NETTALI.COM - En rétribution de son soutien à la candidature de Macky Sall, lors de la présidentielle passée, Moussa Sy, maire des Parcelles Assainies depuis les locales de 2009, est bombardé président du Conseil d’administration du Port autonome de Dakar. Cela, à la faveur de la dernière réunion du Conseil des ministres.

Le fait déclenche une avalanche d’indignation sur les réseaux sociaux, où le citoyen lambda n’arrive pas encore à s’expliquer le mobile de certaines tortuosités et reptilismes caractéristiques de la pratique politicienne sous nos cieux.

Les Sénégalais sont d’autant plus indignés que cet ancien proche de l’ex-maire de Dakar, Pape Diop, faisait partie des pires détracteurs du leader de l’Alliance pour la République, au sein de la coalition « Taxawu Ndakaru ».

Adoptant une ligne radicale contre le pouvoir, il définissait la transhumance en ces termes : « C’est quand les troupeaux n’ont plus rien à boire ni à manger et qu’ils changent de position pour aller voir là où il y a de l’herbe et de l’eau». Cette phrase, Moussa Sy l’a tenue en mai 2015, après que, depuis Kaffrine, Macky Sall a fait l’apologie de ce phénomène insidieux et pernicieux.

Moussa Sy est celui qui n’hésitait pas à affirmer qu’ « en 2004, Macky Sall n’avait pas de maison…».

Mais la politique  a perdu sa noblesse d’antan, à telle enseigne que l’on sacrifie couramment l’éthique sur l’autel de la tactique. En clair, sa défaite au référendum de 2016 face à une majorité présidentielle renforcée par le recrutement de Amadou Ba, et la venue d’autres forces citoyennes, le prédisposa à une vision sombre de son avenir à la tête de la mairie. Dès lors, cet habitué des hautes manœuvres politiciennes, qui donna son nom à un fameux amendement, au début des années 2000, déploie toute une batterie de stratagèmes pour sa survie politique. D’abord, par le biais d’un entretien accordé au quotidien « Le Populaire », paru le 22 janvier 2018, il demandait au reste de l’opposition de se ranger derrière Karim Wade. Une attitude bizarre, d’autant plus que Moussa Sy, étiqueté jadis anti-karimiste à souhait, a été le premier député à lâcher la mouvance présidentielle le jour du vote du ticket qui défraya la chronique le 23 juin 2011. D’ailleurs, c’est de cette époque que date son rapprochement avec les khalifistes, car il apportera, dans la foulée, son soutien ouvertement à Barthelemy Dias, alors emprisonné après le meurtre de Ndiaga Diouf. C’est naturellement qu’il conservera son poste à la tête de la municipalité grâce aux Khalifistes, d’autant plus que de nombreuses franges des libéraux des Parcelles Assainies n’avaient pas cautionné son élection en 2009.

Au meeting de clôture de la coalition Benno bokk yakaar, lors de la campagne pour les législatives de 2017, Amadou Ba, tête de liste à Dakar, annonce son ralliement à la majorité, sur le ton de la plaisanterie.

L’actuel ministre des Affaires étrangères était-il dans le secret des dieux, au moment de faire cette annonce ? On peut le penser. Car, à la veille de la présidentielle de 2019, Moussa Sy déclare qu’il va soutenir le candidat Macky Sall. Et ce dernier, accueillant la nouvelle, usera du champ lexical de la transhumance pour dire qu’il a péché un gros poisson. « Dakar est dans la poche, parce que j’ai pêché le plus gros poisson. Si je dis ça, c’est parce que de tous ceux qui nous ont rejoint, la venue de Moussa Sy a fait le plus de tollé.  Je peux dormir tranquille, maintenant qu’il est avec nous », dixit Macky Sall.

Le hic, c’est ce que l’image du Port autonome de Dakar, qui a souvent été perçu comme un bras financier du parti au pouvoir depuis l’ère des socialistes, risque d’être écornée par cette nomination. Cela, au moment où l’infrastructure portuaire connait une régression, par rapport à ses concurrents de la sous-région ouest africaine.