NETTALI.COM - Le chef de l’Etat a donné le ton et les religieux l’ont suivi dans l’interdiction des rassemblements publics. Comme dans un effort de communion nationale et un mouvement d’ensemble, ils ont dans la plupart des cas, décidé de l’annulation de l’organisation présente et à venir d'événements religieux.

C’est d’abord la « Ziarra générale » qui devait avoir lieu ce dimanche 15 mars à Tivaouane qui a été annulée. C’est ensuite la « Daaka » de Médina Gounass, ouverte ce samedi 14 mars au 28 mars, qui l’a été par le Khalife de cette cité religieuse. C’est enfin Seydina Issa Thiaw qui a annoncé que Yoff layène ne célèbrera pas l’anniversaire de l’appel de Seydina Limamoulaye, prévu les 25 et 26 mars. De même, auparavant à travers un communiqué, l’autorité religieuse catholique au Sénégal avait informé que les Journées mondiales de la Jeunesse (JMJ), kermesses diocésaines et paroissiales, Pèlerinages (Décanal, Diocésain et National) et autres rassemblements folkloriques (Fêtes foraines…) de nature à drainer beaucoup de monde, sont reportés « jusqu’à une date plus favorable ».

Macky Sall a ainsi interdit pour une durée de 30 jours, toutes les manifestations publiques. Il a dans la foulée demandé aux chefs religieux de l’accompagner dans cette dynamique de combat contre le coronavirus.

Les réactions notées ça et là tendent ainsi à prouver que la décision qui vient d’être prise, était vraiment attendue. Une question se pose toutefois de savoir si Macky Sall avait le choix au regard de la levée de boucliers relative à la nécessité d’interdire les manifestations religieuses et rassemblements publics. Il est vrai que d’aucuns ont considéré le temps mis pour arriver à cette décision comme une forme de tergiversation qui n’avait pas lieu d’être au regard du caractère sérieux de la pandémie, mais, pour Me Ousmane Sèye, invité de l’émission « Ndoumbélane » de la Sen TV, de ce vendredi 13 mars, le président ne pouvait nullement interdire les manifestations religieuses, estimant qu’il devait d’abord discuter avec les familles concernées.

A la vérité, nul n’a le droit de mettre en danger la vie d’autrui, aussi bien d’un point de vue légal, religieux que de la sacralité de la personne humaine. Dans ce contexte de pandémie, continuer à autoriser les événements religieux, aurait équivalu à exposer la vie des autres à un danger certain ? En réalité, la liberté individuelle et celle religieuse de quelque personne que ce soit, ne sauraient autoriser cela. Le chef de l’Etat serait sorti de son rôle de « gardien de la constitution » en n’interdisant pas les manifestations publiques et religieuses. Le droit à la sécurité, y compris sanitaire, étant garanti par cette dernière.

Faut-il interdire les vols en provenance de certains pays ?

Désormais se pose la question de l’interdiction des vols en provenance des pays où l’épidémie est en constante progression.  Voire des voyageurs qui arrivent par la voie terrestre. Tout le monde sait en effet bien que le virus est arrivé de l’étranger sur le sol sénégalais, le 25 février. Personne n’ignore également qu’au moment où la propagation semblait se stabiliser avec la guérison de deux malades, ce Sénégalais venu d’Italie a contaminé toute sa famille et le personnel soignant de l’hôpital de Touba. Pourquoi ne pas réfléchir dès lors à une mesure de suspension momentanée des voyages en provenance de ces pays où sont par ailleurs établis beaucoup de Sénégalais (Italie, France, Etats Unis, Espagne, etc) ? L’on nous apprend même que l’Allemagne va fermer ses frontières avec trois pays que sont la France, l’Autriche et la Suisse. L’on sait depuis la semaine dernière que les Etats Unis ont interdit les vols en provenance d’Europe et pense à y adjoindre le Royaume Uni. La république tchèque, elle a également interdit les vols en provenance d’Italie, de France, de Belgique et d’Allemagne. De son côté la Russie a fermé ses frontières terrestres avec la Pologne.

