NETTALI.COM - Ces dernières semaines ont été riches en actualités délirantes relayées par la quasi-totalité de la presse. Mais, que de signaux contradictoires enregistrés !

Tout commence d’abord par la cérémonie de lancement officiel du Programme d’appui à la modernisation de l’administration (Pama), à Diamniadio, du lundi 5 Août au Centre international Abdou Diouf. Le Président Macky Sall pousse un grand coup de gueule : « Malgré les efforts qui ont été faits, nous continuons d’enregistrer beaucoup de dépenses. On a évalué les factures de téléphone de 16 à 17 milliards par an pour les agents de l’administration. Aussi,  de 2012 à maintenant, nous avons dépensé plus de 307 milliards francs CFA pour l’achat de véhicules. Je ne parle pas des entretiens, de la consommation de carburant“.

Des chiffres qui ont fini de donner le tournis même aux plus optimistes du Programme Sénégal Emergent (PSE). Presque 44 milliards en moyenne par an, en achats de véhicules hors carburant ! On croit rêver. Un commentaire qui tombe comme un coup de massue sur la tête des Sénégalais. Une sortie du Président de la République qui finit par ne plus étonner. C’est du déjà vu ces coups de gueule là ! Sur les réseaux sociaux, c’est le déferlement de commentaires d’indignations. Et d’aucuns n’ont pas manqué de s’interroger sur l’opportunité d’une telle sortie.

Un fait qui laisse bien perplexe quant au moment choisi, tant cette réalité budgétivore de l’administration est loin d’être une nouveauté. L’inefficacité de l’administration sénégalaise aussi, c’est connu. Celle-ci dans son fonctionnement, constitue un véritable calvaire pour les citoyens qui vont requérir ses services au quotidien, alors qu’elle est entretenue aux frais de la princesse, et à coups de plusieurs milliards. Toutes les personnes averties savent quand même que les grosses 4 X 4 V 8 conduits par certains d’entre eux, coûtent pas loin de 100 millions de F CFA et « boivent » de l’essence. Macky Sall n’a certainement pas osé pousser son courage que lui attribue le sieur Bakhoum jusqu’à avancer des chiffres sur ce chapitre carburant.

Le fait surprenant dans cette affaire, est que le Président Sall réagit comme s’il venait d’apprendre que le gaspillage des ressources, règne en maître dans l’administration ; comme s’il vient d’exercer le pouvoir alors qu’il est élu depuis 2012. Entre temps  beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Sept (7) ans, ce n’est pas rien ! Mais à dire vrai, Macky est dans les hautes sphères du pouvoir depuis Décembre 2000 en tant que Directeur général de la Société des pétroles du Sénégal (PETROSEN) après plusieurs années au poste de chef de la division Banque de données et conseiller spécial auprès du Président de la République, chargé de l’Énergie et des Mines. Il deviendra plus tard Ministre des Mines, de l’Énergie et de l’Hydraulique, puis Ministre d’État, Ministre des Mines, de l’Énergie et de l’Hydraulique, Ministre d’État, Ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, porte-parole du Gouvernement d’Idrissa Seck. Le 20 Juin 2007, il est nommé Président de l’Assemblée nationale, poste où il va connaître des déboires, lorsqu’il a tenté de convoquer Karim Wade pour une audition sur les travaux de l’Agence Nationale de la Conférence Islamique (ANOCI). Il a quand même roulé sa bosse, ce cher Président !

Comment dès lors comprendre ce constat de dépit, seulement maintenant ? Flagrant délit de populisme, astuce pour amener le sujet du jour ou alors souci de créer un électrochoc ? Cheikh Bakhoum le DG de l’Agence de l’Informatique de l’Etat (ADIE) a tout simplement loué le courage de Macky Sall à l’émission « Grand Jury » de la RFM de ce dimanche, pour avoir osé faire cette révélation ! Il doit en avoir fait rire plus d’un, celui-là !

Mais une fois le constat fait, qu’adopte-t-on comme solution face à ce qu’on ce qu’on considère comme un problème ? Bien sûr qu’il est possible pour Macky Sall de rationaliser les dépenses en téléphone, en carburant et même en location d’édifices au profit de l’administration, si l’on suit la logique de Bakhoum. Mais la vérité est que le Président Sall peut faire beaucoup mieux que de dissoudre certaines agences. Il a par exemple les moyens de résoudre très vite cette équation qu’il se pose en dissolvant le Haut Conseil des Collectivités territoriales (HCCT) et le Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE), institutions créées sous son magistère et qui compte respectivement 150 et 12O membres (80 conseillers et 40 membres associés, personnalités adjointes au CESE pour une durée d’une année renouvelable). Ce qui permettrait d’économiser du coup sur les véhicules, le carburant et tous les avantages liés. Que l’on sache, le HCCT et le CESE n’ont jusqu’ici pas fait la preuve de leur utilité pour ne pas dire efficacité. Bien au contraire avec leur personnel pléthorique, ils ont prouvé leur caractéristique budgétivore. Lorsqu’un jour sur I-Radio, Mamoudou Ibra Kane posa à Ousmane Tanor Dieng,  une question relative à son bilan au HCCT, celui-ci évoqua des rapports produits, des recommandations formulées, etc. Une réponse légitime était dès lors de se demander s’il fallait autant de personnes (150) pour arriver à ce résultat que des économistes consultants auraient pu prendre en charge. Si le HCCT avait quelque utilité, ça se saurait, d’autant plus que le problème des collectivités locales, la question de leur autonomie et l’équation de leurs sources de financement, se posent avec acuité. La vérité est qu’en plus de ces casés politiques, c’est la pléthore de conseillers, de chargés de mission et de membres des cabinets politiques qui vient grossir la longue liste de parasites de la république sans parler du gonflement des budgets.

