NETTALI.COM - L’ancien ministre d’État et ex-porte-parole du PDS tire la sonnette d’alarme dans une tribune où il décortique ce qu’il considère comme des signes annonciateurs d’une confusion entre pouvoir politique et institutions républicaines. Dans son viseur : l’orientation diplomatique du régime et les discours du parti présidentiel.
C’est en tout cas la mise en garde formulée ce week-end par Babacar Gaye, ancien ministre d’État et ancien porte-parole du Parti Démocratique Sénégalais (PDS). Dans une tribune très partagée, l’ancien député s’invite dans le débat sur la trajectoire idéologique et institutionnelle du pouvoir incarné par le président Bassirou Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko.
La récente visite du président de l’Assemblée nationale vietnamienne, Trần Thanh Mẫn, a mis la puce à l’oreille de Babacar Gaye. Selon lui, cette rencontre officielle, ponctuée de fastes et de signatures d’accords bilatéraux, illustre une certaine fascination du régime actuel pour les modèles autoritaires à parti unique.
« L’hôte du Président El Hadji Malick Ndiaye est certes son homologue, mais pas son alter ego. Il est venu accompagné d’une délégation composée de ministres et de présidents de Conseils populaires », souligne Gaye, y voyant les prémices d’une diplomatie inspirée de systèmes politiques centralisés.
Le parallèle avec le Vietnam, où le Parti communiste détient la direction exclusive de l’État et de la société, est particulièrement significatif. Pour l’ancien ministre, la confusion entre Exécutif et Législatif observée à cette occasion est symptomatique d’un glissement institutionnel.
Des inspirations révolutionnaires assumées
Babacar Gaye relève aussi une orientation géopolitique qui s’éloigne des alliés démocratiques traditionnels du Sénégal. Le rapprochement avec des pays comme la Chine, le Mali, le Burkina Faso et désormais le Vietnam, s'inscrit selon lui dans une stratégie de redéfinition des alliances, mais aussi des références politiques. « Le régime actuel semble fasciné par des figures révolutionnaires comme Sékou Touré, Sankara, Mao, Ho Chi Minh ou encore Mamadou Dia », observe-t-il. Et d’y voir une volonté de faire primer l’idéologie du parti au détriment des équilibres républicains.
Dans sa tribune, l’ancien ministre libéral revient sur les fondements d’un régime de Parti-État, qu’il définit comme un système où le parti au pouvoir se confond avec les institutions. Une situation où la loyauté à l’État est supplantée par l’allégeance au parti, et où les nominations dans l’administration sont guidées par la fidélité politique plutôt que la compétence. « Le Parti-État est caractérisé par le monopole du pouvoir, la confusion entre parti et institutions, l’instrumentalisation de la justice, de la police ou de la gendarmerie », avertit-il.
Babacar Gaye n’hésite pas à convoquer l’histoire pour appuyer ses craintes, rappelant que Mamadou Dia, auquel se réfère souvent le PASTEF, était lui-même favorable à une primauté du parti sur l’État.
En mettant sur la table ces éléments, l’ancien ministre semble vouloir alerter sur un risque de régression démocratique dans un contexte politique encore fragile après une alternance historique. Si certains y verront une sortie politique classique d’un opposant libéral, d’autres pourraient y lire un signal d’alerte face à la tentation autoritaire qui guette parfois les pouvoirs portés par une forte légitimité populaire.