NETTALI.COM - La qualification des Lions a été un suspense jusqu’au bout. Il faut en effet dire que depuis ce fameux vendredi du stade international du Caire et cette courte défaite (1-0) face à l’Egypte, les Sénégalais étaient dans l’expectative. Inutile de dire qu’ils ont vécu un week-end et un lundi de stress et d’angoisse, se demandant s’ils iraient au Qatar ou pas. Mais à l’issue de l’épreuve fatidique des tirs au but, ils ont tous poussé un ouf de soulagement. Un match qui aurait dû être plié depuis l’Egypte par nos chers lions. Mais malheureusement pour ces derniers, les Pharaons ont été avantagés par un but offert par un arbitrage bien trop frileux et médiocre.

Sacrés Lions, ils ont réalisé une belle prouesse en battant les Egyptiens en finale de coupe d'Afrique et en qualification de coupe du monde. Une victoire monumentale. Avaient-ils le choix ? C’était vaincre ou périr. Et Aliou Cissé avait décidé de changer d’option, suite aux nombreuses critiques.

Et Cissé changea d’option…

La riposte s’amorçait déjà depuis lundi 28 mars. Cissé prônait désormais l'efficacité, tout en déconseillant de se lancer dans la précipitation, estimant que cette rencontre serait un match difficile, puisqu’avançait-il, « l'adversaire allait se battre pour maintenir son avance. » Le scénario était dès lors simple car il était question de marquer vite ce but, sans trop s’exposer et en encaisser. « Aujourd’hui, la réflexion est de savoir si nous arriverons à marquer plus de buts en jouant avec plus d’attaquants. Ce n’est pas garanti. », s’interrogeait le coach Cissé, tout en répondant en nuançant : « mais dans l’animation, il faut qu’on arrive à emmener les ballons dans la surface de réparation, qu’on arrive à combiner et nos combinaisons ne sont pas mal ».

Il ne pouvait point oublier l’autre talon d’Achille des Lions, Cissé. Les balles arrêtées. Il fallait obligatoirement voir comment les négocier.

La veille de match fut un grand moment de surenchère verbale. Car, à l’heure de la guerre psychologique, Cissé comme Carlos Queiroz y sont allés de ses déclarations. Mais à ce jeu, c’est le Portugais qui était le plus prolifique. Il avait brandi ses 45 ans d’expérience, estimant qu’il ferait des miracles si on lui laissait seulement 5% de possession de balle. Réponse d’Aliou Cissé, moins bavard en général : « Je suis jeune, mais pas moins compétent ». Et bien d’autres propos…

Le but matinal tant espéré par Aliou Cissé, se produira avec l’entrée de Boulay Dia qui semblait plutôt destiné à chauffer le banc des remplaçants. Un but similaire à celui du match aller, même si les faits montreront plus tard qu’il s’agissait là d’un hors-jeu avec ces images assez explicites circulant sur les réseaux sociaux. Bref c’était trop tard.

La presse toujours la première à critiquer quand il le faut, surtout le presse écrite, dont les écrits restent, s'est réveillée en chœurs, mercredi 30 mars pour saluer la qualification des Lions. Pas un seul titre n'a dérogé à la règle, rivalisant de styles et de superlatifs pour qualifier cet exploit. Comme les titres en arabe du journal « Le Mandat » avec « Ila Qatar », ou celui de l’As avec « Ahlan bikum fi Qatari » ; celui du « Quotidien » et de « l’Observateur » avec ces calembours : « Les Lions sans tiquer » et « mieux vaut Qatar que jamais » ; même le wolof n’a pas échappé à la titraille avec celui du « Vrai journal » : « Door Dooraat »

Des critiques constructives en somme bien accueillies par le coach Cissé qui n'a pas manqué d’adresser, en conférence de presse, des remerciements aux supporters et à la presse pour l'avoir critiqué et poussé à revoir ses copies. De quoi apprécier sa nouvelle tendance à l’ouverture, signe d'une humilité et d'un entraîneur désormais à l'écoute. Toutes ces critiques étaient dans le fond fondées. Comme son fameux système avec trois milieux défensifs devenu inopérant si on se fie aux résultats des dernières sorties ; ou encore le maintien de Gana Guèye, joueur le plus capé avec 92 sélections et qui reste un titulaire indiscutable, bien qu’il ne convainc plus.

Cissé est en effet réputé entêté et enfermé dans ses convictions défensives vues comme de la frilosité. Ce qui n’est pas faux. La phrase qu'il a prononcée lors de sa conférence de presse, est rassurante. Ce qui signifie que l'essentiel a été d'être à l'écoute de ce public composé aussi, pas que de profanes en la matière et qui avaient des choses à dire. Ce qui ne veut point dire qu'il était tenu de les suivre à la lettre. Mais en fin de compte, ce qui était important, c'était d'opérer les changements appropriés et d'arriver à ce résultat positif.