Une décision de suspension les vols et arrivées par la voie terrestre qui mérite certes réflexion, mais elle est à apprécier rapidement car certains sont désormais tentés de fuir ces pays où l’épidémie avance à vitesse grand V pour venir se réfugier au Sénégal. A titre d'exemple dans la région de Louga, ville d'émigrés, beaucoup d'entre eux empruntent la voie terrestre pour rentrer au bercail. La commune de Dahra a à cet effet pris lé décision de filtrer ses entrées et a mis en place un dispositif de riposte pour épargner le Djoloff de la maladie. L’on peut même désormais s’interroger sur la logique de continuer à hésiter, ce d’autant que dans la plupart de ces pays de provenance, les habitants sont soumis au confinement à l'intérieur du territoire et ne sont autorisés à sortir que pour se rendre au travail, lorsqu’ils ne peuvent avoir recours au télétravail.

Cette pandémie est en réalité loin d’être une mince affaire. En Italie, où elle fait des ravages, l’on fait face à une atmosphère très lourde. Le confinement est de rigueur jusqu’au 3 avril. Il faut une attestation pour circuler dans la rue. Ils sont même à ce point obligés, ces Italiens pour rompre d’avec l’ennui et la morosité ambiante, d’improviser des concerts depuis leurs balcons, question de créer un peu de vie et d’ambiance dans le sens de se doper le moral. Eh oui dans les circonstances exceptionnelles, il faut savoir s’adapter. L’on a aussi vu ces images terribles de médecins en Italie, épuisés, les larmes aux yeux. Les hôpitaux sont au bord de l’implosion, Au bord de la dépression, le personnel soignant est débordé, pris d’assaut qu’il est par ces nombreux malades qui affluent de toutes parts. Ils sont désormais obligés de choisir entre ceux qu’ils peuvent sauver et ceux qu’ils doivent abandonner à leur triste sort. Un choix  cornélien à faire entre vieux et jeunes à laisser mourir ou à prendre en charge ! Terribles ces images comme celles de  ce médecin qui n’arrête pas de prêter son téléphone aux patients qui communiquent par vidéo avec leurs proches comme pour dire au revoir dans la désolation la plus totale. Pour certains, c’est leur dernier souffle de vie.

En France (127 morts, 5 423 cas), ce sont en 24 H, 36 décès et 923 malades supplémentaires qui ont été enregistrés. Une hausse du nombre de cas et de décès la plus importante enregistrée depuis le début de l’épidémie. Et de plus en plus se pose la question d’un confinement total. C’est la colère des médecins qui est en train de grandir puisqu’ils avaient fortement décommandé l’organisation des élections municipales qui ont d’ailleurs connu une forte abstention. Et l’on se demande d’ailleurs si le second tour ne va pas être reporté ? C’est en effet une grande contradiction qui a été relevée entre l’interdiction des rassemblements publics et l’organisation de ces élections.

Beaucoup de reportages annoncent la fermeture des écoles, des universités, des crèches, des salles de cinéma. Tous les lieux qui reçoivent du monde, le sont aussi : la Tour Eiffel, le Musée du Louvre, le Musée d'Orsay, le Parc d’attraction Disneyland, le Château de Versailles, la salle de spectacle Le Moulin rouge, le Printemps de Bourges qui accueillait plus de 200 000 personnes et les rassemblements de plus de 100 personnes, sont interdits. Pour les écoles, le gouvernement a prévu des cours à distance. 12 millions d’élèves sont concernés. La solidarité s'organise entre voisins pour la garde des enfants et des animaux. Le gouvernement envisage l'arrêt de travail indemnisé lorsqu’il n’y a pas la possibilité d’avoir recours au télétravail. L'offre de transport de la Sncf et de la Ratp (train, bus, Rer, Ter, tramway, etc)  est réduite. On assiste à une société totalement déstabilisée. Le mètre de distance est préconisé. Sur BFM TV, l’équation des rassemblements dans les gares, suite à la mesure d'interdiction de rassemblement de plus de 100 personnes, est posée.