Nous sommes en réalité arrivés à un stade où les promesses de « gouvernance sobre et vertueuse », semblent avoir atteint leur limite, tant le niveau de gaspillage comme l’a si bien constaté le Président Sall himself, est plus que criard ; de même l’Etat dans la gestion de sa trésorerie, peine beaucoup, par ces temps qui courent et arrive difficilement à assurer ses dépenses, sans oublier bien sûr la dette due aux entreprises qu’il paie difficilement.

Il n y a en tout cas pas que les Sénégalais qui ont du souci à se faire par rapport à la gouvernance du pays. Beaucoup de libéraux eux aussi, sont bien dépités par la gouvernance de leur parti, le PDS. Déboussolés, ils le sont bien par ces temps de renouveau, tant le bateau PDS a des difficultés pour maintenir un cap clair et précis. Il tangue de tous les côtés. Le récent communiqué qui nous apprend le renouvellement du Secrétariat national, n’est pas pour arranger les choses. Il annonce « des changements majeurs apportés avec la nomination de plusieurs secrétaires généraux nationaux adjoints qui auront en charge, la coordination des activités du parti et qui rendront compte directement (ndlr à Me Wade). Les secrétaires nationaux de domaines sont maintenus, mais sont renforcés par des adjoints »

Oumar Sarr n’est plus coordonnateur et N° 2 du parti. Il est dégommé pour avoir participé au dialogue politique initié par Macky Sall contre l’avis de son parti. Babacar Gaye est déchargé de son poste de « Porte-parole et Secrétaire national à l’orientation, aux stratégies chargé des réformes » pour devenir “Secrétaire national, président du Comité national permanent d’organisation”. Me El Hadji Amadou Sall devient porte-parole de Me Wade. Seulement, les deux derniers cités, n’entendent pas l’affaire de cette oreille. Ils ont purement et simplement rejeté ces nominations. Autant dans le cas d’Oumar Sarr, la participation au dialogue politique contre l’avis du parti, a dû jouer ; autant on ne peut comprendre les mises à l’écart subtiles de Babacar Gaye et d’El hadji Amadou Sall qu’on a voulu cantonner à un rôle de porte-parole de Me Wade, véhiculant toutes ses décisions et acquiesçant de fait à toutes ses volontés. Qui est fou ? Que de combats ces deux-là n’ont-ils pas mené d’un point de vue juridique, médiatique et sur le terrain pour plaider la cause Karim Wade ? D’aucuns en étaient même arrivés à se demander comment avec l’envergure qu’ils ont, en étaient-ils réduits à cautionner ce combat dont on savait qu’au finish, il n’allait profiter qu’à Karim Wade ! Par fidélité et affection pour Me Wade sans doute ? Par Devoir de solidarité vis-à-vis d’un camarade de parti, fût il le fils d’Abdoulaye Wade ? En tout cas, ils ont de tout temps répondu, présents.

La posture jusqu’au boutiste du Pape du Sopi qui a toujours été de propulser Karim Wade à la tête du PDS, a certainement poussé Madické Niang, Modou Diagne Fada, Farba Senghor, Pape Samba Mboup, etc à quitter le navire. Le jeu du Pape du Sopi, a été pendant la période préélectorale, des plus obscures et des plus troubles. Aucune lisibilité sur un quelconque cap, mais plutôt de la surenchère politicienne. Le seul message distillé dans ces moments-là, était l’annonce d’une arrivée probable de Wade-fils pendant la campagne, suite à l’invalidation de sa candidature, ce qui privera finalement le PDS de candidat.

 C’est un fait qu’Abdoulaye Wade, ce dinosaure de la politique, cet opposant historique, s’est lancé dans une vaste opération de chamboulement du PDS. Seulement le hic dans l’affaire, c’est que c’est son fils qui devient Numéro 2. Mais si on scrute les nominations à la loupe, on verra bien que dans la plupart des cas, ce sont des proches de Karim Wade qui ont été promus avant même l’organisation d’un congrès. Tout a ainsi fonctionné comme un jeu bien vicieux car les personnalités les plus en vue du moment, ont été nommées à des positions dont on sait qu’ils allaient les refuser.

