NETTALI.COM - Difficile de savoir quel était le projet de Pape Amadou Sarr, le désormais ex-délégué général à l’Entrepreneuriat rapide des femmes et des jeunes (Der/FJ) ? Plaire aux femmes à l’occasion de la célébration de la Journée internationale de la femme ? Si c’était le but, il est raté. Il a surtout raté l’occasion de se taire, ce cher Pape Amadou Sarr.

Dans un discours aux fortes allures blasphématoires et populistes, il avait tenu à s’attirer la sympathie des femmes. Seulement, il a choisi le mauvais angle de tir, les mauvais exemples et les mauvais mots. On peut bien évidemment plaider contre la maltraitance des femmes, s’activer pour la lutte contre la discrimination faite à des femmes. Mais, de là à sortir pareilles inepties pour défendre la femme, Pape Amadou Sarr s’est tout simplement attiré les foudres de l’opinion et a desservi la cause des femmes. On ne s’amuse pas avec la religion, surtout si l’on ignore jusque dans ses fondements et l’esprit des textes.

A la vérité, Sarr a fait feu de tout bois, versé dans l’amalgame et les confusions, prêtant à des textes religieux, des contenus qui n’y existent pas, suivant la manière dont il les a présentés. Il aurait pu avoir la décence de citer les textes avec exactitude, dans leurs principes, leurs nuances et exceptions, plutôt que d’en faire faussement part et en plus, hors contexte. Il n’est pas donné à tout le monde d’être un exégète, capable de traduire et d’interpréter les textes coraniques.

Dans une vidéo devenue virale, celui-ci a, en effet,  soutenu des propos suivants devant une assistance de femmes qui buvaient visiblement ses paroles. « Je ne comprends toujours pas qu’au XXIe siècle au Sénégal, qu’on puisse sortir encore des inepties telles que non, ce n’est pas possible, non, elle ne peut pas serrer la main du marabout, du vieux et elle ne peut pas être dans la même salle. Et pourtant le soir, comme quelqu’un me dit, elle peut bien serrer beaucoup plus que la main. D’autres incongruités, je dis que je vais être provocateur, subsistent encore telles qu’elle ne peut pas travailler, elle ne peut pas avoir le même salaire qu’un homme avec qui elle a fait les mêmes études, elle a le même diplôme, la même expérience. Je suis outré et choqué quand j’entends dire encore dans le Sénégal des profondeurs, elle ne peut pas être propriétaire de terres. Je pense que les choses sont en train d’évoluer ; ou elle ne peut pas hériter ou quand elle hérite, elle a 1/3 ou 2/3, parce que les hommes ont plus que les femmes. Ce n’est pas acceptable pour moi. Etre au-dessus des hommes, au sens propre ou figuré, s’assoir derrière l’homme, si ce n’est pas la pièce d’à côté pour ne pas déranger les hommes ou encore salir ou souiller les lieux, car elles ne sont pas propres. Tiens donc ! C’est la même femme qui est impropre qui vous fait à manger, qui vous sert à manger et qui partage votre lit le soir. »

Il a provoqué et a récolté ce qu’il a semé. Difficile de savoir à quoi il a servi de s’appesantir sur le fait que des femmes ne puissent pas serrer des mains d’hommes, alors que Amadou Sarr sait pertinemment que dans ce pays, en majorité peuplé de musulmans, énormément d’hommes musulmans serrent les mains de femmes, même s’il y a, par ailleurs, une minorité qui refuse de le faire pour des convictions personnelles. N’est-ce pas un acte de liberté que de ne pas vouloir serrer la main d’une femme et vice-versa ? Que fait-il des femmes qui refusent de leur propre gré de serrer les mains d’hommes ? De même, l’on peut s’interroger sur le rapport qu’il cherche à établir entre le fait de serrer une main et ce qui se passe dans l’intimité d’un foyer, le soir. Pape Amadou Sarr a tout simplement agi par méconnaissance des textes religieux et en a payé le prix.

Le droit des femmes, voilà un concept original aux yeux de certains, mais importé de l'occident. Il fait des émules sous nos cieux. A chaque date anniversaire, soit le 8 mars, parées de tenues faites pour l’occasion, elles se réunissent et se réjouissent dans les entreprises, des associations et des groupements pour faire des plaidoyers en faveur du respect du droit des femmes, en attendant l'année suivante. Et si on interroge un peu l’histoire de ce pays qu’est la France, cette puissance coloniale qui nous sert de référence, il y a 78 ans, que les femmes ont acquis pour la première fois, le droit de vote, soit en avril 1944, après l'instauration du suffrage universel masculin, en 1848. Presque un siècle s’est écoulé entre les deux dates. Sous nos cieux, de ce que l’on sait, les femmes ont toujours voté.

Le Sénégal est hélas ce pays si poreux à tous les souffles qui viennent d'occident, pays de nos anciens colons qui nous administre chaque jour des leçons de révolution sociale, comme si nous ne devions pas savoir faire nos propres choix, en fonction de nos réalités sociologiques, culturelles, us et coutumes ainsi que nos croyances. Dans ces pays là qui nous imposent d’évoluer dans leur sens, il y a pourtant un fort vent de combat contre l’Islam, la polygamie et bien d’autres de nos réalités qu’ils ne veulent voir prospérer sur leurs terres, pourquoi voudraient-ils alors voir leur vent souffler sous nos cieux ? Sur la question de l’homosexualité par exemple, la pression est si forte pour nous imposer de la légaliser. Aussi, les voies et moyens d’arriver à leur fin, n’est-elle pas de passer par les canaux médiatiques et de loisirs ?

