi 15 juin, Ahmed Suzanne Camara a remis ça. Il a fait savoir comme le souligne cet appel à la une qu'il ne regrette pas ses propos contre Ousmane Sonko, ajoutant que ce dernier a "réorganisé sa sécurité" et "prend au sérieux ses menaces" ! Il sait sans doute qu'il ne lui arrivera rien !

C'est tout comme ces attaques dont fait l’objet Ousmane Sonko de la part de Ba Diakhaté sur les réseaux sociaux et les plateaux-télés, ils sont tolérés jusqu'à ce qu'il se fasse attaquer par des propos violents. Ce jour-là à "Jakarloo" Babacar Diagne et le Cnra avaient recadré la TFM pour les propos déplacés du rappeur. Ce Ba Diakhaté, figurez-vous ne se gêne plus de parler du père du leader de Pastef et de son implication dans des affaires peu amènes. Il parle également de la mère de celui-ci.

Ousmane Sonko est un opposant pas tendre, c’est vrai. Il en glisse parfois des propos violents et adresse des messages subliminaux pour menacer le régime. Comme cet appel à l'insurrection assumé. Mais Macky Sall a aussi voulu déloger Wade du palais. Tout comme ce dernier contre Diouf.

Ce sont, à la vérité, des propos violents et insultes qui rythment le champ politique. Comme ces actes très déplorables posés et à travers lesquels l’on peut voir des formes de violence, telles que le débauchage de maires de la coalition YAW, malgré les locales perdues à la régulière par le pouvoir. Ou encore l'audience accordée par le chef de l'Etat à Djibril Ngom, le mandataire de Yeewi Askan Wi, qui avait fui avec les listes. Celui-là dont Farba Ngom a qualifié l’acte de courage ! Des actes qui sont un pied de nez à la démocratie et une atteinte manifeste à l'éthique et la morale.

Que penser d’ailleurs lorsque Farba Ngom déclare sur le plateau d’Aïssatou Diop Fall qu’il « il y’a des actes qu’on pose pour éliminer nos adversaires» ? On ignorait jusqu’ici, sous nos cieux, qu’il y a des armes utilisées pour éliminer les adversaires ! Une déclaration violente aussi.

De même que les signaux émis par cet inconditionnel du président Sall, lorsque l’information a circulé selon laquelle, il se serait fait voler 890 millions pour certains, 250 millions pour d’autres. Peu importe, ce qui est en cause, c’est l’irrespect des lois et la passivité dont font montre les autorités pour une affaire si grave dans un pays en crise et qui fait partie des 25 plus pauvres du monde.

L’impérieuse nécessité de pacifier l’espace politique

Croient-ils finalement que le pays leur appartient ? Ils l’ont en tout cas bien pris en otage, ces hommes politiques. Ils ne sont pas d’accord sur le parrainage alors qu’on est en pleine précampagne, sans que l’on sache vraiment à quoi s’en tenir. Macky Sall a annoncé récemment que les élections vont se tenir à date échue, tandis que la coalition Yewwi Askan Wi reste fidèle à sa décision de mener ses séries de manifestations et a même déposé dès vendredi 10 juin, une demande en vue de l’organisation d’une nouvelle mobilisation populaire le vendredi 17 juin 2022. Benno a même abandonné une manifestation. ça sent le piège pour YAW / WALLU qui espèrent manifester vendredi.

Ce qui veut dire que nous sommes vraisemblablement dans une impasse. Le Sénégal observe un recul démocratique sans précédent et le pays va tout droit vers la dérive si rien n’est fait pour arrêter ce cycle de violences verbales. Les signaux sont en tout cas bien perceptibles surtout au regard de ce qui ressemble aux conséquences d’une faillite morale et éthique qui s'est emparée de la classe politique sénégalaise.

Non seulement, elle n'a plus conscience de ses responsabilités puisqu’elle l’a désertée dans bon nombre de situations, mais elle préfère s’enraciner dans de mauvais comportements, produire de mauvais discours et promouvoir de mauvaises pratiques. L'on est content de voir le camp d'en face se faire insulter et attaquer ; l'on s'offusque lorsqu'on est victimes de ces mêmes mauvaises pratiques. Drôle de conception de l'adversité et de la démocratie ! Ce à quoi on a droit au quotidien, ce ne sont finalement que des discours incendiaires, violents, teintés d’insultes, de manipulations où se mêlent ethnicisme et attaques au bas de la ceinture, voici désormais la règle.