En s'inclinant par 1-0 au Caire, lors de la manche aller des barrages de la coupe du monde Qatar 2022, l'équipe nationale du Sénégal était dos au mur. Fidèle à son 4-3-3 réputé défensif, Aliou Cissé a été obligé de revoir ses plans pour venir à bout des Pharaons. En tout cas, son changement tactique a été fructueux. En effet, les Lions se sont mieux exprimés dans ce 4-2-3-1 que le schéma tactique de la manche aller, au Caire. Avec des couloirs bien gérés par Ismaïla Sarr et Bouna Sarr, le duo Sadio Mané - Boulaye Dia s'est exprimé dès le coup de sifflet de l'arbitre. En bon renard de surface, l'attaquant de Villarreal ouvre la marque à la 3ème minute. Une entame de match parfaite pour les champions d'Afrique.

L'autre aspect non moins négligeable dans cette partie, reste le mental. Un aspect où les Lions du Sénégal ont souvent été dominés. Malgré les deux situations inconfortables (ne pas gagner dans le temps réglementaire et la séance des tirs au but), les Lions n'ont pas douté. Comme lors de la finale de la Can, les partenaires de Bamba Dieng ont y cru jusqu'au bout.

L’appui du public était tout aussi appréciable. Les milliers de supporters qui ont pris d'assaut les gradins dès les premières heures de la matinée, ont transformé le stade Abdoulaye Wade en un véritable et bouillant chaudron. Autant dire que le public a entendu les appels de Cissé et Abdou Diallo.

Les Egyptiens, mauvais perdants

Mais qu’est-ce qu’elle est amère la défaite pour les dirigeants égyptiens qui se sont montrés si peu sportifs qu’ils ont annoncé avoir déposé une plainte contre leurs homologues sénégalais. Sur sa page officielle, la fédération égyptienne de football soulignait ainsi que son équipe a été exposée au racisme après l'apparition de panneaux insultants sur le terrain du stade, en particulier à l’endroit de Mohamed Salah. Ils ont aussi ajouté que les supporters sénégalais «ont terrorisé les joueurs en leur jetant des bouteilles et des pierres pendant l'échauffement.». Les auteurs de la plainte ont affirmé détenir des photos et des vidéos jointes à la plainte.

De quoi se demander de qui se moquent les fédéraux Egyptiens ? Il convient de souligner que beaucoup de vidéos et d’images, montrent à quel point les joueurs sénégalais ont été malmenés avec les lasers et les insultes racistes (« kalboun » voulant dire « chien » en français, des « fuck you Sadio Mané », des insultes adressées au joueur vedette) et l'hymne national du Sénégal chahuté. Diomansy Kamara dans une vidéo parle tout simplement d'"arroseur arrosé" estimant que les supporters ont insulté Sadio Mané, utilisé des lasers sans oublier ce but hors jeu et demande à ceux là qui parlent de mauvais accueil des Egyptiens, de remettre les choses dans leur contexte. Aux journalistes européens qui se disent scandalisés par le comportement des Sénégalais, se demandant s'il ne faut pas rejouer le match, il leur a demandé de mieux mettre en valeur les joueurs africains et de faire mieux leur travail en se déplaçant sur le continent au lieu de donner des leçons de morale sur les plateaux télé.

La victoire est difficile à avaler pour ces Egyptiens battus à deux reprises aux séries de tirs de but. Mais, il s’agit surtout de garder un esprit sportif. Mais qu’est-ce qu’il est difficile de jouer avec ces Egyptiens qui n’hésitent pas le moins du monde à casser le jeu en simulant des blessures ? Ils n'hésitent pas non plus à tenter d’influencer les arbitres et toutes les occasions de contact sont utilisées à cet effet. Mais c’est mal connaître cet arbitre algérien, - droit dans ses bottes qui a géré le match avec beaucoup de sérénité, contrairement à cet arbitre congolais de l’aller – que de croire qu’il allait tomber dans le piège égyptien. Au royaume de la tricherie, ces joueurs Egyptiens sont passés maîtres dans l’art de la simulation et de l’influence.

