NETTALI.COM-Le ministre de l’Environnement et du Développement durable, Abdou Karim Sall, en visite mardi à Khondio, a donné un délai d’un mois et demi aux Industries chimiques du Sénégal (Ics) pour prouver que les 150 m3 de produits, par jour, déversés en mer sont dépouillés de tout élément nocif. Les villageois, eux, en ont profité pour crier encore au secours.

Depuis plusieurs années, les habitants du village de Khondio, situé dans la commune de Darou Khoudoss, vivent un supplice, du fait des produits toxiques issus des Industries chimiques du Sénégal (Ics) qui sont déversés en mer. Ce mardi, informe EnQuête, le ministre de l’Environnement et du Développement durable s’est rendu dans cette partie du département de Tivaouane, pour constater par lui-même les dégâts causés par un tel phénomène. Comme l’avaient fait ses prédécesseurs et même le président de la République Macky Sall, a qui les populations avaient remis un cahier de doléances.

Sur place, Abdou Karim Sall a rencontré les patrons des Ics, les populations et les autorités locales. Une rencontre qui a abouti à la prise de certaines décisions « fortes. » Parmi lesquelles la délocalisation de l’émissaire, le temps accordé aux Ics pour prouver la non toxicité des produits versés dans la mer…

Le ministre : « La visite nous a permis de noter qu’à travers l’émissaire, 150 m3 sont produits par jour. Ils sont convoyés et déversés dans la mer, à travers l’émissaire. Selon les informations que nous avons reçues des Ics, les produits n’étaient pas toxiques et n’avaient pas d’impact sur les populations et l’environnement, d’une manière générale. » Malgré ces assurances, Abdou Karim Sall indique qu’il est demandé aux Industries chimiques du Sénégal d’effectuer des prélèvements, afin « de donner des indications précises » sur la toxicité ou non des produits versés dans la mer.

Ainsi, à l’issue de la visite, des décisions importantes ont été prises et des pistes de solutions dégagées par le ministre. « La première, c’est donner aux Ics la possibilité de délocaliser, au plus tard dans la première quinzaine du mois d’août, l’émissaire. La deuxième solution, c’est de traiter les produits en local, afin de neutraliser totalement les substances que ces produits-là contiennent. Les Ics vont étudier ces deux propositions qui sont sans préjudice du prélèvement que nous avons demandé. Il faut que les Ics prouvent que ces produits n’ont pas d’impact sur la santé des populations et sur l’environnement ».

Selon le ministre de l’Environnement et du Développement durable, si jamais il s’avère que les produits sont toxiques, la première mesure sera « d’arrêter immédiatement de déverser ces produits en mer. On ne cherchera même pas d’autres solutions. Il faut automatiquement demander aux Ics d’arrêter. Nous avons donné aux Ics un délai d’un mois et demi pour qu’elles regardent les deux solutions que nous avons proposées. » L’ancien Dg de l’Artp de poursuivre que l’État va aussi procéder à un contrôle pour confirmer ou infirmer que les produits ne sont pas toxiques.

Khondio ne veut pas que les Ics fassent la vérification

Jadis zone touristique, Khondio a perdu, aujourd’hui, ce caractère précieux. La cause, les déchets toxiques produits par les Ics et déversés directement dans la mer, non loin de leurs habitations.

Selon Issa Kâ, habitant de Khondio, les touristes ont cessé de fouler le sol de leur village, parce que l’environnement est pollué et les gens ne respirent plus de l’air pur. Au plan agricole, ajoute-t-il, les choses ne bougent plus. Aux dires du jeune Kâ, les rendements sont devenus trop faibles, à cause des déchets toxiques qui atteignent la nappe phréatique. Conséquence majeure : le développement économique de leur terroir est plombé par les Ics.

Les populations ont mis à profit la visite du ministre Abdou Karim Sall pour crier leur colère. « Ces déchets toxiques qui sont déversés dans la mer entrainent beaucoup de conséquences sur le plan sanitaire, notamment des maladies respiratoires. Ce n’est pas l’émissaire seulement qui nous pose des problèmes. Il y a également la poussière. Les Ics nous pompent l’air. Cette entreprise nous fatigue. Notre économie est au point mort, à cause des Ics. Ce que le ministre a dit est vrai. Mais il ne faut pas que la mission de vérification soit confiée aux Ics. Parce qu’on ne peut pas être juge et partie », regrette Issa Kâ.

Ruminant toujours sa colère, le jeune étudiant refuse que cette enquête, qui doit déterminer la nature des déchets, soit gérée par l’entreprise incriminée. D’après lui, les Ics ne donneront jamais les vrais résultats dans cette affaire. « Je n’ai pas du tout confiance en eux. Les Ics ne diront jamais que ces déchets sont toxiques et qu’ils peuvent avoir des impacts négatifs sur la santé des populations et des animaux. Il faut qu’on confie cette mission à un expert. Parce que l’entreprise  donnera des résultats en sa faveur », fulmine-t-il.

Ainsi, il demande que le canal d’évacuation des déchets toxiques soit complètement enlevé de leur périmètre. « Ce que nous voulons, c’est qu’on déplace l’émissaire, afin de retrouver notre vie d’antan », martèle Issa Kâ qui a parlé au nom des populations de Khondio.