NETTALI.COM - Le chroniqueur de la TFM, Badara Gadiaga, a évité de justesse ce vendredi à un placement sous mandat de dépôt, à l’issue d’une procédure judiciaire aux multiples rebondissements. Déféré au parquet dans la matinée, il a vu son dossier confié au juge du premier cabinet, après que le procureur de la République a requis l’ouverture d’une instruction judiciaire et le mandat de dépôt.

Dans son réquisitoire introductif, le Procureur de la République a visé, contre Badara Gadiaga,  la diffusion de fausses nouvelles, le discours contraires aux bonnes mœurs, l’offense à une personne exerçant tout ou partie des prérogatives du président de la République et le trouble à l’ordre public prévu par l’article 80 du Code pénal. Sur ce dernier point, il est reproché au chroniqueur « la réception ou la sollicitation de financements, dons ou subsides en vue de mener une propagande de nature à troubler la sécurité publique ».

Ces accusations font suite à des propos tenus par le chroniqueur lors de l’émission Jakarloo sur TFM et relayés sur les réseaux sociaux. Les enquêteurs soupçonnent par ailleurs l’existence de financements occultes transitant par une plateforme numérique dénommée GSIE, que Badara Gadiaga aurait utilisée pour des transferts d’argent depuis son compte bancaire vers son compte Orange Money. L’intéressé a contesté tout financement illicite, expliquant qu’il s’agissait de transactions personnelles.

Face à la gravité des faits et au risque réel d’un placement en détention, la défense de Badara Gadiaga, composée de Mes Baba Diop, Moustapha Dieng, Alioune Badara Fall, Souleymane Soumaré, Aboubacry Barro, Abou Alassane Diallo et Malick Fall, a sollicité un report de l’audience de première comparution, en s’appuyant sur l’article 101 du Code de procédure pénale. Ils ont estimé que les conditions nécessaires à une défense efficace n’étaient pas réunies.

Le juge du premier cabinet ayant initialement rejeté cette requête, les avocats ont pris la décision de boycotter l’audience, quittant la salle et laissant leur client seul face au magistrat instructeur. Ce dernier a alors tenté de convaincre Badara Gadiaga de persuader ses conseils de revenir. En vain.

Après plusieurs discussions et sous la pression de l’absence de ses conseils, le juge a finalement accepté de renvoyer l’audience au lundi 13 juillet 2025.

Cette affaire survient dans un contexte marqué par une série de convocations à la Division spéciale de cybersécurité (DSC), visant des chroniqueurs et influenceurs accusés de propager de fausses informations ou de tenir des discours hostiles au régime. Elle relance le débat sur les limites de la liberté d’expression, sur fond de tensions entre partisans et opposants du pouvoir.

Plusieurs organisations de la société civile et mouvements citoyens, dont La Nouvelle Responsabilité de l’ex-Premier ministre, Amadou Ba, ont exprimé leur inquiétude face à ce qu’ils considèrent comme des tentatives d’intimidation des voix dissidentes. Le mouvement a fermement dénoncé la « banalisation de l’intimidation contre les esprits libres » et rappelé que « la liberté ne se négocie pas ».

L’inculpation sous l’article 80 alinéa 2 du Code pénal est particulièrement lourde de conséquences. Ce texte prévoit des peines sévères à l’encontre de quiconque reçoit ou sollicite des fonds, dons ou subsides pour mener des actions susceptibles de compromettre la sécurité publique ou de déstabiliser les institutions de la République.

Les enquêteurs estiment que Badara Gadiaga pourrait avoir bénéficié de financements occultes dans le cadre de ses prises de position publiques. Des investigations sont en cours pour vérifier ces allégations, notamment via la traçabilité de ses transactions électroniques et le fonctionnement de la plateforme GSIE.

L’audience de première comparution, reportée à lundi, sera décisive. Le juge d’instruction devra statuer sur la suite à donner au dossier : inculpation avec ou sans mandat de dépôt, ou éventuel placement sous contrôle judiciaire. La défense, de son côté, prépare sa riposte.

Toutefois, d’après les incriminations visées prévues par les articles les plus liberticides du Code pénal et du Code de procédure, Badara Gadiaga est plus proche d’aller en prison que de rentrer chez lui.