CONTRIBUTION - C’est l’histoire d’un Coach en fin de contrat, qui essaye de participer à une dernière coupe du monde avec l’illusion de la gagner. Il semble avoir de l’inspiration tirée de son vécu dans un pays de champions. Mais il manque de pratique et d’anticipation qui lui auraient permis d’avoir une équipe de rêve.

Avant-match

L’approche de départ de la configuration de l’équipe ne présage pas d’un résultat positif. Des erreurs stratégiques ont été commises par le Coach, à force d’improviser.

Première erreur : C’est le président de la fédération qui fait office de directeur technique et de Coach. Il veut se donner de la visibilité sans avoir les outils d’un bon coaching. Il ne maitrise ni les règles ni les enjeux techniques. Et naturellement, il s’engouffre dans la voie d’un échec programmé.

Deuxième erreur : Aucune des onze mesures proposées par le Coach ne se projette sur une approche offensive de souveraineté à levier structurel. C’est du saupoudrage pour faire avaler des pilules du lendemain. Les effets sociaux sont éphémères et la crise est durable en perspectives.

Troisième erreur : Le onze est composé de mesures défensives qui ne favorisent aucune stratégie de prise en mains de notre économie. L’objectif du Coach est de limiter les dégâts, de brasser de l’air et de semer l’illusion d’une politique sociale.

Quatrième erreur : Le Sénégal espère gagner la bataille du mieux-être de ses populations en alignant des mesures sans audace, sans ingéniosité, sans autre prétention que de gagner du temps, tirer en longueur et espérer aller aux pénalties au bout du bout de la nuit.

Le onze du coach aurait pu être parfait. Nous aurions pu gagner le match. Mais nous ne la gagnerons pas avec une telle approche. Tant de talents gâchés. Tant d’illusions perdues. Il aurait juste fallu que le coach comprenne les dimensions offensives et défensives des politiques commerciales, pour mieux ajuster son équipe et ses consignes.

Chroniques d’un coaching populiste à la veille d’une compétition perdue d’avance.

1. Le RIZ comme gardien de but

Ce n’est pas étonnant que le riz soit classé comme gardien de but. C’est notre pilier central. Sans le riz comme gardien, nous n’avons aucune possibilité de gagner un match. Sauf que notre gardien de but est doué dans l’art de se trouer. Il a de beaux atours. Il a aussi une si belle présentation au point de devenir patrimoine mondial de l’UNESCO. Mais il ne donne aucune assurance sur sa disponibilité. Il n’est ni sûr ni souverain. Et il cédera toujours devant les assauts indiens et pakistanais. Notre gardien est un talent importé à l’allégeance nationale improbable. Il servira toujours sa patrie originelle en cas de troubles du marché. Il n’est pas fiable. La baisse globale de 50 francs consentie est un aveu d’échec, une mesure sociale minimaliste et une subvention du contribuable sénégalais qui ira enrichir nos amis asiatiques.

2. L’HUILE DE PALME comme latéral droit

Classée comme latéral, elle est placée sur le couloir droit inférieur comme un bouche trou. Elle sait qu’elle n’est pas indispensable à l’équipe. A d’autres moments de lucidité commerciale, nous avons tenté de la protéger pour en faire un vrai talent local. La manœuvre n’a pas abouti. L’huile de palme restera à sa place. Elle ne prendra aucun risque. Elle sait qu’elle fait partie du onze. Mais que personne ne se délectera ni ne désolera de sa présence. Les 100 francs de baisse la concernant sont anecdotiques. L’Etat les récupérera ailleurs à notre insu.

3. Les FRAIS SCOLAIRES ET UNIVERSITAIRES comme latéral gauche

Classés comme latéraux, ils sont placés dans le couloir droit inférieur. L’Etat connait leur force et leur vulnérabilité. Il les met devant le redoutable adversaire du déficit de capital humain. Si ce couloir n’est pas bien fermé, il n’y pas d’avenir pour le pays. C’est un couloir stratégique avec un enjeu vital. Ils sont autorisés à monter et à se montrer plus offensifs. Ils auraient pu gagner le match, à eux seuls. Mais ils n’y arriveront pas. Les efforts sont mal répartis entre l’apport financier de toute la communauté (public) et les efforts privés demandés sans mécanisme compensatoire. Ils sont instrumentalisés de sorte à s’opposer à leurs propres coéquipiers. Le Coach change les règles en cours de jeu et se fourvoie. Ces latéraux-là sont en forme, mais risquent de relâcher leurs efforts à cause des consignes un peu trop frustrants d’un coach en mal d’inspiration.

