NETTALI.COM - En conférence de presse, hier, l’ancienne présidente du Conseil économique, social et environnemental (Cese) a tiré à boulets rouges sur le PDS qu’elle accuse de dealer avec le président Sall, mais est rattrapée par ses contradictions.

En politique, les positions peuvent être aussi fluctuantes et déroutantes que les prix du baril de pétrole. En fonction des personnes cibles, des circonstances et des intérêts du moment, les discours peuvent changer comme des sous-vêtements. Quitte à nager dans un océan de contradictions et de paradoxes. La sortie, hier, d’Aminata Touré en est une parfaite illustration. En conférence de presse, l’ancienne Première ministre dénonce une possible amnistie de Karim Wade et se tait opportunément sur celle de Khalifa Ababacar Sall qui est la plus agitée ; elle invoque des décisions des autorités judiciaires pour légitimer sa position contre Karim Wade et attaque la même justice qui a lancé des poursuites contre l’opposant Ousmane Sonko ; elle cogne sur le ministre Antoine Félix Abdoulaye Diome – préposé à la facilitation du dialogue et ancien procureur dans la traque qui avait abouti à la condamnation du leader du PDS. Sauf qu’elle-même a battu campagne avec d’anciennes figures du régime libéral, alors qu’elle les a fait poursuivre, autrefois, pour des infractions économiques. Entre autres paradoxes. Tout, dans le propos de l’ancienne Première ministre, se ramène aux libéraux et particulièrement au fils de l’ancien président Wade. “De toute évidence, peste Aminata Touré, l’appel au dialogue du président Macky Sall est une manœuvre politique pour diviser l’opposition, une manœuvre qu’il a entamée depuis longtemps avec la collaboration active du PDS. Aujourd’hui, ce deal que j’annonçais entre le président Macky Sall et le PDS a éclaté au grand jour. En fait, le PDS n’est pas participant au dialogue, il est co-organisateur avec le président Macky Sall d’un pseudo-dialogue et paradoxalement l’actuel ministre de l’Intérieur Antoine Diome, ancien procureur adjoint de la Crei qui a condamné Karim Wade en sera le facilitateur !”.

En d’autres circonstances, cette accusation contre le ministre de l’Intérieur et le PDS aurait pu avoir un sens. Mais quand celle qui le tient ne s’est pas gênée, par le passé, notamment aux élections législatives, de poser aux côtés de responsables politiques qu’elle a naguère accusés d’avoir dilapidé les deniers publics. Notamment Aida Ndiongue de qui elle prétendait que la traque des biens mal acquis a permis de recouvrer une quarantaine de milliards de francs CFA, cela fait désordre. Quand elle vient de quelqu’une qui avait accepté de cheminer avec Oumar Sarr qu’elle avait souhaité faire poursuivre pour enrichissement illicite, même si la procédure n’est pas allée jusqu’à son terme, ça pose problème. Mais à entendre Aminata Touré, il n’y a rien d’anormal. Son combat, c’est de barrer la route à Macky Sall qui veut faire valider sa troisième candidature et effacer les 138 milliards que Karim Wade doit aux Sénégalais à travers le pseudo-dialogue.

 “Pour valider le deal, un pseudo-dialogue sera organisé pour jeter de la poudre aux yeux de l’opinion nationale et internationale en blanchissant Karim Wade et effaçant les 138 milliards qu’il doit aux Sénégalais. En contrepartie, le PDS, qui s’est bien gardé de parler de 3e mandat, va accepter la candidature moralement et juridiquement inacceptable du président Macky Sall. Il évoquera la décision du Conseil constitutionnel, seul habilité à décider de qui sera candidat”, fulmine Mimi Touré.

Pendant ce temps, rien sur le cas Khalifa Sall qui est logé à la même enseigne, même si les montants ne sont pas les mêmes. Selon la candidate à la prochaine Présidentielle, le PDS a donné des gages solides au président Macky Sall : en votant toutes les lois à l’Assemblée, alors que BBY avait perdu sa majorité ; il a absous le président de la République en le tenant pour non-responsable de l’emprisonnement de Karim Wade et en jetant toute la responsabilité à son ministre de la Justice de l’époque… Cela dit, la députée déchue de son mandat a également invoqué le contexte pour fustiger la mauvaise foi du président. “En somme, souligne-telle, Macky Sall parle de dialogue, mais confisque illégalement un mandat de député, emprisonne plus de 400 jeunes, met la justice aux trousses d’un opposant, car il veut sélectionner ses propres candidats. Et pour finir, il sort les troupes pour mater ceux qui ne sont pas d’accord”.

En ce qui concerne le troisième mandat, Mimi est sans équivoque : “Non, le Conseil constitutionnel n’est pas au-dessus du peuple qui a clairement voté en 2016 pour que «nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs». On n’est pas dans l’interprétation de la Constitution ; le peuple l’a déjà fait. On est dans la période de son application ! En ce même moment, un opposant, Ousmane Sonko, pour ne pas le nommer, risque d’être rendu inéligible en actionnant la justice, en attendant que d’autres suivent. Aussi, nous lançons un appel à tous les jeunes, les femmes, les hommes, les leaders d’opinion, les syndicats, les associations afin qu’ils rejoignent et renforcent le combat des démocrates, de la plateforme des forces vives F24 afin de défendre nos acquis démocratiques, de défendre la Constitution et d’imposer l’organisation d’élections libres, transparentes et inclusives”.

Très en verve, elle dénonce une régression démocratique. “Nous sommes tous pour la paix et c’est pour cela que nous défendons la démocratie. Comme femme et mère, nul ne peut mieux comprendre que moi l’importance de la paix pour le présent et le futur de nos enfants et de nos familles. Il est aussi vrai que le Sénégal est un pays de dialogue. Mais jamais dans l’histoire du pays, un président n’a appelé au dialogue dans de telles conditions de répression”.