NETTALI.COM - Le chef du Gouvernement sénégalais, Ousmane Sonko, a ordonné l’annulation d’un stage de préparation de l’équipe nationale féminine de basketball aux États-Unis. Cette décision fait suite au refus de délivrance de visas à plusieurs membres de la délégation sénégalaise. Ce qui aurait pu relever d’un traitement discret par voie diplomatique s’est transformé en déclaration publique à forte tonalité politique et géostratégique.

Cette posture, perçue comme une escalade, interpelle sur la gestion des différends diplomatiques et leurs implications pour la diplomatie sénégalaise.

Au lieu de saisir les canaux diplomatiques classiques pour contester ou comprendre la décision américaine, le chef du Gouvernement a choisi de rendre publique l’annulation du stage en l’accompagnant d’une adresse politique. En annonçant en même temps la disponibilité de la Chine à accompagner les athlètes sénégalais, Sonko adresse un message clair aux États-Unis : le Sénégal dispose d’options alternatives et ne s’inscrira plus dans une posture de dépendance exclusive vis-à-vis de ses partenaires traditionnels.

Cette déclaration, sur fond de rivalités sino-américaines en Afrique, positionne le Sénégal dans un jeu d’équilibre délicat entre deux puissances. Or, une telle déclaration dans un contexte purement administratif (refus de visas) peut être interprétée par Washington comme une politisation inutile d’un incident consulaire, risquant de refroidir davantage les relations bilatérales.

"L’émotion n’a pas sa place dans les relations diplomatiques. Un simple communiqué du ministère des Sports ou de la Fédération de basket aurait largement suffi pour transmettre cette information selon laquelle le gouvernement a annulé ce stage. Mais malheureusement, on passe du coq à l’âne. On annule le stage, on remercie la Chine, on parle de bourses, puis on ouvre la brèche du Pastef en tant que composition politique…pour finir par une signature : Ousmane Sonko, Premier ministre.
Par ailleurs, les discours épidermiques ne résolvent rien. Un simple appel du ministre des Affaires étrangères aurait peut-être suffi à régler ce problème d’ordre administratif", note un observateur averti.

Sur le plan diplomatique, le Sénégal prend le risque de compromettre des négociations ou projets en cours avec les États-Unis, à l’heure où le pays a besoin d’investissements et de coopération technique dans plusieurs secteurs clés.

Sur le plan symbolique, cette sortie donne à la Chine l’image d’un partenaire de recours privilégié dans la nouvelle doctrine de coopération du Sénégal, ce qui peut agacer d’autres partenaires stratégiques et créer des suspicions sur l’orientation diplomatique du gouvernement.

Sur le plan intérieur, la posture affichée par Sonko s’inscrit dans sa logique de souveraineté affirmée et de rupture avec les pratiques diplomatiques jugées « néocoloniales », renforçant son image auprès de son électorat et des segments panafricanistes de l’opinion.

Il est probable que les États-Unis évitent toute réaction officielle, préférant traiter ce dossier en interne et ajuster discrètement leur coopération bilatérale. Toutefois, cette séquence pourrait ralentir certaines initiatives conjointes en cours ou futures. Côté chinois, cette position publique leur offre une opportunité d’élargir leur influence au Sénégal et d’amplifier leur soft power à l’approche des JOJ Dakar 2026.

Le Sénégal devra donc gérer avec finesse les conséquences de cette déclaration et veiller à maintenir des passerelles actives avec tous ses partenaires stratégiques, en particulier les États-Unis, acteur historique de sa coopération bilatérale.

Ce qui devait rester un simple incident administratif s’est transformé en bourde diplomatique, révélatrice des nouvelles lignes de tension dans la politique extérieure sénégalaise. La posture de fermeté affichée par Sonko, bien que politiquement rentable à court terme sur le plan intérieur, nécessite désormais une gestion diplomatique fine pour éviter des effets collatéraux durables sur les relations internationales du pays.