NETTALI.COM - Le nouveau Front démocratique pour une élection inclusive (FDPEI) a fait face à la presse, le mercredi 14 février. Une occasion saisie par la bande de Cheikh Tidiane Gadio pour faire des précisions, régler des comptes et émettre des propositions pour sortir de cette crise.

Le Front démocratique pour une élection inclusive (FDPEI) regroupe 14 candidats recalés à la Présidentielle. Mercredi, il a fait face à la presse pour faire part de ses motivations et dégager des perspectives de sortie de crise.

Prenant la parole, l'ancien ministre des Affaires étrangères sous Wade, Cheikh Tidiane Gadio a informé sur l'origine de la création de ce front. "le FDPEI a été créé par des candidats spoliés de leurs droits civils et politiques par le Conseil constitutionnel à l’étape du parrainage citoyen et lors de la publication de la liste définitive, les écartant ainsi et injustement de la course à la Présidentielle de 2024", a-t-il dit.

Avant d'ajouter que la crise politique qui s’est installée, n’épargne aucun compartiment de notre peuple. D'où à son avis, leur décision de se regrouper en un front solide et compact pour apporter leur contribution quant aux perspectives de sauvegarde des intérêts du pays et de son peuple.

"Cette crise, précise-t-il, est née avant tout d’une série de décisions très regrettables du Conseil constitutionnel, disqualifiant de façon irrégulière des citoyens candidats qui étaient pourtant en parfaite conformité avec les règles du parrainage citoyen et l’exigence d’une nationalité sénégalaise exclusive. La survenue d’accusations graves et très préoccupantes contre certains membres du Conseil constitutionnel a provoqué, fait sans précédent dans notre histoire politique et institutionnelle, la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire".

Mieux, poursuit-il, "aussi grave que la spoliation des droits de candidats et la mise en place d’une com- mission d’enquête, un autre grand scandale a éclaté trois jours avant le lancement de la campagne pour la Présidentielle. Il porte sur la révélation de la présence d’une candidate binationale (et peut-être de plusieurs autres) sur la liste des candidats autorisés à compétir pour les suffrages des citoyens. Pourtant, un autre candidat, lui, a été écarté justement pour binationalité, alors que la preuve qu’il avait régularisé son statut avait été présentée à tout le pays".

Or, fait remarquer Cheikh Tidiane Gadio, c’est ce même Conseil constitutionnel qui doit proclamer le président ou la présidente de la République vainqueur de l’élection du 25 février. "Il était devenu incontestable que le Sénégal entrait dans une grave crise de crédibilité et de confiance dans ses institutions. C’est dans ces circonstances qu’est intervenue la décision du président Macky Sall de stopper net le processus électoral en abrogeant son décret portant convocation du corps électoral pour l’élection du président de la République le 25 février 2024".

Poursuivant la genèse de la crise qui s’est installée dans le pays, il déclare : "Depuis l’annonce de cette décision, l’histoire de notre pays semble s’être accélérée avec le vote, à l’Assemblée, d’un report du scrutin présidentiel au 15 décembre prochain. Ce qui est aussi frappant, c’est la série d’événements qui ont suivi. Des violences meurtrières qu’on croyait bannies de notre vie politique, ont été observées. Aux morts et blessés dans les manifestations ont succédé des appels à l’affrontement et à l’insurrection. Une telle spirale ne conduit pas notre pays à bon port”.

Le porte-parole de s’insurger, à ce stade de son propos, contre "l’implication ostentatoire et intolérable des médias étrangers (français et du Moyen-Orient en particulier) dans les infox, la manipulation et l’exaltation de la violence au Sénégal. Certains journalistes étrangers sont allés très loin dans la désinformation pure et simple, en parlant ‘d’affrontements qui ont embrasé tout le pays’. Les plus téméraires ont dépeint une apocalypse au Sénégal qui présage ‘d’une guerre civile’ ou ‘d’un coup d’État militaire” ! Du jamais vu... Comme s’ils étaient en mission pour contribuer à la déstabilisation de notre pays”, dénonce l’ancien ministre sous Wade.

L’hypocrisie de certains pays décriée par le FDPEI

En outre, le FDPEI, selon Cheikh Tidiane Gadio, a noté des injonctions inacceptables de pays et d’organisations partenaires qu’on a vainement attendu du bon côté des femmes et des enfants massacrés par milliers sans répit à Gaza, sans compter les coupures de l’Internet et de l’électricité jusque dans les hôpitaux.

"N’est-ce pas de façon manifeste une indignation sélective ! Certains pays sont même allés jusqu’à récuser le vote du Parlement d’un autre pays en le déclarant "illégal" prétendument à cause de l’intervention des forces de l’ordre (pourtant prévu par l’article 53 du règlement intérieur du Parlement sénégalais)", fulmine le porte-parole.

Le Dr Gadio d’ajouter, en persiflant contre les États-Unis : "Sans préjuger de nos différentes opinions sur le vote de notre Parlement, nous rappelons quand même que dans un de ces pays, le décompte des votes pour la proclamation des résultats de leur dernière Présidentielle n’a pu se faire au Congrès que suite à l’intervention armée de leurs forces de défense et de sécurité, après une violente insurrection et des saccages perpétrés par les partisans du président candidat malheureux à sa réélection. Notre posture de candidat aspirant à remplacer le régime actuel nous interpelle également sur l’urgence d’éradiquer le type de relation faite de soumission et de courbettes qui nous vaut aujourd’hui ces formes d’humiliation”.

Libération des détenus

Ainsi, les membres du front se défendent d’être les fossoyeurs de la démocratie au Sénégal. "Notre Front rappelle à nos compatriotes que nous Sénégalais sommes les premiers à dénoncer les failles de notre démocratie et à chercher à y remédier. La crise constitutionnelle, institution- nelle et politique qui frappe de plein fouet notre pays est très grave et très sérieuse. Toutefois, nous savons que la résilience, historiquement attestée du peuple sénégalais, peut nous tirer d’affaire et nous aider à restaurer un processus électoral inclusif, relancer le fonctionnement régulier de nos institutions et prévenir toute prolongation indue du mandat présidentiel", assure le Dr Gadio.

Qui précise : "Notre front ne s’était pas concentré sur le maintien ou le report de l’élection présidentielle. Par contre, nous avons exigé sans relâche nos droits de candidats à la Présidentielle, pour que ceux parmi nous qui seront régularisés puissent être inclus dans la liste des candidats. Dans cet esprit, nous n’avons jamais validé les thèses de ceux qui nous proposaient d’accepter les décisions injustes et indéfendables du Conseil constitutionnel et d’être des dommages collatéraux consentants du système mis en place pour nous juger et nous écarter. De là que le report de l’élection malgré ses inconvénients manifestes, répare la grave injustice qui nous avait été faite. Il nous rassure aussi que nos droits seront respectés à la reprise du processus électoral et que la question des binationaux sera tranchée de façon juste et équitable".

Au président de la République, le FDPEI lance un appel à organiser dans les meilleurs délais non pas "un dialogue national" (formule contestée), mais une concertation nationale sur la réforme de la loi électorale et des institutions en charge de sa mise en œuvre et la relance du processus de l’élection présidentielle.

"Cette concertation nationale nous permettrait une gestion concertée de la transition et la mise place d’une feuille de route pour la réconciliation nationale et pour une élection présidentielle apaisée, crédible et inclusive. Même la controverse sur la durée de la transition devrait trouver un compromis raisonnable et acceptable pour tous lors de la concertation. Également, nous proposons des gestes forts d’apaisement à travers notamment la libération des détenus arrêtés dans le cadre d’activités ou de manifestations politiques".