NETTALI.COM  - Sans doute échaudé par les tensions politiques qui ont vu des milliers de jeunes Sénégalais défier son pouvoir dans la rue, Macky Sall tente, par tous les moyens, de draguer la jeunesse. Après son discours du 8 mars, il a remis ça ce 3 avril. Sauf que ses promesses sont difficilement réalisables.

"La fête de l’indépendance, c’est aussi et surtout celle de la jeunesse, dont l’ambition, la force et la vitalité portent nos espoirs de lendemains meilleurs.
Cette fête, jeunes du Sénégal, vous est spécialement dédiée", a dit Macky Sall lors de son discours du 3 avril. Le chef de l’Etat dit vouloir que le 61e anniversaire de l’indépendance du Sénégal soit "le point de départ de nouvelles réponses à vos besoins en éducation, formation, emplois, financement de projets et soutien à l’entreprenariat".

En fait, en annonçant de "nouvelles réponses", le Président Macky Sall reconnaît les limites des politiques de jeunesse qu'il déroule depuis son arrivée au pouvoir en 2012. Même s'il insiste sur les investissements faits ces dernières années. "En investissant massivement dans la réalisation d’infrastructures lourdes, l’Etat a aussi consacré beaucoup d’efforts et de ressources à la création d’emplois et au soutien à la formation, à l’entreprenariat et aux activités génératrices de revenus pour les jeunes", dit-il. "Mais, avoue-t-il, la lutte contre le chômage des jeunes nécessite aujourd’hui un nouvel élan, en raison de la crise économique sans précédent qui affecte tous les pays, développés et en développement." Et c'est à ce niveau que résident de nombreuses interrogations.

En effet, comme il l'avait annoncé le mars dernier, Macky Sall promet "une réorientation des allocations budgétaires à hauteur de 450 milliards de francs Cfa au moins, sur trois ans, dont 150 milliards pour cette année". A l'en croire, ces ressources serviront à financer le Programme d’urgence pour l’emploi et l’insertion socio- économique des jeunes qui sera issu du Conseil Présidentiel prévu le jeudi 22 avril. Réorientation budgétaire certes. Mais de nombreux experts s'interrogent quand la capacité de l'Etat à trouver 450 milliards dans ce contexte de crise économique sans précédent. Mais le chef de l’Etat, lui, semble ne rien craindre. Puisqu'il assure : "Dans l’immédiat, en soutien à l’emploi et aux ménages, j’ai décidé d’allouer, dès le mois de mai, 80 milliards de francs au recrutement de 65 000 jeunes, sur l’ensemble du territoire national, dans les activités d’éducation, de reforestation, de reboisement, d’hygiène publique, de sécurité, d’entretien routier et de pavage des villes, entre autres", souligne Macky Sall. Sauf qu'il s'agit là pour l'essentiel d'emplois précaires dont les salaires dépassent rarement le smic. Le Président étonne d'ailleurs quand il parle d'emplois générés avec le pavage. Pourtant, ce sont les maires qui assurent jusqu'ici le pavage dans leurs communes. C'est également le cas quand il évoque "le recrutement de 5000 enseignants pour le préscolaire, le primaire, le moyen et le secondaire, y compris les Daaras modernes et l’enseignement arabe". Une annonce qui n'a rien d'une performance quand on sait que l'Etat recrute chaque année plus de 3000 enseignants.

Les mêmes interrogations reviennent quand le chef de l’Etat lance un appel au secteur privé à se joindre à "cette dynamique nationale". Macky Sall sait, lui-même, que le secteur privé national déjà à genoux aura du mal à recruter. C'est d'autant plus vrai que malgré l'aide accordée à ce secteur privé pendant la pandémie de Covid-19, les entreprises privées n'ont pas hésité à se séparer de centaines d'employés.

Pourtant, de l'avis de nombreux économistes, l'agriculture peut être un secteur pourvoyeur d'emplois. Et Macky Sall ne s'y trompe pas. "Le gouvernement proposera l’extension de la Convention Etat-Employeurs à la filière de l’agriculture et de l’agro business, pour un objectif de 15 000 emplois à créer, afin de soutenir nos efforts d’autosuffisance alimentaire et de transformation des produits locaux", promet-il. Sauf que convaincre les jeunes Sénégalais à aller travailler la terre est une autre paire de manches.