NETTALI.COM - Les tournées économiques que mène Macky Sall à l’heure actuelle, sont-elles juste liées à son rôle de chef de l’Etat ? Beaucoup pensent en effet, qu’il ruse et qu’il ne préparerait rien d’autre que les locales en vue de la présidentielle future. Aussi, les tenants de cette thèse croient savoir qu’il tâte le pouls du pays profond. Le journaliste Abdoulaye Mbow n’est pas lui de cet avis. Aussi, a-t-il décidé de s’en tenir à ses propos d’antan qu’il a évoqué à l’émission « 90 minutes Chronos» sur la Sen TV. A savoir que ce mandat pour lequel, il (ndlr- Macky Sall) rempile , serait son second et dernier.

Eh oui, « le ni oui, ni non » a encore de beaux jours devant lui. Mais, toujours est-il que Macky Sall, le chef de parti et président de la République, déroule sa stratégie que lui seul semble avoir bien mûri dans sa tête, même si d’autres en savent quelques bouts. Après Kaffrine, Tamba et Kédougou, le président Sall doit ainsi visiter la partie nord du Sénégal du 12 au 19 juin 2021, notamment les régions de St-Louis et de Matam. Il a informé en conseil des ministres du mercredi 2 mai, de la tournée qu’il effectuera afin d’évaluer les investissements publics réalisés et engager de nouveaux programmes de développement territorial. Un Conseil Présidentiel et un Conseil des Ministres sont à cet effet prévus à Matam. Auparavant, Macky Sall a souligné que cette tournée «révèle, plus que par le passé, la nécessité d’une gouvernance de proximité et d’une territorialisation soutenue des politiques publiques, afin d’asseoir l’équité sociale et territoriale ».

Admettons, mais des tournées qui sonnent comme une campagne électorale avant l’heure, ce d’autant plus que c’est l’occasion pour le chef de parti qui ne sait pas s’il va se lancer ou non, d’inaugurer quelques chantiers, de tester sa popularité, tout en faisant des réglages sur le terrain politique. Ce d’autant plus que sur cette terre Ndoukoumane, Abdoulaye Wilane et Abdoulaye Sow, autre politicien pur jus, issu du mouvement associatif récemment propulsé ministre après un passage au Coud, s’y mènent une guerre sans merci.

Le secrétaire général national du Parti démocratique sénégalais (Pds), Abdoulaye Wade, a bien flairé le jeu de « son fils » Macky, étant  son maître en politique. Il ne compte pas se tromper cette fois-ci, après son retentissant appel au boycott de l’élection présidentielle de 2019.

Dans une décision administrative de parti signée de sa main, il a ainsi acté la mise en place d’une commission nationale de préparation des élections locales. Dans un délai d’un mois, celle-ci devra rendre un rapport à sa direction sur les moyens de préparer activement ces joutes et de la meilleure manière possible pour le PDS de remporter ces rendez-vous du début d’année prochaine.

Une task force composée de 24 éléments regroupera de grands responsables politiques du PDS, notamment le président du groupe parlementaire « Liberté et démocratie », Cheikh Bara Doly Mbacké, le député Toussaint Manga, secrétaire général national chargé de la santé et de la lutte contre les épidémies ou encore de Lamine Ba, secrétaire général adjoint chargé des cadres. Une équipe dirigeante est à ce titre chargée de coordonner le travail et sera présidée par Daouda Niang, secrétaire général national adjoint, rapporteur du collège des secrétaires généraux nationaux adjoints. Il sera secondé par trois vice-présidents que sont, dans l’ordre établi, Mamadou Lamine Thiam, secrétaire général national adjoint chargé des élus locaux et président de l’association des maires et élus locaux, Doudou Wade, secrétaire général national adjoint, chargé des conflits et Abdoulaye Racine Kane, secrétaire général national adjoint, chargé des finances et trésorier général du parti. Un rapporteur a également été désigné, en la personne du Dr Cheikh Dieng, secrétaire général chargé des structures et des mouvements de soutien.

De quoi augurer d’affrontements avant l’heure surtout que le désaccord sur l’audit du fichier électoral et un certain découpage territorial, subsiste au moment où, pour une meilleure transparence des élections au Sénégal, la société civile juge nécessaire de détacher la Direction des élections du ministère de l’Intérieur. Le Collectif des organisations de la société civile pour les élections (COSCE) a fait, mardi, 32 recommandations en vue de l’amélioration du fichier électoral sénégalais.