L’avalanche de dérives verbales a bien des explications et elles sont bien simples. Elles trouvent leur fondement dans la pauvreté du débat politique qui n’est en réalité que la conséquence d’un déficit de projet politique, voire un manque d’arguments qui se mue en équilibre de la terreur qui structure désormais le rapport de forces politiques. Rien d’étonnant dès lors d'entendre Ousmane Sonko dire que Macky Sall ne respecte que le rapport de forces.

Mais cela doit-il pour autant pousser la limite jusqu’à brandir des appels à l'insurrection ? C'est en tout cas un jeu bien risqué où on peut se casser les dents ; tout comme une stratégie qui peut se révéler payante. Mais en aucun cas l’accès au pouvoir ne devrait pas être possible qu’à la condition d’avoir manifesté, mené des combats de rue, saccagé et pillé. Cela n’a comme conséquence que d’affecter fortement l’économie et de créer une insécurité aux conséquences non maîtrisées et qui fera du Sénégal un pays pas sûr du tout. Le pouvoir ne saurait non plus être conservé à coups de règles du jeu biaisées d'avance et non respectées par ceux-là même qui les ont érigées.

Le président de la République qui est la clef de voute des institutions pour conserver toute cette harmonie et ordre républicains, doit à ce titre, se montrer le plus exemplaire d'entre nous tous puisqu'il est élu par le peuple souverain. Les opposants qui aspirent au pouvoir ne doivent pas moins l'être.

Nous devons, à la vérité, tous participer à pacifier l'espace politique en nous rendant compte que c'est une classe minoritaire, les politiques qui monopolisent le débat et les ressources de ce pays.

Comment arriver à avoir une classe politique éduquée si les écoles de partis sont mortes de leur belle mort ? Si les idéologies ont disparu et le militantisme ne se fait plus qu’à coup de massification sans le souci de partager les valeurs de la République, la culture politique, l'éthique, le patriotisme et le sens de l'intérêt général ? C’est aussi le règne des coalitions et le triomphe des alliances contre nature. Une sorte de délitement du positionnement politique cohérent qui ne dit pas son nom.

Ce pays a en tout cas bien changé. Dans le mauvais sens du terme. Les acteurs politiques ont changé. Les méthodes politiques aussi. Et le discours baveux révèle tout cela. On l’a répété à longueur d’éditoriaux, mais la répétition n’est-elle pas pédagogique ? Cette mise en scène des injures, la culture de la haine, ce refus des différences et ce dogmatisme digne des âges les plus sombres, n’a rien à voir avec l’esprit du 23 juin 2011.

C’est l’intelligence qui avait pris la place Soweto. Et ce jour-là le quotidien “EnQuête’’ de Mahmoudou Wane avait barré sa Une d’un “Non’’ qui avait fini par transformer le journal en… tract pour "Y en a marre". L’esprit du 23 juin, c’est que ce jour n’est pas tombé du ciel. C’était bien le fruit mûr d’un processus mené avec une très grande finesse par l’opposition d’alors et la société civile. C’est le consensus et l’éthique discursive qui avaient prévalu, loin du bruit. Dans la transpiration à la fois physique et cérébrale. Les Assises nationales, faut-il le rappeler, avaient fini de produire leurs conclusions au terme d’un travail titanesque de franges entières de la société, dans une approche inclusive.

Ce serait donc une très grosse erreur de créer des passerelles fictives entre la situation d’alors et celle d’aujourd’hui. Le tableau présent est, en réalité, aux antipodes de juin 2011. Les plus valeureux fils de ce pays se terrent. Puisque le « terrorisme » est devenu de mode au Sénégal. Le vrai terrorisme, c’est celui-là même qui enfante la censure, casse les langues et les plumes. Il conduit l’intelligence dans une posture dangereuse : la fuite en avant. Plonger la tête dans le noir de la terre, à l’image de l’autruche, pour ne plus voir la réalité. C’est réellement une posture qui s’apparente à une fuite de responsabilité et dont la racine est la peur. Peur de se faire trainer dans la boue des réseaux sociaux. La peur est toujours mauvaise conseillère et ultimement, elle est l’ennemie de la liberté et donc de la démocratie. Et la peur ne garantit point la survie. Le feu peut couver sans qu’on ne s’en rende compte. Et comme il n’a pas de frontière, il peut tout avaler. Même les plus sages