NETTALI.COM - Qu’est-ce qu’on nous a bourrés le cerveau avec ces histoires d’enrichissement illicite et de détournement de deniers publics. Il était question à l’époque de préparer l’opinion avant d’envoyer Karim Wade et de Khalifa Sall à l’échafaud, reconnus coupables qu’ils sont de ce dont ils étaient accusés.

Les deniers des citoyens ont été dépensés dans des commissions rogatoires, des «experts» ont été commis pour débusquer les supposés fonds spoliés, des édifices ont été réfectionnés pour abriter les procès de la Cour de Répression de l’Enrichissement illicite (Crei), sans oublier les exorbitants frais payés aux «avocats de l’Etat», dans le cas de l’affaire Karim Wade et Khalifa Sall. Mais, à l’arrivée, c’est le flou total sur des montants qui seraient recouvrés, puisque c’est de restitution de biens mal acquis dont il était question. La suite, on la connaît, Wade-fils a eu droit à un exil forcé mais en même temps doré qui l’empêche désormais de revenir sur ses terres sénégalaises, étant sous la menace d’une contrainte par corps. Aminata Touré, en tant que garde des sceaux à l'époque, est revenue mardi 8 mars sur le sujet à Walf TV. Selon elle, Karim Wade a une amende à payer, et c’est peut-être ce qui l’empêcherait de rentrer au pays. Un réponse bien brève qui aurait certainement nécessité quelques développements.

Difficile en tout cas de savoir où se trouve Karim Wade à l'heure actuelle. Est-il toujours dans sa prison à ciel ouvert ? Ou serait-il en train de parcourir le monde ? La vérité est que, plus le temps passe, plus il perd en popularité chez ses soutiens, sans oublier les rats libéraux qui quittent le navire pour prendre la direction des prairies marron-beige. Rapprochement avec le pouvoir dans une logique de recomposition de la famille libérale. C'est la division sur la question dans les rangs libéraux.

Mais, qu’est-ce qu’on nous a enquiquinés avec tous ces politiciens épinglés et passibles de poursuites ! L’on découvre plus tard que c’est le coude de Macky Sall qui a empêché leurs dossiers d’être dépoussiérés. Parce qu’à la vérité, la Crei est rangée aux oubliettes depuis qu’on a fini de discréditer cette juridiction caractérisée dans son mécanisme par une inversion de la charge de la preuve qui incombe à l’accusé : l'absence de voies de recours est un autre grief. Une charge de la preuve qui incombe, suivant les principes généraux du droit au demandeur (ou accusateur). Ce qui veut dire que n’importe quel justiciable doit pouvoir faire appel après une 1ère décision, les droits de la défense étant sacrés.

Le paradoxe, c’est que certains de ces mis en cause ont atterri, figurez-vous, dans le gouvernement de Macky Sall, alors qu’ils avaient à un certain moment osé braver l’interdiction de sortir du territoire qui pesait sur eux, puisqu’étant sous contrôle judiciaire. Aujourd’hui, ces mêmes personnes qui ont des dossiers pendants devant la justice, se retrouvent autour de la table du Conseil des ministres.

Le peuple lui continue de se plaindre de la vie chère et d’une existence difficile, éreinté par les loyers exorbitants, les factures élevées d’eau et d’électricité, sans oublier ce coût élevé des denrées qui l'empêche de vivre décemment.  Les politiciens n’en ont cure. Ils ont la tête aux législatives prochaines avant l'étape de la présidentielle de 2024 et cherchent désormais des arrangements pour consolider leurs positions. Comme cette sortie sur RFI et France 24 d'il y a quelques temps au cours de laquelle Macky Sall nous a informés que des amnisties ou réhabilitation vont avoir lieu, sans en préciser la forme, l’essentiel étant qu’elles ne contreviennent pas aux lois. Khalifa Sall, à la suite du président Sall, a aussi prévenu avec assurance, dans les mêmes médias français, qu'il sera candidat en 2024, précisant au passage qu’il n'est demandeur de quelque amnistie que ce soit.

Karim Wade lui, a plaidé pour une révision de son procès. Ibrahima Sène du Parti de l’Indépendance et du Travail (PIT) est d’un tout autre avis puisqu'au cours d'une interview du lundi 7 mars avec Walf quotidien, il a fait savoir qu’une amnistie se négocie et que si Karim Wade et Khalifa Sall en veulent une, ils doivent négocier avec le pouvoir.

Mais à la vérité, ils n’ont tout simplement pas besoin de demander une telle faveur, étant entendu que l’amnistie ne concerne que des faits, et pas des personnes. Seule existe la possibilité de demande d’une grâce présidentielle. Que cela leur plaise ou non, si la loi est votée, ils en bénéficieront au même titre que toutes ces personnes couvertes par le spectre de la loi. Bref, au royaume des amuseurs publics, c’est toujours le peuple qui est endormi. Dans son parti, le rapprochement avec Macky Sall divise, les avis divergeant sur le sujet.

Trois membres d’une même coalition et trois destins à peu près similaires dont le trait d'union est d'avoir tous maille à partir avec la justice. Le pouvoir semble vouloir les tenir avec des affaires en cours et une possible amnistie dans le cas de Khalifa Sall. Ousmane Sonko est l'opposant le plus opposé à Macky Sall. Le leader du Pastef semble ne plus vouloir avoir affaire au président Sall. Ses actes le prouvent. Même le retour triomphal des Lions ne lui a pas fait changer d'avis. Il l'évite comme la peste. Pendant ce temps, Khalifa Sall était en pleine conciliabule à l'aéroport Léopold Senghor avec Macky Sall, le bras autour de l'épaule d’Aïssata Tall Sall, sa sœur du Parti socialiste. De deux choses l'une, soit l’ancien maire de Dakar cache bien son jeu pour quelqu'un que la justice a emprisonné 3 ans durant pour des histoires de caisses d'avance. Pardon de riz. Il semble n’avoir aucune rancœur. Chose étonnante. Il est toujours tout sourire face à Macky, au point que d’aucuns y sont allés de leur suspicion, se demandant s’il ne négocierait pas en tapinois avec le président. L’idée a été véhiculée. Toujours est-il que son compagnonnage avec Ousmane Sonko s’étend aux législatives.