Pendant ce temps, le ministre de l’intérieur Antoine Diome trace sa route. C’est la question du découpage territorial qui a soulevé une polémique ces derniers temps, qui continue à être au-devant de la scène. Celui-ci est ainsi monté au créneau pour fournir des explications. « Il n’y a pas d’incohérences dans la cartographie avec le nouveau découpage », a dit-celui-ci, avant d’ajouter : «le découpage administratif obéit toujours à une logique de cohérence territoriale, mais également d’efficacité dans l’action administrative pour une meilleure prise en charge des préoccupations des populations. C’est donc dans ce cadre qu’un décret a été pris le 28 mai par le président de la République. On y retrouve les spécificités de ce que va comporter ou de ce que sera l’actuel département de Keur Massar ».

Ndiagne Diop (commune de Bambilor) jusque-là très hostile à ce découpage pour s’être senti lésé au profit d’Oumar Guèye, semble revenu en de meilleurs sentiments puisqu’interrogé par EnQuête, il a semblé bien conciliant. «Moi, je suis un démembrement de l’Etat. Donc, je dois assumer tout ce que fait l’Etat. L’Etat, c’est moi ; donc, je dois considérer que c’est moi qui ai fait le découpage… ». Une attitude qui s’apparente à celle d’Abdoulaye Wilane qui, acculé à Kaffrine par Abdoulaye Sow, a semblé ne pas vouloir aller à l’affrontement, préférant s’en remettre aux décisions de l’autorité. Il avait auparavant jeté quelques cailloux dans le Macky avant de se ressaisir.

De quoi taire des querelles pour le moment en attendant que Macky Sall arbitre. Mais des affrontements à venir eu égard aux rivalités entre membres de même parti ou d’une même coalition, notamment à Kaolack, dans le nord et presque dans toutes les localités.

Mais toujours est-il que même une entente entre politiciens au niveau local, ne pourra éviter au découpage, d’engendrer des problèmes entre les états-majors politiques. Ce sont des milliers d’électeurs qui seront obligés de se réinscrire sur les listes, lors de la prochaine révision, au regard du nombre important de primo-votants et du temps imparti en plus bien limité. Antoine Diome  a lui, une autre lecture de la situation. Il compte sur l’expérience de l’administration électorale pour venir à bout de ces écueils. Se pose également une autre question, celle de la répartition des députés par département. Autant de désaccords qui vont se poser comme défis à relever et équations à résoudre.

Au même moment, l’équation «Boy Djinné» a été résolue par la gendarmerie. Le fugitif a occupé l’actualité ces derniers temps avant que le tragique accident des agents de « leral.net » ne vienne attrister tout le Sénégal. Le célèbre prisonnier s’était en effet évadé de la prison du Camp Pénal, le 30 mai dernier. Une évasion, la 12 ème de suite qui a donné lieu à toutes sortes de commentaires et de fantasmes sur de supposés pouvoirs mystiques du détenu. Interviewé par ITV,  Baye Modou Fall avait déclaré avoir posé cet acte pour exiger son jugement. Boy Djiné avait dit ne pas comprendre que ces genres de dossiers soient classés depuis des années, sans évolution. Une affaire qui vient poser la question des longues détentions qui aboutit à augmenter la population carcérale et l’engorgement des prisons. Mais la parade de Boy Djinné n’aura duré que 4 jours, la gendarmerie l’ayant intercepté alors qu’il était en partance pour le Mali.

Il fera face à la justice. Une justice qui est rythmée ces derniers jours par une affaire d’affrontements sans fin. La posture de Me Babou n’a pas du tout plu à l’Union des magistrats du Sénégal (Ums) qui s’est fendu d’un communiqué pour la dénoncer. Cette dernière est, en effet, très en colère contre l’avocat et plus que cela, elle demande que des poursuites soient engagées contre lui. Elle l’accuse d’avoir tenu, lors d’une audience, des propos outrageants à l’endroit d’un parquetier et d’inciter à un soulèvement. Une position que ne partage, toutefois, pas Me Babou qui s’en défend.  « Je ne laisserais personne piétiner ma foi et mes croyances religieuses ». A l’en croire, ce dernier, a cité nommément Serigne Touba et a refusé de retirer ses propos. Lesquels ont, selon ses dires, touché l’assistance. Me Babou préfère en effet mourir que d’être piétiné dans sa foi de talibé mouride.

« Sous prétexte de son appartenance à la communauté mouride et au mépris des règles élémentaires de courtoisie et de respect qui prévalent au sein de l’institution judiciaire, (Me Babou) a tenu des propos outrageants à l’endroit du représentant du Parquet, à qui il a imputé des propos sortis de sa seule imagination », soulignent les magistrats avant d’ajouter «plus grave encore, il a incité l’assistance au soulèvement en jouant sur la fibre sensible des fidèles mourides et tenté de livrer le magistrat à la vindicte populaire ». « Non content d’avoir troublé gravement l’audience, manqué de respect au pouvoir judiciaire, incité à la violence et mis en danger la vie d’autrui, il a persisté dans son dessein subversif en se rendant devant les médias pour soutenir sans aucune indication concrète, que celui-ci avait tenu des propos injurieux ou outrancier à l’égard de Serigne Touba », accusent encore Souleymane Téliko et ses collègues. Qui, « condamnent fermement ces actes inqualifiables qui, au-delà de l’offense particulièrement injuste faite au collègue concerné, constituent un affront fait à l’institution judiciaire dans son ensemble ».