 Au regard du spectacle qui se joue sous nos yeux, l’on se rend bien compte que Wade n’a jamais abandonné son projet de dévolution monarchique. Accusé dans le passé, de l’avoir entretenu, le Pape du Sopi vient à nouveau de jeter les bases de l’installation de son fils à la tête du Pds. Rien donc de bien surprenant pour cette formation politique qui a fêté le 45e anniversaire de sa naissance, ce 31 juillet. Elle a toujours fonctionné, selon le bon vouloir de son fondateur qui a fait et défait les carrières, au gré de ses humeurs et projets. Un projet qui a été planifié, selon certains observateurs et qui avait prévu dans sa version initiale, de modifier la Constitution pour permettre aux Sénégalais d'élire simultanément, à compter de 2012, un président et un vice-président sur la base d'un "ticket" qui, pour l'emporter, devait recueillir au premier tour au moins 25% des suffrages exprimés. Il nous avait d’ailleurs valu ce fameux 23 juin avant d’être abandonné, suite à une grosse manifestation devant l’Assemblée nationale.

Mais Me Wade n’a pas fait que cela, l’homme qui a toujours voulu mettre son fils sur orbite, a usé de tous les artifices pour libérer son rejeton emprisonné à Rebeuss. Quoi de plus normal, dira-t-on. Mais de là à vouloir l’imposer alors que celui-ci a même perdu ses droits civiques et politiques, et au péril même d’une absence de candidat du PDS à la présidentielle dernière ! Posture extrémiste ou catastrophiste ? Le PDS aura beaucoup perdu.

Karim Wade sortira de prison dans la nuit du 23 au 24 juin 2016. Idrissa Seck sera d’ailleurs le premier à dénoncer «un deal international ignoble» entre les Wade et Macky Sall. Le tout sur le dos des Sénégalais. A Touba, le 24 juin 2016, pour une présentation de condoléances, le leader du parti Rewmi est poursuivi jusqu’à la sortie de la ville par les journalistes. A ces derniers qui l’interrogent sur la libération de Wade-fils, l’ancien Premier ministre déclare : «Le Président de la République (Macky Sall, ndlr), a reçu des ordres de l’extérieur. Comment explique-t-on le fait qu’il (Karim Wade, ndlrsoit libéré en pleine nuit, qu’il ne soit pas passé par Touba et qu’il ait voyagé par jet privé. Un avion l’attendait, de surcroit, à l’aéroport.» Idrissa Seck subit alors un tir groupé des éléments du pouvoir, mais aussi du Parti démocratique sénégalais (Pds).

Pourtant, tout semblait lui donner raison. En effet, moins d’un mois plus tôt, le 28 mai 2016, Macky Sall avait prétexté une journée du dialogue national pour prendre langue avec le clan des Wade. C’est d’ailleurs Oumar Sarr, coordonnateur national du Parti démocratique sénégalais (Pds) que le pape du sopi dépêche à la présidence de la République pour parler au nom des libéraux. Mais pour beaucoup, ce n’était qu’un alibi pour gracier Karim Wade après qu’un accord a été trouvé avec Abdoulaye Wade par l’intermédiaire de l’Emir du Qatar. La suite, on la connaît. Karim Wade sort de prison dans la nuit du 23 au 24 juin 2016. Avant de quitter le Sénégal dans la même nuit pour ne plus revenir. Et voilà qu’on vient de lui offrir un poste de Numéro 2 du haut de sa prison dorée du Qatar.

La semaine dernière a été aussi marquée par une sortie de route du Ministre de la justice. Cette fois, c’est Moustapha Diakhaté, ce non juriste et mais politique qui le reprend. En précisant «Cette disposition de la loi fondamentale relative à la grâce présidentielle, n’introduit aucune discrimination basée sur les délits ou infractions commis par le prisonnier. Elle n’exclut aucun condamné de la grâce présidentielle», souligne Moustapha Diakhaté.

Une grâce en tout cas que Macky Sall traîne comme une patate chaude. L’on a en effet senti une sorte de jeu de cache-cache, des manœuvres souterraines car si d’aucuns ont simplement retenu le principe de la liberté pour la liberté, d’autres ont avancé des arguments selon lesquels Khalifa Sall n’est demandeur d’une quelconque grâce que Macky Sall attendrait pour élargir le prisonnier Khalifa.

Nous ne pouvions terminer cette chronique sans donner un gros carton jaune à Samba Diobène Ka sur qui reposaient beaucoup d’espoir. Fils de Kelly Sadio Ka, notable très connu dans le Djolof, ancien président du Conseil rural (Pcr) de Boulal et ancien Président de la Maison des Eleveurs à Louga, en plus d’être natif du Ferlo, zone pastorale par excellence, l'actuel ministre de l'Elevage et des Productions animales est aussi ingénieur agronome sorti de l'Ecole Nationale Supérieure d’Agriculture (ENSA). Ce dernier a fait vivre le calvaire à beaucoup de Sénégalais qui n’ont pas pu trouver de mouton à sacrifier. Sur les réseaux sociaux, les internautes disent ironiquement qu’il s’est plutôt occupé de l’écoulement des moutons que de l’approvisionnement. D’autres sont allés à des commentaires peu amènes que la décence ne permet pas de reproduire ici. Dans d’autres cas son limogeage est tout simplement réclamé.