NETTALI.COM - Les 25 prévenus, dans le cadre de l’enquête sur le massacre de Boffa-Bayotte, ont entamé, hier, à la Maison d’arrêt et de correction (Mac) de Ziguinchor, une nouvelle grève de la faim pour dénoncer leur longue détention préventive et exiger, dans les meilleurs délais, l’ouverture d’un procès juste et équitable.

Depuis hier, et pour la troisième fois, le journaliste René Capain Bassène et 24 autres présumés auteurs du massacre qui a fait 14 morts et 7 blessés, le 6 janvier 2018 dans la forêt de Boffa-Bayotte (département de Ziguinchor) entament une nouvelle grève pour s’indigner de leur longue détention préventive.

En effet,  ils sont en prison depuis quatre ans. Ils exigent l’ouverture d’un procès “juste’’ et “équitable’’. En avril et en juillet 2021, ils avaient entamé le même mouvement d’humeur avant de le suspendre, parce que le magistrat instructeur leur avait donné des gages quant à la diligence de leur dossier. Las d’attendre, et après tant d’années de détention préventive nourries de combats contre le stress, de désespoir pour les uns, d’espoir pour les autres, d’amertume, d’isolement et de solitude, les 25 détenus ont décidé, d’entamer une nouvelle grève illimitée de la faim. En l’absence, faut-il le souligner, de leur co-inculpé, feu Seyni Sané, le désormais chef de village de Toubacouta décédé en prison. Leurs parents et proches se sont donné rendez-vous, hier matin, à la Maison d’arrêt et de correction (Mac) de Ziguinchor pour témoigner et apporter leur soutien à René Capain Bassène et à ses codétenus qui démarrent leur diète.

A l’annonce de cette troisième grève, la semaine dernière, le porte-parole du collectif des familles des personnes détenues, Sékou Bodian, avait indiqué que cette fois-ci, leurs parents ne feront aucune concession. Mieux, ils “ne renonceront pas à leur grève qu’après engagement ferme des autorités compétentes quant à la tenue du procès’’.

“Il y a beaucoup de mensonges qui entourent cette affaire et nous voulons, comme eux, être édifiés’’, avait, en avril dernier, déclaré Mame Diarra Sané du village de Toubacouta qui a payé un lourd tribut dans cette tragédie. Mame Diarra est aussi la fille du défunt chef de village Seyni Sané décédé en prison à Dakar, quelques mois après la mort de sa femme. “J’ai aussi deux de mes frères parmi les inculpés. Chez moi, il n’y a plus d’hommes. On nous a fait valser entre Ziguinchor et Dakar. Trouver une autorisation de visite à nos parents relève parfois d’un véritable parcours du combattant. Nous sommes fatigués’’, avait-elle déploré. Outre le soutien à leurs parents, ils demandent tous l’ouverture d’un procès pour en finir avec ce dossier. ’’J’accepte mon destin et le sort réservé à mon mari. On ne peut pas mettre des gens en prison depuis bientôt quatre ans sans les juger. C’est injuste. S’il existe des non-dits dans ce dossier, il faut oser le dire. Nous familles des détenus, nous vivons des moments très difficiles. C’est pour cette raison que nous réclamons l’ouverture d’un procès juste et équitable’’, a déclaré Odette Victorine Coly, l’épouse du journaliste René Capain Bassène considéré comme le cerveau de cette tuerie. Elle souligne que son mari veut être jugé pour révéler au monde entier tout ce qu’il sait de ce dossier.

Pour rappel, c’est le dimanche 14 janvier 2018 que 15 individus du village de Toubacouta, à une dizaine de kilomètres au sud de Ziguinchor et le journaliste René Capain Bassène, en charge de la communication à l’Agence nationale pour la relance des activités socioéconomiques en Casamance (Anrac) ont été conduits à la Mac de Ziguinchor. Ils sont poursuivis pour association de malfaiteurs, participation à un mouvement insurrectionnel, tentative d’assassinat, détention d’armes sans autorisation administrative, coups et blessures volontaires, vols en réunion. Le juge d’instruction, après les avoir inculpés, les a placés sous mandat de dépôt. Neuf autres avaient été libérés, “faute de charges suffisantes’’. Le même jour, une délégation judiciaire prise par le juge d’instruction a permis l’interpellation de huit autres personnes qui lui ont été présentées le mardi 23 janvier 2018 avant d’être inculpées et placées, elles aussi, sous mandat de dépôt.