NETTALI.COM - Depuis plusieurs mois, le climat politique sénégalais est marqué par une série de convocations de leaders d’opinion, sur fond de tensions croissantes entre libertés publiques et gouvernance. Le chroniqueur Badara Gadiaga, le journaliste Madiambal Diagne ou encore l’activiste Ardo Gningue ont tous été entendus par la police, suscitant de vives interrogations sur la place de la liberté d’expression dans le Sénégal d’aujourd’hui.
Dans un contexte de gouvernance fébrile et réactive, où les réseaux sociaux semblent dicter le tempo de certaines décisions, ces interpellations successives ne sont pas perçues comme de simples mesures isolées. Elles traduisent, selon Noo Lank, une volonté de faire taire les voix critiques, de restreindre progressivement l’espace de liberté conquis par les citoyens au prix de longues luttes. “Gouverner ne consiste pas à réagir à chaud à chaque polémique digitale. Gouverner, c’est avoir le sens de la mesure, de la justice et de la responsabilité”, alerte l’organisation qui s’inquiète de cette dynamique.
Le collectif souligne la dérive d’un pouvoir de plus en plus sensible à l’indignation numérique au détriment des principes fondamentaux de l’État de droit. La convocation de citoyens sur la base d’opinions exprimées publiquement, parce qu’elles provoquent une tempête sur les réseaux sociaux, pose la question du respect des libertés garanties par la Constitution. “Ce n’est pas parce qu’une déclaration suscite l’indignation sur la toile qu’elle mérite une sanction judiciaire”, rappelle Noo Lank, appelant à rompre avec une justice perçue comme un instrument d’intimidation ou un exutoire à la colère sociale.
Le collectif rappelle que la liberté d’opinion et d’expression est consacrée dans le préambule de la Constitution sénégalaise ainsi que par plusieurs instruments juridiques internationaux. Ces droits ne doivent être ni conditionnés à une adhésion populaire, ni menacés à chaque discours dissident. La critique et le débat sont l’essence même de toute démocratie.
En appelant les nouvelles autorités à faire preuve de “hauteur, de rigueur et de cohérence” avec les idéaux qui les ont portées au pouvoir, "Noo Lank" exprime une inquiétude de fond : celle d’un retour insidieux des pratiques autoritaires, masquées sous les habits d’une gouvernance nouvelle.
“Ce peuple a trop souffert de l’arbitraire pour que les pratiques anciennes soient reconduites sous de nouveaux habits. La peur ne doit plus gouverner”, avertit le collectif.