4. Le LOYER comme défenseur central (Stoppeur)

Le loyer est le défenseur central atypique. Il est toujours présent et tout le monde en parle. Son âge avancé alterne les faiblesses de sa vieillisse et les forces de son expérience. Le coach n’imagine pas un instant le mettre sur le banc, même s’il ne le rassure jamais. Il sera toujours présent. Toujours constant dans ses crises. Toujours anxiogène. Il est dans le match de par son nom, pas pour ses performances. L’équipe dirigeante sait que son défenseur central de loyer ne respectera aucune consigne. Il est là pour frustrer son monde et renvoyer à son équipe l’image de ses propres turpitudes. Il ne gagnera pas de match. Il n’en pas la vocation. Mais il offrira toujours du spectacle aux amateurs de foot du dimanche. C’est déjà cela de gagner.

5. Le SUCRE comme défenseur central (Libéro)

Le sucre est le défenseur central, libéro de son équipe, tour de contrôle de tous les espoirs. Mais il ne s’assume jamais. 52 ans de pseudo-stratégies de positionnement qui ne profitent jamais au collectif sénégalais. Toujours à bout de souffle. Souvent en détresse au point de tendre la perche à l’équipe adverse. Souvent en bisbilles avec ses partenaires locaux qu’il est censé abreuver. Jamais dans le tempo du match. Le sucre sénégalais, dans sa configuration actuelle ne nous fera pas gagner le match. Le changement dont il devrait faire l’objet est si tardif, si hésitant que lui-même joue freins en mains. Il ne renonce ni n’ose. Il est statique et nous fait toujours prendre des buts de dernière minute. Les 25 francs de baisse procèdent de la volonté de maintenir un statu quo non assumé. Ils laisseront percevoir un petit soupir qui s’estompera dans un délai très court.

6. FER LOCAL ou importé comme milieu défensif

Milieu défensif, Il est le remplaçant indésirable qui finit par entrer en jeu à cause des nombreuses blessures sur le terrain. Il peut être national ou importé. Patriote ou dissident. Il est le prototype du bouche trou dont on oublie jusqu’au nom. Le coach ne sait plus si son fer est sénégalais ou indien, chinois ou turque. Il n’a jamais de stratégie pour lui. Pas de consigne claire. Il ne légifère que pour les plus offrants, au mépris des enjeux nationaux, du maillot et de l’hymne national. Notre fer local ou importé devrait être un milieu de terrain tampon, offensif ou défensif en fonction des politiques industrielle et commerciale nationales. Il devrait être dans la peau du joueur multitâches qui oriente le sens du jeu en fonction des stratégies de l’adversaire. Mais en fin de compte, il sera le joueur désorienté qui finira par marquer contre son camp, par la faute d’un mauvais coaching.

7. L’OIGNON comme milieu offensif

C’est le milieu offensif par essence. Le joueur chéri de l’équipe qui est sorti du centre de formation et qui fait la fierté de toute l’équipe. Il est adulé par tous. Il joue tous les matchs, amicaux comme officiels. Il est dans toutes les sauces. Son positionnement stratégique sur le terrain a témoigné de rare fois de la posture patriotique du Coach. L’oignon sénégalais est protégé en cas de nécessité. L’oignon importé n’a droit de cité tant que l’oignon local est en forme. Cela a fonctionné pendant longtemps, jusqu’à ce que les agents de l’oignon importé n’en fassent un joueur délocalisé à essence nationale. Ce joueur jadis performant n’a plus d’identité propre. Il erre sur le terrain sans orientation tactique connue. Il continuera ainsi à errer avec la certitude de rester dans toutes les sauces. Sans saveur ! Les baisses de 100 à 200 Francs qui lui sont appliquées sont la collation de mi-temps qui lui permettront de reprendre la seconde période avec un peu plus de fraicheur, pour mieux s’effondrer dans le money time.

