NETTALI.COM  - Inculpé et placé sous mandat de dépôt ce mercredi, Adama Gaye vient s’ajouter à une liste déjà longue d’hommes politiques, de journalistes et de personnalités de la société civile victimes de l’article 80. Ce fameux article jugé liberticide et dont le sort a toujours fait l’objet de débat au Sénégal.  

«Les autres manœuvres et actes de nature à compromettre la sécurité publique ou à occasionner des troubles politiques graves, à enfreindre les lois du pays, seront punis d’un emprisonnement de trois ans au moins et de cinq ans au plus et d’une amende de 100.000 à 1.500.000 francs. Les coupables pourront en outre être frappés d’interdiction de séjour. Tout individu qui aura reçu, accepté, sollicité ou agréé des dons, présents, subsides, offres, promesses, ou tous autres moyens, en vue de se livrer à une propagande de nature à compromettre la sécurité publique ou à occasionner des troubles politiques graves, à jeter le discrédit sur les institutions politiques ou leur fonctionnement, ou à inciter les citoyens à enfreindre les lois du pays, sera puni d’un emprisonnement d’un an au moins et de cinq ans au plus, et d’une amende double de la valeur des promesses agréées ou des choses reçues ou demandées sans que ladite amende puisse être inférieure à 100.000 francs. Les coupables pourront en outre être frappés d’interdiction de séjour.»  Voilà ce que dit le fameux article 80 du pénal sénégalais. Un article jugé liberticide par certains alors que pour d’autres, cette loi ne sert qu’à casser des opposants et adversaires du régime.

Cet article vient en effet de faire une nouvelle victime. Il s’agit d’Adama Gaye poursuivi pour offense au chef de l’Etat et atteinte à la sûreté de l’Etat. Le journaliste-consultant vient ainsi s’ajouter à une longue liste de victimes de cet article 80 dont la disparition du code pénal est souvent réclamée par les défenseurs des droits de l’homme. S’il figure dans le code pénal depuis de très nombreuses années, s’il a fait quelques victimes durant le règne des socialistes, c’est avec l’avènement du Président Abdoulaye Wade en 2000 que l’article 80 fera beaucoup parler de lui. Jean-Paul Dias, secrétaire général du Bloc des centristes gaïndés (Bcg) est l'une de ses premières victimes post-alternance. Après la chute de Wade, le débat autour de l’article 80 reprend. Mais il fera encore des victimes. Parmi celles-ci, Me Amadou Sall, ministre de la Justice sous Wade. Il avait été arrêté et envoyé en prison pour le délit d’offense au chef de l’Etat. Son tort : avoir comparé Macky Sall à un féticheur. C’était dans le cadre de l’affaire Karim Wade. Son «frère» de parti Bara Gaye a, lui aussi, été condamné à six mois de prison ferme pour le même délit. L’ancien secrétaire général de l’Union des jeunesses travaillistes et libérales (Ujtl) avait accusé Macky Sall d’avoir retiré des passeports diplomatiques à des chefs religieux pour les remettre à des homosexuels. Mamadou Lamine Massaly a aussi inscrit son nom sur la liste des victimes du délit d’offense au chef de l’Etat.

Mais il n’y a pas que les politiques qui ont fait les frais de l’article 80. Les journalistes Madiambal Diagne et El Malick Seck ont fait la prison à cause du même article. A ce beau monde, il faudra ajouter Sidy Lamine Niasse, le défunt Président directeur général du groupe Wal Fadjri.