NETTALI.COM - Ce que l’on avait prédit a finalement bien eu lieu. Et c’est donc sans surprise que l’immunité parlementaire d’Ousmane Sonko a été levée, malgré la foire d’empoigne dans l’hémicycle, les vociférations de Guirassy, l’indignation de Cheikh Mbacké Bara Doly ou encore le sermon d’Aïda Mbodji. La majorité parlementaire a dicté sa loi. Elle est mécanique non ?

Aïda Mbodji relèvera d’ailleurs au passage, une incohérence sur les confidences du ministre de la Justice, par rapport au ressenti du président de la République. Celle-ci s’est en effet étonnée du timing de l’annonce de Me Malick Sall, au chef de l’Etat, se demandant « au cours de quel conseil des ministres », il (ndlr- Malick Sall) « a donné la nouvelle au président de la République » puisque « le 9 février (journée lors de laquelle le ministre a été saisi par la lettre du procureur) était un mardi, n’est pas un jour de conseil, car celui-ci se fait les mercredis ». Auparavant  le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Me Malick Sall avait indiqué que c’est lui, « à titre personnel, en tant que garde des Sceaux, qui a informé le chef de l’Etat en conseil des ministres après avoir reçu un message du procureur général qui lui  envoyé la copie de la plainte déposée à la gendarmerie. », ajoutant qu’il a  « immédiatement transféré cette information au chef de l’Etat. », tout en assurant que « sa réaction était une réaction de désolation et de compassion. » Bref.

Toujours est-il que cette séance de levée tenue à huis clos, restera dans les annales de l’Assemblée nationale. C’est une ambiance sécuritaire qui n’est pas loin de rappeler celle du 23 juin qui a été tout simplement rééditée. Même le soir de la levée de l’immunité, les barrages de la police étaient plus importants que ces jours précédents d’allégement du dispositif. Les alentours de l’hémicycle ont en tout cas été bien quadrillés par les forces de l’ordre. Et Moustapha Niasse, le président a eu toutes les peines du monde  à maintenir une cordialité entre les députés des différents groupes parlementaires, à l’intérieur. A chacun, son interprétation du règlement intérieur. Soit pour dénoncer la procédure menant à la plénière, soit pour la justifier.

Au même moment Guy Marius Sagna qui a fait face au juge, vendredi,  a été placé pour la 3ème fois  sous mandat de dépôt par le doyen des juges. Assane Diouf et Clédor Sène ont été eux, renvoyés à la Division des investigations criminelles en attendant lundi et la présence de leurs avocats. De toute façon, le réquisitoire introductif adressé au Doyen des juges concernant Assane Diouf et Clédor Sène ne laisse aucune chance à ces derniers. Le juge d’instruction devra suivre les réquisitions de Serigne Bassirou Guèye qui a requis le mandat de dépôt.  Ils ont été appréhendés, suite à la fuite d’un audio.

Ainsi, après les 19 manifestants, tous sous mandat de dépôt dont un seul mineur inculpé et placé sous contrôle judiciaire, une information judiciaire a été ouverte pour « association de malfaiteurs, provocation aux crimes et délits, organisation d’un mouvement insurrectionnel ». Un dossier criminalisé en d’autres termes.

D’autres arrestations ont suivi au même moment à l’Ucad, à Touba et ailleurs. 5 jeunes étudiants de Pastef ont été arrêtés et placés en garde-à-vue, dans la matinée, dans les locaux du commissariat de Point-E, soupçonnés qu’ils sont d’avoir fomenté un projet de troubles à l’ordre public, au sein du campus social ou ailleurs. Un important matériel destiné à mettre en œuvre leur présumé plan a été découvert dans leurs chambres.

Dans l’après-midi, ce fut au tour des dames dudit parti d’avoir maille à partir avec les forces de sécurité, avec à leur tête, la présidente des femmes de PASTEF, Maïmouna Dièye, scandant des “Macky dictateur’’ dans un concert de casseroles et autres ustensiles, pour se rendre chez leur leader. Au total, ce sont 17 femmes de Pastef qui ont été interpellées, selon nos infos. Me Khoureissy Ba n’a pu s’empêcher de parler de rafle.