Ce cher président, Macky Sall est bien euphorique par ces temps qui courent. Car, depuis la victoire des Lions, il surfe sur la vague, lance quelques piques à l'opposition qui a fait une percée lors des locales, question de mettre du sable dans le couscous de celle-ci. Une posture qui ne se justifierait pas selon Ibrahima Sène du Parti de l’Indépendance et du Travail (PIT) qui pense que l’opposition a fait basculer le rapport de forces en sa faveur parce que, même si la majorité a gagné la plupart des collectivités, l’opposition a gagné des collectivités stratégiques.

L’ancien compagnon d’Amath Dansokho pense même que désormais, pour gouverner, il faut un large rassemblement. D’où l’intérêt, d’après lui, de l’opposition à négocier avec le pouvoir pour mettre en place un gouvernement d’union nationale. Pour Sène, il suffirait, aux législatives, que l’opposition obtienne 40% du suffrage pour bloquer l’Assemblée nationale. Invitée de Walf Tv, ce mardi 8 mars, Aminata Touré, l'ancien Premier ministre pense d’ailleurs qu’il est plus opportun d’attendre la tenue des législatives avant de nommer un nouveau Pm. En nommer un à trois mois des législatives, ne servirait à rien, selon elle. Un PM qui aurait dû être déjà nommé, la loi ayant été votée. Une situation que certains ont commencé à juger illégale et inconvenable.

Macky Sall qui n’est pas prêt de voir l’euphorie tomber, s’est lui inscrit dans un programme d’inauguration et d’opération de charme. Il a d’abord inauguré le stade Abdoulaye Wade de niveau mondial construit à Diamniadio en un temps record, invitant d’anciens footballeurs et ses pairs. Et récemment, il a inauguré le second tronçon du Train Express régional qui s’étendra de Diamniadio à l’Aéroport international Blaise Diagne de Diass. Un sacré amateur de temps forts ! Il profite un max de cette vague positive. Il a opéré une baisses de prix. Profitant d’une période de grâce, il va se lancer à l'assaut des législatives. Après le "Daaka" de Lédina Gounass (région de Kolda), ce seront les étapes de Kaolack et de Tambacounda sur le même tracé, question de faire d’une pierre deux coups. Au menu, inauguration d’infrastructures et rencontres politiques. S’il y a une chose au moins qu’il aura appris de ces locales, ce sont les limites de la politique alimentaire. Imaginez-vous bien tout l’argent qui a dû être investi entre Dakar, Parcelles assainies, Guédiawaye, Derklé, Médina, Yoff, Kaolack, Ziguichor, etc. Mais à l’arrivée, la coalition «Yewi askan wi» a remporté beaucoup de villes stratégiques.

Macky Sall avec ce joyau de stade et des promesses d’emploi, a lancé une opération de charme à l’endroit des jeunes qu’il voudrait bien arracher aux mains de Barth et Sonko dont l’essentiel du vivier électoral est composé de ces êtres si rebelles. "Yeewi askan wi" entend d'ailleurs occuper le terrain en incitant les jeunes à aller s'inscrire en masse.

Barthélémy est toujours dans l’expectative, attendant le délibéré de son procès en appel dont on cherche à corser sa condamnation à 2 ans dont 6 mois fermes, en 5 ans, après la requalification des faits de coups mortels pour lesquels, il a été déclaré coupable, en meurtre. Il y va de son fauteuil de maire. Voilà plus de 10 ans que ce procès dure. Barth est en effet passé par plusieurs péripéties, mais n’a pas dit son dernier mot.

De même, Ousmane Sonko n'est pas prêt de voir son contrôle judiciaire levé. Il vient d'essuyer un deuxième revers, n’ayant toujours pas été entendu par le juge d’instruction. Mais qu’attend donc le magistrat instructeur ? De deux choses l’une : soit le pouvoir ne sait pas par quel bout prendre l’affaire et se veut prudent ; soit il cherche à jouer la montre, de manière à laisser planer une épée de Damoclès au-dessus de la tête de Sonko. De quoi renforcer la thèse de l’élimination des adversaires gênants. Sans oublier la caution de 15 millions et ce parrainage interdit par la Cour de justice de la Cedeao, mais sans conséquence.

Au finish l’affaire de supposé viol est partie pour davantage polluer l’atmosphère. Car ce qui importe, ce n’est pas la vérité de Sonko, encore moins celle de Adji Sarr, voire même celle de la presse. L’essentiel aujourd’hui est qu’une justice impartiale tranche l’affaire et au plus vite pour rendre le jeu démocratique plus ouvert et moins contraignant, en fixant les uns et les autres sur leur sort.

Et c'est justement au moment où la clameur ressurgit avec la date anniversaire de l’affaire Adji Sarr que saisit Ibrahima Sène pour faire savoir que Macky Sall ne peut être candidat en 2024, estimant que les textes sont clairs. Une sortie après celles de Moustapha Diakhaté, Sory Kaba, Me Moussa Diop, etc. Elle n’a pas laissé indifférent le think thank de l’émergence qui a rappelé à l’ancien compagnon de Dansokho qu’il était hier le plus grand défenseur de Macky Sall. Ce qui manifestement n’a rien à voir avec la question de la candidature. Ils confondent tout. Décidément.