8. La POMME DE TERRE comme milieu défensif

Elle complète le milieu de terrain comme demi défensif. Elle sait pouvoir appuyer l’oignon, mais n’a ni sa notoriété ni son apport. C’est le joueur aux fulgurances gastronomiques intempestives, sans être dans le quotidien vital de l’équipe. Il pourra se permettre d’être transparent sans impact réel sur le résultat final. C’est le joueur qui marquera le cinquième but si son équipe mène déjà par quatre à zéro et il sauvera un but sur la ligne quand son équipe a déjà perdu par 3 à zéro. Il sait qu’à son poste, son coach a renoncé à toute ingéniosité. La baisse de 200 Francs ne changera rien au cours du match. Notre pomme va connaitre son petit intervalle de gloire avant de revenir à son terne quotidien de trompe-faim.

9. L’ALIMENT DE BETAIL comme avant-centre

Il est censé être notre avant-centre, serial buteur décisif et indispensable. Mais de par sa posture, il n’est pas buteur, mais passeur. Il ne nous nourrit pas. Il nourrit ceux qui nous nourrissent. Il faut être subtil pour comprendre son impact. Mais le coach ne l’a pas mis en position d’avant-centre par subtilité. Il l’y a placé par mégarde, en confondant la cause et l’effet. Il ne nous fera pas gagner le match. Il n’en a pas la vocation. Il maintiendra l’illusion d’une chaine de valeur maitrisée, lors même que le bétail nourri ne fait l’objet d’aucune politique publique de souveraineté. On gère l’intendance en attendant la prochaine Tabaski. Et tout le monde s’en accommodera. Les 200 Francs de baisse sont pour la galerie. Aucun but ne sera marqué. Le match sera terne et ennuyeux. Et le tout est à l’avenant !

10. La VIANDE DE BŒUF comme attaquant droit

La viande bœuf est notre attaquant droit. Un ailier qui sait qu’il pourra toujours se recentrer. Elle est censée pourvoir en ballons son avant-centre dans le jeu. Mais ça, c’est seulement à l’entrainement, quand le coach est encore lucide et ne cède pas aux pressions circonstancielles. Dans le vrai de match et pour les jours de devoir de victoire, le coach fera tout à l’envers. L’aliment ne nourrira pas le bœuf. C’est le bœuf qui viendra à sa rescousse. L’ailier ne va pas donner le ballon à son avant-centre. Il tentera des dribbles fofolles qui le mèneront en dehors du terrain. Et il ira délecter les ramasseurs de balles. La viande de bœuf garde son statut. Elle ravit nos familles aisées. Mais elle est devenue folle par les errements d’un coaching défaillant. C’est la vache folle de l’équipe. Le rabais de 200 Francs n’y changera rien.

11. La VIANDE DE MOUTON comme attaquant gauche

Elle est notre attaquant gauche. Un autre ailier qui s’ignore. Pire, elle subit les mêmes errements que son coéquipier de droite qui s’étonne de nourrir ceux qui devaient le nourrir. Contrairement au bœuf, le mouton ne fera aucun effort. Il ratera dix milles occasions de rassasier la masse, mais sera au centre de toutes les attentions une fois par année. Son déficit de consommation quotidienne sera compensé par la ruée massive conjoncturelle qui lui assure son prestige. Il ne se destine pas aux gourmets. Il s’offre aux gourmands. Cet ailier se donne le droit d’être nul à tous les instants, pourvu qu’il marque le but en or dans le money time. Les 200 francs de baisse seront capitalisés pour servir à la dépense unique lointaine programmée de la Tabaski. C’est le destin de l’ailier qui marque un but par saison.

Debriefing

Ce match est perdu d’avance. La compétition ruinée. Mais nous gardons l’espoir qui nous fait vivre. Dans quelques jours, une autre compétition commencera. Avec de vrais joueurs, Un vrai coach, des consignes claires et une légitimité à s’essayer à de nouvelles conquêtes. Nos lions du football nous combleront. Je l’espère. Ils présenteront la meilleure version de notre pays à la face du monde. Nos prières les accompagnent.

Par Ass Abdourahmane DIOUF

Président du Parti AWALÉ

Candidat à l’élection présidentielle sénégalaise de 2024.