C’est une sacrée bonne élue du peuple qu’est cette brave dame Mame Diarra Fam. Si les Sénégalais ont pu suivre la plénière qui a eu lieu à huis clos, c’est bien grâce à la ténacité de la députée de la diaspora Mame Diarra Fam. Attention, Me El Hadji Diouf a de la concurrence. Celle-ci a en effet retransmis en direct sur les réseaux sociaux, la rencontre à l’Assemblée nationale, malgré l’opposition du président de l’Assemblée nationale Moustapha Niasse, mis au parfum d’une telle retransmission.  « A plusieurs reprises, des députés ont fait des directs des plénières sur les réseaux sociaux. Je prends toutes mes responsabilités », a répondu la femme qui se fait souvent remarquer par ses coups d’éclat et une propension à dire tout haut ce qu’elle pense. Une manière d’assumer son acte. Une situation dénoncée par Bamba kassé du Synpics qui l’a considérée comme « une atteinte à la liberté de la presse ».

Quelques rares journaux ont fini de porter Ousmane Sonko disparu. Mais surveillé comme du lait sur le feu, difficile d’imaginer comment il pourrait échapper à une traduction de force devant le juge d’instruction, malgré sa volonté de ne déférer à une quelconque convocation. En tout cas sa dernière sortie était un véritable baroud d’honneur car n’ayant pas épargné même les juges d’instruction et du parquet devant statuer sur son cas. Tel un animal blessé, il avait fait feu de tout bois.

Pendant ce temps la vaccination contre la Covid se déroule tranquillement. Un silence vite perturbé par la sortie de Macky Sall qui menace d’offrir les vaccins aux pays africains qui en ont besoin. Avant de tempérer par un « j’espère qu’on n’en arrivera pas là ? » Sauf qu’en fait de vaccin, non seulement, il n’y a pour l’instant que 200 000 doses dédiées aux personnels soignants de 1ère ligne et aux malades pour les 16 millions de Sénégalais que nous sommes. Des propos qui ne font que braquer davantage les réticents, même si on est loin du moment où on arrivera à cette étape de la vaccination de masse. De quoi venir voir. Mais après tout l’argent pour acheter ces vaccins, que l’on sache, provient des deniers des Sénégalais.

Toujours est-il que des autorités étatiques et religieuses ont déjà plongé dans cette campagne de vaccination. Coup médiatique ou pas ? A Mbour où celle-ci a démarré vendredi, Me Oumar Youm, ancien ministre de Macky Sall a  invoqué une clause de conscience qui l’empêche de prendre une dose de vaccin, en sa qualité de maire ou d’autorité, alors la population qui l’entoure reste encore vulnérable à l’infection. Bref de quoi libérer de la place pour quelqu’un d’autre qui a envie de se faire vacciner.

Pendant qu’Ousmane Sonko semble, sauf miracle, filer tout droit vers le bureau du juge d’instruction, Macky Sall est sur le front social. Il a annoncé, lors d’un conseil présidentiel sur les 100 000 logements, aux bénéficiaires, la disponibilité de 1000 à Bambilor, Fatick et Kaolack dans le second semestre 2021. Des logements qu’il veut « offrir » à 12 millions aux Sénégalais à revenus modestes ou irréguliers. L’offensive de l’armée sénégalaise en Casamance est vue par Salif Sadio comme une violation de l’accord de paix.

Bref une ambiance bien électrique, alors qu’une autre grande équation reste toujours en suspens ? La question est dès lors de se demander si nous sortirons indemnes de ces équations que sont l’affaire Ousmane Sonko et le 3ème mandat ? Le député Déthié Fall, de Rewmi d’idy ne voit dans les actes posés que « des pas significatifs dans le sens de la dictature ». Affaire à suivre.