Aux Etats-Unis, Donald Trump qui minimisait la pandémie, a subitement changé de ton. Longtemps fortement influencé par les animateurs de Fox News (dont Sean Hannity ou Rush Limbaugh, parmi les plus écoutés qui racontent un univers fantasmé dont il est toujours le héros) qui ont au début traité le coronavirus « de supercherie pour semer la panique dans la population, ou de « complot démocrate pour manipuler l’économie et empêcher le réélection de Trump » ou encore de tentative de « complot chinois ». Eh bien ce cher Donald a fait un revirement. Il a pris une mesure radicale après avoir été accusé par les démocrates et experts sanitaires d’avoir minimisé la crise et tardé à réagir.

Une situation qui montre finalement l’état d’urgence dans laquelle le monde est plongé et qui interpelle les pays les moins développés au moment où les plus puissants du monde peinent à faire face à cette pandémie.

Le fameux démenti et la guerre de Diouf Sarr...

Malgré les 26 cas comptabilisés dont 2 guérisons, le Sénégal fait face depuis une semaine à une diffusion inédite et massive de fake news sur les réseaux sociaux. Des plaisantins et des charlatans  sont en train de mettre a mal la stratégie de lutte contre le virus. L'on a pu entendre débiter des énormités du genre : “Si on annule les manifestations religieuses, le virus va se répandre dans tout le Sénégal. Par contre, si on nous laisse prier comme il se doit, ce virus retournera d’où il vient’’. Ah ces sénégalais, ce sont les seuls croyants du monde ! Sur whatsapp, l’on a eu droit au partage d'un démenti d’un Modou-Modou basé en Italie qui estime que l’histoire de la contamination à Touba n’est que fable. Rappelant son nom, le dénommé Kane renseigne qu’il n’a jamais quitté l’Italie. Le témoignage d’un voisin est venu le conforter.  Sauf que l’information sur les cas à Touba est bien réelle, les images du docteur qui s’adressait à la presse sur le sujet, existe bel et bien. Le secret médical ne permettrait de toute façon pas de révéler l’identité des patients. Et de plus,  le nom de la personne au moment de la production de l’information, n'a jamais été cité. Il a juste été question d'évoquer un cas à Touba. Ce “Modou-Modou’’ a d'ailleurs bel et bien contaminé tout son entourage puisque 71 personnes contacts ont été déclarées à haut risque. Ce qui veut dire qu’elles peuvent développer la maladie. D’ailleurs, 18 personnes parmi elles sont testées positives. Elles sont en traitement au centre de santé de Darou Marnane, à Touba. Fait encore plus probant, le chef du Service des maladies infectieuses, Professeur Moussa Seydi, a d'ailleurs demandé l’indulgence des Sénégalais qui ne lui pardonnent pas d'avoir quitté l'Italie pour venir propager la maladie au Sénégal.

La responsabilité des journalistes est tout aussi pointée du doigt dans la propagation des fake news. En atteste le coup de gueule de Cheikh Tidiane Gomis de Walf qui a relevé ce fait et demande ainsi aux professionnels de l'info de ne pas donner la parole à n'importe qui.

Abdoulaye Diouf Sarr, le ministre de la santé a décidé d’en finir avec les informations mensongères. Aussi, a-t-il décidé de saisir le procureur. «Je regrette qu’en cette période où la nation a besoin de la conjonction des forces de ses fils et filles, certains individus aient l’outrecuidance de diffuser des informations mensongères. Dès demain, le Comité national de lutte contre les épidémies saisira le procureur pour la prise en charge judiciaire de tels faits considérés comme une entrave à la riposte nationale contre le Covid-19.», a-t-il informé.

A peine avons-nous fini d’épiloguer sur l’éventualité d’interdire les voyages en provenance des pays lourdement touchés que l’on annonce deux nouveaux cas. Il s’agit d’un enfant de 15 ans qui était en contact avec le Modou-modou et d’un Sénégalais de 37 ans arrivé, samedi 14 mars au Sénégal en provenance de Barcelone (Espagne). Soit un nombre de cas positifs au Coronavirus porté à 24.