La colonisation et aujourd'hui le néocolonialisme un peu plus subtil, ont ceci de pernicieux. Ils inoculent ce venin de partout pour déstructurer les croyances, les réalités sociales et surtout culturelles avec une logique d’imposer la vision du monde de l’occident. Comme lorsqu'est imposée cette parité qui paraît si formidable, mais en même temps si contradictoire dans son fondement. Elle laisse sur le bord de la route, tantôt une masse de femmes plus compétentes que des hommes, tantôt une masse d’hommes plus compétents que des femmes. Tiens tiens, la galanterie, cette autre trouvaille qui veuille qu'on réserve tous les honneurs aux femmes, qu'elles ne refusent pourtant pas. Et cette discrimination positive qu’on veuille imposer en faveur des femmes ? Il n’est pas logique de vouloir tous les avantages de la vie sans des inconvénients qui vont avec.

Dieu sait qu'il y a des femmes qui souffrent dans leurs ménages et leur vie de tous les jours. Mais, de là à ériger cet état de fait en généralités… En réalité, il existe aussi beaucoup d’hommes bien éreintés par le poids des responsabilités de chef de famille et devant assumer seuls ces charges familiales : entre la dépense quotidienne, le loyer et autres factures d'électricité, d'eau, frais médicaux et de scolarité etc qui pèsent sur leurs épaules, ils s’en sortent difficilement sous le regard parfois indifférent de femmes salariées qui ne décident de participer aux charges familiales, dans la majorité des cas, que selon leur bon vouloir. Elles sortent toujours l’argument selon laquelle la charge familiale incombe à l’homme, tout en déniant à ce dernier la puissance paternelle qui lui est conféré.

Combien de ménages ont été brisés pour des raisons bassement économiques parce que l'homme ne satisferait pas suffisamment aux besoins du ménage ou ne céderait pas aux moindres caprices de la femme ? Culturellement, toutes ces charges reposent sur les épaules de l’homme. Mais rien n’empêche, cela dit, qu’un couple trouve une parfaite entente dans le sens d’organiser le ménage comme cela lui convient.  Surtout que l’homme n’oblige pas son épouse instruite à être femme au foyer, ce qui donne à cette dernière les moyens de son indépendance financière.

Qu'on ne s'y trompe point, les femmes sont aujourd'hui partout, aussi bien dans les forces de sécurité que dans les hautes sphères de décision. Il serait malhonnête de laisser croire qu'il existe une conspiration anti-femme de la part des hommes, ou une institutionnalisation de la discrimination dans le but de les rabaisser ou de les placer sous tutelle. Il se trouve juste que les humains sont les produits de leurs cultures et éducations et qu'une société se fonde entre autres sur ces facteurs, même si elle peut combattre ses éléments rétrogrades ou dégradants.

Vouloir emprunter les réalités d'une autre, relève tout simplement d'un manque de repère et d'un complexe d’infériorité qui ne dit pas son nom. Il convient dès lors de bâtir nos sociétés en restant nous-mêmes, plutôt que d'écouter ces voix qui viennent d'ailleurs, murmurer à nos oreilles.

Pape Amadou Sarr, tel l’imam Sall, a fait une sortie de route en ratant l'occasion de se taire. Il a cédé aux sirènes du populisme en versant dans le blasphème et en remettant en cause des fondements d'une religion qu'il ne doit pas bien maîtriser, puisqu’il la décrit si maladroitement en mettant en parallèle des situations nocturnes entre maris et femme et des situations sociales. L'islam est une religion qui impose des droits et des devoirs aux hommes et aux femmes dans le couple. Libre maintenant à chaque couple de s'organiser dans l'intimité de son foyer, comme cela lui convient. C'est la raison pour laquelle, il était inutile pour le désormais ex-délégué de mettre les pieds sur un terrain aussi glissant où même il ne trouvera pas toutes les femmes pour être en accord avec lui. Il y a des pas qu’un être censé ne devrait point se permettre de franchir, surtout en remettant en cause la croyance des autres, la religion devant rester une affaire strictement privée.

Sarr a appris à ses dépens qu'il y a des choses qui ne se disent pas. Une affaire qui tombe malheureusement pour lui, quelques jours seulement après la sortie de route de l’Imam Sall et après celle de Gaston Mbengue. Les dérives commencent à être décidément bien nombreuses.

Sur les ondes de la RFM, le désormais ex patron de la DER s’est ’excusé. « J’ai tenu des propos qui ont choqué des populations, notamment les religieux. Je présente mes excuses. En tant que musulman, je n’avais pas comme objectif d’attaquer la religion encore moins les guides religieux. J’ai commis une erreur et je présente des excuses », s’amende-t-il, non sans remercier le président de la République pour lui avoir fait confiance. Des excuses qui arrivent bien trop tard, mais qu’on peut entendre et accepter.