NETTALI.COM - Il est connu que les nouveaux variants de la Covid-19 sont plus virulents et contagieux que la première souche découverte en Chine, en décembre 2019. Pire, selon le professeur Moussa Seydi, dont les propos ont été reproduits par le quotidien Enquête, ils sont aussi mortels chez les personnes âgées que chez les jeunes avec comorbidité.

“Aspects actuels de la Covid-19 et engagement communautaire pour la réponse à la pandémie au Sénégal : leçons apprises de la riposte à Ebola”, a été le thème choisi par l'Académie nationale des sciences et techniques du Sénégal (ANSTS) pour sa conférence virtuelle tenue ce 30 avril 2021. Les panelistes, le professeur Moussa Seydi et l’enseignant-chercheur Cheikh Ibrahima Niang ont livré des communications de haute facture sur la situation de la Covid et les réponses apportés par les communautés pour faire en face.

Ainsi, abordant la question de nouveaux variants, le Pr. Seydi a indiqué que ces derniers sont plus virulents et ont une plus grande létalité. Ils tuent donc plus vite que la première souche originaire de Wuhan, en Chine.

Pire, indique le médecin, ces nouveaux variants de la Covid-19 ont tendance à entrainer des complications fréquentes chez les patients avec comorbidité, comme les personnes souffrant de diabète, d’hypertension artérielle, d’obésité, d’asthme, du cancer, de la forme SS de drépanocytose, de la leucémie, de l’insuffisance rénale chronique, etc.

Toujours, selon le spécialiste, pour les sujets diabétiques, la létalité reste élevée, aussi bien chez les personnes âgées que chez les jeunes adultes. De plus, indique-t-il, ces nouvelles formes de la maladie laissent souvent des séquelles chez patients, comme “la surdité irréversible ou des dysfonctionnements érectiles, etc.”.

Nombre de cas de Covid-19 sous-estimé

En outre, concernant la situation de la Covid-19 au Sénégal, le Pr. Seydi considère que le nombre de cas est parfois sous-estimé, parce que beaucoup de jeunes contractent la Covid-19 et guérissent sans s’en rendre compte. Interpellé sur la baisse du nombre de cas malgré le non-respect des mesures barrières, l’épidémiologiste affirme que cela peut s’expliquer par plusieurs facteurs.

Il y a, d’abord, le facteur climatique qui peut jouer, même si, précise-t-il, c’est durant l’été qu’on a connu la deuxième vague et qu’aux Etats-Unis, ce sont les Etats les plus chauds qui sont les plus touchés. Pour une prévention efficiente, le Pr. Seydi invite ainsi la population à se faire vacciner et les personnels de santé à respecter le délai prescrit pour administrer les différentes doses. “Il est clairement établi qu’avec le vaccin AstraZeneca, il faut rester 3 ou 4 mois entre les deux doses pour atteindre 80 % contre les formes symptomatiques”, a-t-il précisé.

En ce qui concerne la recherche, le directeur des Maladies infectieuses de l’hôpital Fann indique qu’il y a plusieurs recherches en cours sur le domaine, mais qu’il n’y a pas encore de résultats concluants. Le professeur est également revenu, dans son exposé, sur le fameux artémisia de la pharmacopée traditionnelle africaine. “Nous nous sommes soumis à certaines règles et nous n’avons pas des compétences pour étudier ces plantes. Il y a des préalables à respecter pour le faire et c’est tout un processus qu’il faut suivre. Pour l’artémisia, par exemple, une première étude préclinique a été menée, mais elle ne donne pas encore de résultats concluants”, indique-t-il.

“Les découvertes sur la Covid-19 sont importantes et ont amélioré sa compréhension, sa prise en charge et sa prévention. Cependant, ce qui reste à découvrir de cette maladie est tout aussi important. D’où la nécessité de recherche biomédicale constante, avec comme objectif prioritaire la prévention et la prise en charge des cas malades. En tout état de cause, l’engagement politique, professionnel et communautaire reste le trépied sur lequel repose le succès de la lutte contre la Covid19”, a-t-il conclu.

Riposte communautaire

La deuxième partie de la conférence virtuelle de l’Académie de médecine de Dakar a été consacrée à la riposte à la Covid-19, à la lumière des leçons apprises de l’Ebola en Afrique de l’Ouest. Il ressort de l’étude du socio-anthropologue, Pr Cheikh Ibrahima Niang, que si l’Afrique reste le continent le moins touché par la pandémie, c’est parce qu’elle a su remobiliser ses concepts culturels essentiels pour changer les opinions (déni, stigmatisation et refus du confinement). Ainsi, pour éviter les rassemblements, le chercheur a donné comme exemple la décision du khalife général des mourides pour la célébration du Kazu Rajab durant laquelle le guide a donné le “ndigeul” aux disciples de la célébrer chez eux.

Le chercheur a également évoqué les concepts de principe de précaution : “Dina matt, dou matt, “Boul joxe sa loxo” (précaution), “Yaakaar akh moytu” (espoir et prévention)” qui ont été au centre des campagnes de sensibilisation. De même que lors du confinement, il y a eu la solidarité de proximité avec les dons de gels et de kits alimentaires pour faciliter le respect des gestes barrières. Ces gestes typiquement africains ont été, selon le professeur, essentiels dans la riposte contre la Covid-19.