NETTALI.COM- La demande de permission de sortie de prison formulée par Hissene Habré suscite des réactions chez les victimes de l'ancien Président tchadien. Fatima Toumlé, veuve tchadienne, a apporté une réponse salée à l'ex-homme fort de Ndjamena incarcéré à la prison du Cap Manuel suite à sa condamnation à la perpétuité par les Chambres africaines extraordinaires ( Cae).

Fatima Toumlé est une veuve Tchadienne dont le mari a été tué lors du régime de l’ancien président Hussein Habré. Elle a brisé le silence après que ce dernier a formulé une demande de permission pour quitter la prison pour six mois. Fatima Toumlé s’oppose à cette requête de Hussein Habré.

" Vous avez été condamné à la prison à perpétuité par les Chambres africaines extraordinaires pour crimes contre l’humanité, torture et crimes de guerres. Cette peine doit être purgée entièrement. Comme l’a précisé le Comité contre la torture des Nations unies la libération prématurée des auteurs de crimes internationaux les plus graves n’est pas conforme aux obligations du Sénégal », a rappelé la veuve. Qui ajoute : « vous souhaitez sortir de prison pour pouvoir célébrer le ramadan avec vos proches. Mais nous, les veuves des hommes tués par votre régime, cela fait des années que nous n’avons pas eu de ramadans avec nos maris. Le ramadan est un moment très important pour tout musulman, c’est une période de partage, une période de rassemblement de la famille. Cependant, cela fait plus de 30 ans que nos familles sont disloquées. Sans nos maris, sans les chefs de famille, il y a un vide. Nous ne pourrons plus jamais fêter le ramadan avec eux. Et alors que vous nous avez volé plus de 30 ramadans, vous souhaitez désormais célébrer le vôtre en dehors de prison, sans subir les conséquences de vos actes ».

En effet, l’époux de cette dernière était le Secrétaire d’Etat de la Santé. Il a été limogé de son poste quand il a critiqué l’impunité de la garde présidentielle à l’époque. Et, il avait pris la fuite en avril 1987 de peur d’être arrêté par le régime de Habré. Et il n’est plus revenu. Ce n’est qu’un an après sa fuite que sa famille a appris qu’il a été exécuté publiquement. « J’ai appris la nouvelle en écoutant la radio. On ne m’a jamais informé du lieu de sa détention, ni des raisons. Jamais son corps ne m’a été rendu pour faire sa sépulture. Mon mari s’opposait à l’injustice criarde de votre régime », se souvient la dame.

Poursuivant, elle ajoute : « en plus de faire disparaitre mon mari, vous avez saccagé ma maison. D’abord j’ai été interrogée et placée sous surveillance militaire. Puis, des agents de la Direction de la documentation et de la sécurité (DDS) se sont rendus chez moi avec des gros camions, accompagnés de militaires et de gendarmes. Ils nous ont expulsés, moi et mes enfants. Ils ont spolié mes biens. Ma maison a ensuite été donnée à une famille de l’ethnie Gorane. Sans mon époux, j’ai dû me battre pour donner une éducation à mes enfants. Heureusement j’ai été aidé par mes parents, qui nous ont assisté moi et mes enfants, en nous logeant chez eux et en nous apportant leur soutien. Ce n’est que huit ans plus tard que j’ai pu me payer ma propre maison. Nous avons survécu, mais nous avons tout perdu ».

Elle a saisi l’occasion pour demander à Hussein Habré de profiter du ramadan pour enfin payer les réparations dues aux victimes.

Il faut rappeler que les Chambres africaines extraordinaires ont condamné l'ex-President à allouer 82 milliards de francs CFA aux 7 396 victimes de votre régime.