Un communiqué de l’Ums conforté par le compte-rendu du parquetier en question adressé au Procureur de la République. Dans celui-ci, le substitut Mamadou Saïdou Diao fait savoir à sa hiérarchie qu’il avait demandé à l’un des prévenus si l’argent qu’il avait versé à son co-prévenu, représentait un « Addiya » à l’endroit de son co-prévenu. A l’en croire, Me Babou, constitué pour la défense, l’a interrompu au motif que sa question était attentatoire à la dignité du « Mouridisme ». D’après  toujours le parquetier, face à son refus de retirer sa question, il y a eu un incident d’audience. Ainsi, au cours de la passe d’armes entre lui et Me Babou, ce dernier l’a apostrophé et l’a indexé en lui lançant « tu es qui ?». Et lorsqu’il lui a fait remarquer qu’il n’avait aucune injonction à lui donner, l’avocat s’est permis de l’insulter et il a répliqué dans les mêmes termes.

Autre face à face, c’est la procédure en diffamation opposant Souleymane Téliko au journaliste Madiambal Diagne et évoquée ce jeudi  3 juin, au Tribunal de grande instance de Dakar. Le président de l’Union des magistrats  sénégalais ( UMS) a en effet initié une procédure. Il n’a pas apprécié la sortie de Madiambal Diagne l’accusant d’avoir encaissé doublement l’argent de l’Union européenne et celui du gouvernement tchadien, lors d’une mission au pays d’Idriss Deby. Une accusation contre laquelle s’est inscrit en faux Souleymane Téliko les qualifiant de contrevérités. Un face à face qui avait été renvoyé le 6 mai dernier.

Un procès qui a vu Madiambal se faire accuser d’acharnement contre le juge Téliko. Ce qui fera dire au journaliste qu’ « il s’est érigé en défenseur de la justice puisque selon lui, le magistrat a l’habitude de porter atteinte à l’honorabilité de la justice » . Mais, il n y a pas que cela puisqu’il a été aussi question du lapsus de Madiambal. Ce dernier a en effet estimé avoir voulu parler du « rapport de l’Union Africaine ». Pour conforter sa déclaration, il précisera même : « je dispose du rapport des chambres de l’Union Africaine. Le nom de Souleymane Teliko figure dans le rapport et les montants qu’il doit rembourser ». Une allégation battue en brèche par les conseils de la partie civile qui lui ont signifié que l’Union Africaine n’a pas fait de rapport allant dans ce sens. Ce qui a conduit à un revirement du prévenu qui a  déclaré avec fermeté : « Je me suis fondé sur une correspondance officielle, à la demande du ministre qui dit que les envoyés spéciaux ont reçu indûment de l’argent qu’ils doivent rembourser ». Sacré Madiambal. Il faut bien qu’on sache de quoi il parlait !

A l’issue des plaidoiries, ce sont 500 millions de francs Cfa de dommages et intérêts que réclame Souleymane Téliko. Les avocats du président de ce dernier qui ont plaidé la condamnation du journaliste, demandent que la décision à intervenir soit publiée dans différents journaux avec le paiement d’une astreinte de 20 millions de FCFA par jour de retard. Avant de formuler ces demandes, la quinzaine de conseils constituée par Souleymane Téliko qui se sent diffamé par le patron du Groupe Avenir Communication ont lancé des vertes et des pas mûres à ce dernier, le qualifiant « de mercenaire de la plume ».

Me Abdou Dialy Kane et Me Baboucar Cissé, commis d’office pour défendre Madiambal Diagne, ont de leur côté jugé la procédure nulle et n’ont pas plaidé au fond. « Comment une juridiction répressive peut entrer en voie de condamnation dans une citation où aucune disposition du code de procédure pénale n’a été citée. La poursuite de l’organe, à travers ses dirigeants, est indispensable. Dans la cause, le prévenu dit qu’il n’est ni l’auteur de l’article ni le propriétaire du support. Il ne peut être poursuivi qu’en qualité de complice”, a souligné Me Abou Dialy Kane. Avant que Me Baboucar Cissé ne prenne la parole pour s’interroger : « On est en matière de diffamation ; c’est le délit de presse. Il est prévu par le code de procédure pénale. Et aucune disposition du code n’a été citée dans la procédure ».

Le juge tranchera, comme il reviendra aux Sénégalais de trancher en dernier ressort, si jamais Macky Sall venait à vouloir briguer un 3ème  mandat en 20 24, au mépris de ses promesses.

 

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