NETTALI.COM - Invité de l’émission Le Jury du Dimanche sur iRadio, Elimane Haby Kane, président du think tank Legs Africa, a dressé un diagnostic sévère de la gouvernance actuelle. Il pointe des tensions internes au sein du parti au pouvoir, PASTEF, qui rejailliraient sur l’État, et appelle à une refondation méthodique de l’action publique.

« Les tensions internes au sein du PASTEF ont des conséquences sur l’appareil d’État. » C’est par cette déclaration forte qu’Elimane Haby Kane, président de Legs Africa, a ouvert le bal lors de son passage à l’émission Le Jury du Dimanche, diffusée sur iRadio. Selon lui, un malaise profond secoue le parti présidentiel et cette instabilité se propage jusque dans les rouages de l’administration publique.

Face à cette situation, l’expert appelle à un changement radical de méthode : « Il faut sortir de la gouvernance émotionnelle et entrer dans une gouvernance de projection et d’impact », a-t-il plaidé. Pour ce faire, il prône une rupture avec les logiques partisanes, une hiérarchisation claire des priorités, et une ouverture vers des compétences diverses pour construire un projet national cohérent et durable.

Elimane Haby Kane va plus loin dans son analyse en accusant le pouvoir actuel d’agir davantage dans une logique de revanche que dans une dynamique d’inclusion. « Le pays appartient à tous les Sénégalais. Il ne peut être dirigé comme une aile partisane », a-t-il lancé, regrettant une gestion trop idéologique et militante incarnée par le tandem Sonko–Diomaye. Selon lui, leur posture semble animée par la volonté de « reconquérir un territoire » ou de « désincarcérer les institutions » des influences anciennes, sans pour autant proposer un projet clairement structuré.

L’une des préoccupations majeures exprimées par Haby Kane concerne la relation complexe entre le Président Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko. Il estime que le chef de l’État doit affirmer sa centralité et sa légitimité présidentielle, faute de quoi il risque d’être perçu comme dominé par une autre figure de pouvoir. Un tel déséquilibre, dans un système déjà hyperprésidentialiste, serait lourd de conséquences pour la stabilité des institutions.

Autre critique formulée : le repli partisan dans la gestion publique. Kane évoque une méfiance manifeste à l’égard des élites non issues du PASTEF, créant un entre-soi jugé stérile. « Il faut aller chercher les compétences, pas seulement les loyautés », martèle-t-il. Selon lui, cette fermeture freine l’élargissement des forces vives nécessaires pour conduire le chantier de transformation structurelle promis par le nouveau régime.

Haby Kane évoque également des règlements de comptes internes, où des ministres et DG montrent une allégeance marquée à Sonko, qualifié de « plus puissant », tandis que certains proches de Diomaye sont publiquement attaqués pour déviation supposée de la ligne du parti. Ce climat de guerre de positionnement engendre une instabilité politique nuisible à l’efficacité gouvernementale.

Enfin, il alerte sur les conséquences de ces tensions sur l’image internationale du Sénégal. Le risque pays, selon lui, pourrait grimper si cette situation perdure. « La stabilité, longtemps atout majeur du Sénégal, est aujourd’hui fragilisée », affirme-t-il, critiquant une communication officielle brouillée par les divergences entre le président et son Premier ministre.