NETTALI.COM - De 260 millions en 2014, les transactions électroniques sont passées à 11 milliards en 2024 dans l'espace UEMOA. L'information a été livrée lors du lancement officiel, ce mardi 30 septembre 2025 de la Plateforme Interopérable du Système de Paiement Instantané (PI-SPI) de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) a officiellement lancé, mardi 30 septembre, sa Plateforme Inter-opérable du Système de Paiement Instantané (PI-SPI).
L’Union monétaire ouest-africaine (UEMOA) franchit un pas décisif dans sa modernisation financière. En inaugurant la Plateforme Interopérable du Système de Paiement Instantané (PI-SPI), la BCEAO ambitionne de faire des paiements électroniques le cœur battant d’une économie plus fluide, inclusive et compétitive.
Le gouverneur de la BCEAO, Jean-Claude Kassi Brou, a rappelé l’ampleur des mutations enregistrées depuis 2015. « L’Umoa a amorcé dès 2015, une transformation digitale marquée par l’adoption d’un cadre réglementaire pour les activités de monnaie électronique, conférant ainsi à celle-ci une place importante et croissante dans les transactions financières », a-t-il indiqué.
Les chiffres donnent la mesure de cette révolution silencieuse : de 260 millions en 2014, les transactions en monnaie électronique ont atteint 11 milliards en 2024.
Dans le même temps, le nombre de comptes est passé de 18 millions à près de 248 millions.
Cette dynamique a profondément transformé l’inclusion financière, désormais évaluée à 74 %, contre moins de 15 % il y a vingt ans.
Avec le lancement de la PI-SPI, les transferts interbancaires deviendront instantanés, accessibles en quelques secondes, quelle que soit la banque ou l’opérateur impliqué. Pour l’expert certifié en finance numérique et inclusion financière, Mouhamadou Moustapha Mbodj, « la plateforme réduira les coûts des transactions et fluidifiera les échanges ».
Selon lui, les commerçants, les petites et moyennes entreprises, mais aussi les acteurs du secteur informel disposeront désormais d’un moyen de paiement instantané, sécurisé et moins coûteux, stimulant leurs activités quotidiennes.
Un levier d’inclusion sociale et économique
Sur le plan social, la PI-SPI est perçue comme un outil de réduction des inégalités. « Dans l’UEMOA, le taux de bancarisation reste limité à environ 23 % et à 42 % au Sénégal en 2023. En rendant les paiements interopérables et accessibles à tous, la SPI contribuera à relever significativement ces chiffres dans les prochaines années », explique M. Mbodj.La BCEAO espère ainsi diminuer progressivement la dépendance au numéraire, bâtir une économie plus traçable et sécurisée et, par ricochet, moderniser la fiscalité.
Cette initiative s’inscrit dans un environnement déjà dynamisé par l’Instruction n°001-01-2024 de la BCEAO, qui encadre les services de paiement. Pour les fintechs, l’opportunité est historique. « En plaçant tous les acteurs sur une plateforme commune, la BCEAO crée un terrain de jeu équitable où la compétitivité se fonde sur l’innovation et la qualité de service », analyse M. Mbodj.
Les opérateurs de mobile money, très présents dans la région, devront adapter leur modèle économique à cette nouvelle donne. La quasi-gratuité des transferts pousse en effet à repenser les sources de revenus, mais offre aussi des perspectives inédites d’élargissement de la clientèle et de diversification des services.
Au-delà du paiement, c’est toute une architecture financière qui pourrait se redessiner. « Une fois les flux interopérables, la prochaine étape naturelle sera de rendre les données et services financiers accessibles via des API sécurisées, afin de permettre aux fintechs et aux banques de bâtir de nouveaux services à valeur ajoutée », projette M. Mbodj.
Le spécialiste cite l’exemple du système PIX au Brésil, lancé en 2020, qui a bancarisé près de 75 % de la population en moins de cinq ans. Pour lui, « l’UEMOA, avec la SPI comme socle, peut s’inscrire dans la même trajectoire et combiner inclusion, innovation et modernisation ».
En plaçant banques, fintechs et opérateurs de monnaie électronique sur une même infrastructure, la BCEAO espère briser les silos et ouvrir la voie à une véritable intégration financière régionale. Ce chantier ambitieux n’est pas une finalité en soi, mais le point de départ d’une nouvelle ère pour les huit pays de l’UEMOA.
Comme le conclut Mouhamadou Moustapha Mbodj, « la PI-SPI repositionnera la région dans le concert des économies digitales émergentes, en mettant la technologie au service de l’inclusion et de la croissance ».