NETTALI.COM - Le procès pour viol et menace de mort opposant Adji Raby Sarr à Ousmane Sonko s’est ouvert ce mardi 23 mai 2023 devant la chambre criminelle de Dakar. Celle-ci a rejeté la demande de renvoi des avocats de la défense et a décidé de retenir le dossier qui sera jugé sans le leader de Pastef qui, selon ses avocats, n’a pas reçu de convocation.

A moins qu’il ne se présente au tribunal en cours d’audience, Ousmane Sonko sera jugé par contumace. Car, le maire de Ziguichor n'a pas comparu. Seules Adji Sarr et Ndèye Khady Ndiaye, toute les deux vêtues de rouge, sont venues. Et n’en déplaise  aux avocats du leader de Pastef et de ceux de sa co-accusée, Ndèye Khady Ndiaye, le dossier a été retenu par le président Moustapha Fall. Celui-ci s’est opposé à la demande de renvoi des avocats de la défense.

En fait, dès que le dossier a été appelé à 9h48 mn, le président a fait savoir que l’affaire est en état et que la chambre criminelle va la retenir. A-t-il fini que Me Mountarou Baldé qui fait partie des six avocats de Ndèye Khady, a demandé le renvoi.  "Nous sollicitons le renvoi de cette affaire. Nous voulons obtenir les audios et les vidéos qui ont été versés dans le dossier", soutient l'avocat. Et Me Moussa Sarr de renchérir que le premier  renvoi a été décidé d’office par le tribunal sans que le dossier ne soit en état. Pour lui, l’affaire vient pour la première fois. "Nous sollicitons une date pour organiser notre défense et cela ne peut pas être refusé en droit. Il faut qu’on organise notre défense dans le cadre de ce dossier. Plusieurs fois, des affaires criminelles ont été évoquées et renvoyées pour permettre à la défense de se préparer", argue Me Sarr.

Me Ibrahima Mbengue ajoute : "Elle veut être défendue convenablement. Les droits de la défense étant sacrés comme nous le rappelle la Constitution et les conventions internationales.  Nous n’avons encore rien vu. Nous allons visionner en même temps que tout le monde alors que nous sommes de la défense. Une date raisonnable pour nous permettre de regarder les vidéos afin de bien défendre la dame ne ferait pas mal."

Me El El Hadji Diouf s’est opposé à tout renvoi "pour la bonne et simple raison que les arguments ne sont pas opérants". "Ils sont constitués depuis le début de cette affaire. Ils ont assisté leur cliente aussi bien à l’enquête préliminaire et ont participé à toutes les auditions, toutes les confrontations. Le dossier a été mis à leur disposition pour examen. Ils ont été placés sous le même piédestal. Je m’étonne que les avocats des accusés viennent vous dire qu’ils ne sont pas en état, qu’ils n’ont pas pu exploiter le dossier", dit-il.

Me Abdou Dialy Kane a abondé dans le même sens que le parquetier en plaidant pour la retenue de l’affaire. "Nous ne sommes pas devant une juridiction correctionnelle, mais devant la chambre criminelle. Et nous savons tous comment ça se passe. Ils ont dit qu’ils n’avaient pas les vidéos, je n’ai vu ni vidéos ni audio. Devant une juridiction pénale, tous les éléments de preuves sont discutés à la barre. Et aucune preuve n’ayant pas fait l’objet d’une discussion à la barre n’est  recevable ? Ils ont tous connaissance du contenu de ce dossier depuis l’ouverture de l’information !. Ils avaient suffisamment les moyens de prendre connaissance. Compte tenu de la particularité de cette affaire, la meilleure décision serait de la retenir et de la juger une bonne fois", dit-il. Et de lancer : "C’est du dilatoire. Il (Sonko) a préféré défier la justice et a préféré la désobéissance civique. Il a préféré ignorer la justice de son pays et ils sont là pour le défendre. Cette demande de renvoi par procuration ne peut prospérer… C’est le moment de la confrontation, la vérité va jaillir. Le combat aura lieu. On ne veut pas que ce procès se déroule. On crée des incidents. Il a peur du procès, le poltron."

Le procureur de la République Abdou Karim Diop s’est aussi opposé au renvoi. "Le dossier est en état et toutes les parties y compris le parquet ont eu plus d’un an pour se mettre à l’état. C’est une audience spéciale, cela veut dire qu’on a pris toutes les dispositions pour que l’affaire soit retenue ce jour. Au regard de tout ce qui a été fait pour la mise à disposition du dossier pour la défense et pour la partie civile qui ont eu largement le temps de l’étudier, il n’y a pas un élément légal ou des éléments pouvant militer en faveur d’un renvoi", fait-il observer avant de demander que la demande soit rejetée.

Pour les avocats de Ousmane Sonko, il y a bel et bien un motif de renvoi puisque leur client n’a pas reçu de citation à comparaître. "Notre client n’a pas été appelé. Il est partie au procès. Les conditions pour sa comparution n’ont pas été respectées. A ce jour, il n’a reçu une quelconque citation. Si dans le dossier il y a une pièce qui sous-tend que Ousmane Sonko Sonko a été convoqué, cette pièce ne peut nous lier parce que c’est un faux. Les conditions de sa comparution n’ont pas été respectées de même que la régularisation de sa comparution", soutient Me Ousseynou NGom. Me Bamba Cissé dit également n’avoir pas vu la citation de leur client. "Je défie quiconque de me sortir une pièce dans laquelle Ousmane Sonko a déchargé avoir reçu une convocation. Une affaire qui vient pour la première fois, des avocats qui se constituent, ils demandent le renvoi et on le leur refuse. Je veux que mon client comparaisse si vous voulez que la vérité éclate. Je vais m’organiser. Si vous n’avez peur de rien, laissez le tribunal renvoyer et il sera là, si vous voulez un débat contradictoire ?".

L'affaire a finalement été retenue pour être jugée ce mardi. Au moment où ces lignes sont écrites, une pause de 15 minutes est observée avant la reprise des débats.