NETTALI.COM - L’enquête déclenchée à la suite du rapport accablant de la Cour des comptes sur la gestion des finances publiques entre 2019 et mars 2024 franchit une étape décisive. Ce jeudi 13 juin, deux anciens Trésoriers généraux du Sénégal sont attendus dans les locaux de la Division des investigations criminelles (DIC).
Selon des informations, il s’agit d’Adama Racine Sow, qui a occupé le poste entre mai 2015 et mai 2020, et de Waly Ndour, en fonction de 2008 à 2012. Le premier est convoqué à 10 heures et le second à 15 heures.
Considérés comme des technocrates chevronnés du Trésor public, leur audition pourrait, selon plusieurs sources, permettre aux enquêteurs de comprendre les circuits opaques ayant favorisé des sorties illicites de fonds en marge des procédures budgétaires officielles.
« Ce sont des pièces maîtresses dans cette enquête. Ils ont piloté des services stratégiques où se décide le sort de milliards de francs CFA », confie un enquêteur sous anonymat.
Depuis plusieurs semaines, la DIC interroge à tour de rôle des responsables de banques et d’institutions financières, mais le dossier prend aujourd’hui une nouvelle tournure avec l’implication directe des anciens argentiers de l’État.
D’après les éléments recueillis, deux affaires retiennent particulièrement l’attention des enquêteurs et des magistrats financiers. La première porte sur la fermeture anticipée de plusieurs Dépôts à terme (DAT), sans qu’aucun reversement n’ait été effectué dans les caisses du Trésor public. Une opération qui aurait permis le détournement de montants importants en toute discrétion.
Le second dossier concerne un scandale présumé autour des Certificats Nominatifs d’Obligation (CNO), un instrument de dette publique. Selon le référé du Premier président de la Cour des comptes, ces obligations seraient évaluées à 546,70 milliards de francs CFA, auxquels s’ajoutent des intérêts de 58,99 milliards, attribués de manière suspecte à des sociétés et à des tiers.
« Ces montages financiers, réalisés loin des circuits de contrôle traditionnels, auraient permis à certains bénéficiaires de s’enrichir illicitement », précise un expert financier qui a consulté une partie du rapport confidentiel.
La DIC cherche à démêler les responsabilités et à identifier les bénéficiaires de ces opérations jugées irrégulières. Plusieurs hauts fonctionnaires, anciens et en poste, pourraient être entendus dans les prochains jours.
« Il s’agit de comprendre comment un système parallèle de gestion de fonds publics a pu prospérer dans l’ombre des circuits officiels, sous la complicité active ou passive de certains cadres », explique une source proche du dossier.
L’affaire, qualifiée d’explosive par les observateurs, pourrait provoquer un séisme au sein de l’administration financière et entraîner des suites judiciaires retentissantes.