NETTALI.COM – La polémique sur la 3e candidature de Macky Sall pourrait cacher une vaste manœuvre politicienne, visant machiavéliquement à préparer le dauphin du président de la République. C’est ce que semble théoriser Mamadou Diop Decroix.

Soupçonné de vouloir briguer une 3e candidature, Macky Sall, contrairement à ce que laissent penser les apparences, pourrait, à travers cette polémique, installer les cancans sur une fausse piste, au profit d’un dauphin caché.

C’est en tout cas la suspicion légitime que porte Mamadou Diop Decroix, qui n’est pas né de la dernière pluie en politique.

En clair, invité de l’émission « Face2Face », ce dimanche, le leader de And Jëfe s’interroge : « Est-ce que Macky Sall n’est pas en train de cacher son candidat ? » « Attention, la politique est plus subtile que cela ! Il peut orienter l’opinion vers une fausse piste, pousser ses adversaires à épuiser les munitions en tirant sur lui, tout en épargnant le dauphin », laisse-t-il méditer. « Pour moi, invite-t-il à éviter de se faire distraire, les gens doivent s’attendre à tout et se préparer en conséquence ». « Encore une fois, c’est le peuple et non la justice qui va régler ce problème », mentionne l’invité de la Tfm.

De l’avis du député, cela pose encore, avec acuité, le débat sur l’avenir des institutions que les colons ont léguées aux Etats africains, relativement à la séparation des pouvoirs. Il pense que le parlement est trop inféodé au pouvoir exécutif. « On doit dépasser ce constat. Tout est parti de Léopold Sédar Senghor. Le président Mamadou Dia, en tant que président du Conseil de gouvernement, avait la réalité du pouvoir dans le cadre d’un régime parlementaire. Après la crise de 1962, Senghor a pris tous les pouvoirs jadis dévolus à Mamadou Dia. Depuis lors, il n’y pas une réelle séparation des pouvoirs. C’est le système post-colonial qu’il faut revoir », remonte-t-il la genèse de cet imbroglio.

Il a cité l’exemple du président du Niger, avec le président Issoufou qui a dit qu’il ne va pas briguer un 3e mandat, tout en changeant la constitution pour que son principal challenger, Hama Hamadou, ne puisse se présenter. Même chose en Côte d’Ivoire où Alassane Ouatara a manœuvré à la florentine pour écarter Guillaume Soro et Laurent Gbagbo.

Toutefois, l’ancien ministre du Commerce sous le magistère du président Abdoulaye Wade, qui intègre la perspective d’une candidature du chef de l’Etat sortant en 2024, se réserve : « Macky Sall est un monarque républicain. Le roi du Maroc n’a pas plus de pouvoirs que lui. C’est le peuple qui doit écrire la Constitution et non les constitutionnalistes. Quiconque croit que le Conseil constitutionnel va s’opposer à une volonté de Macky Sall de briguer un 3e mandat, doit se détromper ! Le Conseil constitutionnel ne va jamais s’y opposer. Prenez le cas de la Côte d’Ivoire, où c’est le même président du Conseil constitutionnel qui a déclaré la victoire de Laurent Gbagbo dans un premier temps, qui va revenir pour changer d’avis et attribuer la victoire finale à Alassane Ouattara ».

Réagissant à la lettre ouverte de Doudou Wade au président de l’Assemblée nationale Moustapha Niasse, Mamadou Diop Decroix dira que « c’est une lettre qui a de la profondeur ».

« Doudou Wade a raison. C’est quelqu’un qui connait bien le règlement intérieur de l’Assemblée nationale. L’assemblée n’est pas en session, elle est en vacances. C’est pourquoi le président de notre groupe parlementaire Cheikh Bara Doly Mbacké a écrit au président Niasse pour faire convoquer une session extraordinaire aux fins d’auditionner les ministres sur la question des inondations ».

Pour rappel, dans une lettre ouverte partagée dans ces colonnes cette semaine, l’ancien président du groupe parlementaire libéral, Doudou Wade, a interpellé Moustapha Niasse, sur le fonctionnement de l’Assemblée nationale. Il lui reproche d’outrepasser ses prérogatives, notamment pour avoir, supposément, le 15 septembre 2020, présidé une réunion du bureau sanctionnée par « une déclaration de l’Assemblée nationale » sur le dossier des inondations géré par le gouvernement du Sénégal dans le cadre du Plan décennal de lutte contre les inondations (PDLI).

A en croire Doudou Wade, l’Assemblée nationale n’a pas été saisie de ce dossier, puisqu’elle est hors session depuis le 30 juin 2020.