Une attitude de la Fédération Egyptienne de Football très différente en tout cas de celle de l’entraineur Carlos Queiroz qui a non seulement démissionné, mais a avoué dans la foulée que Cissé est bien meilleur que lui. Queiroz a en tout cas mis fin à toutes les rumeurs et annoncé son départ en ces termes : « J’espère que cette équipe pourra dignement représenter le continent africain au Qatar. Il est temps pour moi de laisser la direction de l’Egypte à quelqu’un d’autre. Aujourd’hui, mon rêve était d’amener l’Egypte pour la cinquième fois à la Coupe du monde, mais, c’est Cissé qui s’est qualifié avec le Sénégal. Juste quelques mots gentils pour les joueurs et je les félicite pour le match qu’ils ont joué. Le jeu est terminé. Malheureusement, nous n’avons pas réussi à atteindre la Coupe du monde. Tout est fini et il n’y a pas grand-chose à dire ».

Des améliorations possibles, de nouvelles arrivées aussi

Mais au-delà de la victoire qui est belle, vouloir gâcher la fête, est un combat perdu d’avance. Mais quel régal que de voir Youssouph Sabaly jouer ! Il a été impeccable dans toutes ses actions. Un match parfait, devrait-on dire. Qu’est-ce qu’il nous a manqué, avec le recul, ce cher Sabaly ! Son retour est tout simplement salvateur. Absent à la coupe d'Afrique des nations en raison d'une vilaine blessure, le défenseur du Betis Séville qui a retrouvé son couloir droit, a été d’un très grand apport sur le plan défensif comme offensif. Force est ainsi de reconnaître que la défense a tenu bon. Kalidou Koulibaly a été fidèle à lui-même. Il a été impérial et semble avoir retrouvé la plénitude de ses marques ainsi que sa ténacité. Tel un robot qui exécute sa mission sans le moindre sourire, toujours impassible ! Calme et discipliné tactiquement, Papa Abou Cissé n'a pas tremblé devant Salah.

Que penser de Nampalys Mendy, ce travailleur acharné, discret qui récupère des balles, infatigable et si efficace ? Il a souvent noyé Gana Guèye dans ce milieu à trois, ce dernier prouvant par là qu'il était plus à l'aise dans un milieu à deux.

Quant à Edouard Mendy, le gardien du Sénégal, il a fini de rassurer dans ses cages et est passé un cran au-dessus en devenant un as des tirs au but. Et Sadio Mané, qui oserait le présenter ? Il a démontré qu'il est devenu ce meneur d’homme lorsque la situation devient critique. Il pète la sérénité et la confiance au moment de tirer le pénaltys au point même que Neuer le souligne. C’est en effet une lourde responsabilité que de tirer les pénaltys de la délivrance, malgré ce raté de la finale de la coupe d’Afrique qui ne l’avait point refroidi. Il a été, contrairement à son rival de Liverpool, d’un apport décisif pour le Sénégal.

Des joueurs comme Saliou Ciss, devraient davantage être plus attentifs à leurs relances, leurs centres et leurs passes. Il a de plus en plus une fâcheuse tendance à les rater. De même que Bouna Sarr doit rectifier le tir quant à ses passes et montées, lui qui nous a habitués à bien mieux que cela.

Ismaêl Sarr s’il est un peu plus appliqué, peut nous valoir beaucoup de buts après. Il a en effet raté deux belles occasions qui auraient pu nous épargner cette séance bien stressante de tirs aux but.

Aliou Cissé a en tout cas du pain sur la planche. Il a un effectif de qualité, mais aussi pléthorique de bons joueurs sans oublier cette réserve de joueurs aux portes de l’équipe nationale. Il a encore du temps pour intégrer et enrichir son effectif car des spécialistes de balles arrêtées, il en manque. Pape Matar Sarr qui excelle dans ce domaine, ne joue presque jamais. Son maigre temps de jeu ne lui permet pas d'étaler sa palette technique sur cet exercice qui demeure un éternel chantier pour Cissé. Des joueurs comme Sofiane Diop, Boubacar Kamara, Ferland Mendy, Ilimane Ndiaye ou encore Malang Sarr pourraient booster davantage la sélection sénégalaise qui après l'Afrique, ira à la conquête du monde.

Mais difficile de savoir pourquoi Cissé n’explore du côté des joueurs locaux ? Intégrer par exemple. le meilleur buteur du championnat, Bouly Junior Sambou par exemple du Jaraaf, actuel meilleur buteur de la ligue 1 avec 9 buts ; Ngagne Fall aussi de « Génération Foot » son suivant avec 7 buts. Il reste encore du temps et les matchs amicaux devront être choisis avec soin, dans le but d’avoir des adversaires de qualité qui permettront de tester des styles de jeu différents. Lors du dernier mondial, le Sénégal a été éliminé, suite à un nombre de cartons jaunes plus importants. L’objectif ultime, ne devrait pas dès lors, d’être de sortir du 1er tour, mais de faire mieux que Bruno Metsu. Et pourquoi pas d’aller encore plus loin lorsqu’on a cet effectif de rêve dont dispose Aliou Cissé. Il suffit juste de savoir les faire jouer.